[Abegg, Hadrien] Le Sanctuaire du crépuscule
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[Abegg, Hadrien] Le Sanctuaire du crépuscule
Le Sanctuaire du crépuscule
Hadrien Abegg
L'Harmattan
138 pages
ISBN : 978-2-343-23968-2
Hadrien Abegg
L'Harmattan
138 pages
ISBN : 978-2-343-23968-2
Résumé de couverture :
Le sanctuaire du crépuscule est un thriller fantastique et poétique, qui entraîne dans les méandres les plus sombres de l'âme humaine. Le récit se déroule dans une ville imaginaire qui ressemble à une métropole d'Amérique du Sud. Au coeur de cette cité mystérieuse, Léa, jeune inspectrice de police, enquête sur une série de viols et de meurtres rituels perpétrés sur des adolescentes à l'allure androgyne. Rebelle, solitaire et fragile, adepte des paradis artificiels, Léa possède un don de clairvoyance hérité de ses ancêtres chamanes. Troublée par sa propre ressemblance physique avec les victimes, elle va bientôt comprendre qu'elle est la cible ultime du serial killer...
Mon avis :
J'ai reçu ce roman dans le cadre d'une Masse critique mauvais genre sur Babelio. La lecture m'a un peu déroutée, car, s'il correspond aux codes du genre policier, il s'en éloigne également dans sa narration. C'est tout d'abord un roman court, donc nécessairement épuré. L'auteur prend le temps d'instaurer des ambiances, de nous confronter à des scènes, le tout avec des effets oniriques, comme si nous voguions d'un songe à l'autre, sans réelle continuité.
Léa, jeune inspectrice, est chargée seule du dossier "Coyote", série de meurtres sauvages vraisemblablement perpétrés par un tueur en série. Elle-même se relève juste d'un choc, son équipier ayant été tué dans une explosion. L'enquête piétine, mais en suivant son intuition, elle parvient à trouver une piste inédite jusqu'ici. Elle a ses méthodes, Léa, parfois discutables, parfois efficaces, et elle est du genre à travailler seule, même si un nouvel équipier lui est adjoint, à qui elle commence à faire un peu confiance.
La narration oscille entre des temps de l'enquête, et surtout des lieux, puisque nous marchons sur les traces de Léa : dans le centre où est interné le jeune Luys, dernière victime du Coyote, défiguré et méconnaissable, que Léa doit réussir à faire parler ; dans un mystérieux manoir perdu dans la forêt ; dans un établissement de nuit libertin... Ces motifs presque musicaux sont ponctués d'intermèdes dans l'appartement de Léa, toujours seule, face à son mal-être et à des souvenirs terrifiants. Sur son balcon, on l'imagine bien contempler la ville sur un air de samba le jour, ou la nuit sur une mélodie déchirante jouée au saxo, sur fond d'étoiles pures et distantes.
Nous sommes avec elle, dans sa tête pour ainsi dire, et justement dans cette tête, ça ne va pas très bien : ce roman me semble être avant tout une quête d'identité, de pureté, non tant charnelle (quoique ses traumatismes font d'elle une jeune vierge chaste par incapacité à fréquenter ses semblables) que mentale. Elle a l'obsession de rassembler ses idées, de rester alerte, de se maîtriser, alors que les substances licites et illicites lui brouillent le cerveau. Elle pourrait bien rechercher un état de grâce qui n'a jamais existé, mais qui serait au moins antérieur aux addictions, à cette folie meurtrière qui la pollue progressivement, mais à laquelle il faut pourtant faire face, parce que c'est son métier, et qu'elle est consciencieuse.
Le style donne à ce roman bref une certaine beauté, les symboles sont travaillés, quoique un peu connus - pourquoi faut-il que les psychopathes aient toujours une obsession de la métamorphose, des papillons, et un problème avec le genre ? Si vous pensez à un célèbre roman avec un papillon devant un visage... ce n'est pas tout à fait ça non plus, mais nous le frôlons des ailes au passage.
A l'issue de cette lecture, je reste un peu dans l'expectative, pas vraiment sûre d'avoir tout compris. Je ne juge pas utile de me prononcer sur l'enquête policière en elle-même, toutefois des amateurs de polars purs et durs y trouveraient sûrement des manques.
- Spoiler:
- Moi, j'ai été somme toute assez choquée par un certain discours de psychanalyste, minimisant les pulsions de meurtre, y compris la pédophilie : "il est l'enfant, il incarne (...) l'instinct sexuel attiré par la chair, le besoin physique irréfléchi, immédiat" page 120 - il est question de ligoter une adolescente anorexique et d'avoir des relations sexuelles avec elle. Et puis, est-ce que dans un pays d'Amérique du Sud, une mineure qui se prostitue a plus de risques d'être "anorexique", ou plus crûment maigre, parce qu'elle ne mange sans doute pas à sa faim ?
Le comble : alors que Léa va rencontrer le meurtrier, le psychanalyste lui conseille de faire attention, quand même...
Malgré l'élégance de l'écriture, je ne peux qu'accorder un 3,5/5.
Citations :
Elle s'assit à une terrasse de café et se mit à observer le paysage urbain qui l'entourait. Elle trouvait l'esprit de la ville éternel tandis que ses passants étaient de simples passagers, dont le trajet allait de la vie à la mort. (Page 49)
Léa sortit quelques instants sur le balcon, la douceur de la température, associée au noir du ciel, suggérait une ambiance estivale et festive. Elle se sentait à l'aise dans ce paysage, à un âge où les promesses de lendemains qui chantent sont encore intactes. Une cigarette à la bouche, une légère brise effleurant sa nuque, elle réfléchissait à la façon d'un vieux sage, tout en tirant sur son morceau de papier enfumé. (Page 65)
Les autres clichés correspondaient presque tous aux victimes retrouvées jusque-là. Des visages d'adolescentes, qui paraissaient comme incommodées par cette métamorphose physique échappée de l'enfance, qui serait suivie d'un égorgement silencieux. Une très grande tristesse émanait de leur expression.
Elles portaient le plus souvent des blousons et des jeans, ce qui leur conférait un aspect de garçon manqué. Leurs cheveux étaient courts, parfois mi-longs.
Une cigarette au coin des lèvres, la plupart semblaient taciturnes, ressemblant à des statues antiques d'un nouveau genre. De là à penser qu'elles préféraient mourir et être des victimes potentielles, Léa se garda bien de l'imaginer. (Page 87)
Ce n'était plus la nuit, mais le noir rempli de points lumineux à l'origine de tout. Ce paysage, à la fois vide et plein, la remplissait d'un sentiment de beauté absolue. Elle ne voulait plus vivre autrement et demeurer ainsi pour toujours. Elle restait là, tel un vestige du temps présent, tandis qu'une mélodie nostalgique envahissait sa tête. (Page 97)
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