[Bordes, Gilbert] Les Âmes Volées

Gilbert Bordes, Les Âmes Volées.



Nombre de pages : 216
Edition : Le Livre de Poche
ISBN : 978-2-253-12093-3
Prix : 6,00 €

4ème de couverture :

Ils chantent.
Ils sont heureux. Vêtus d'une aube de toile rêche, malgré le vent et le froid, ils louent dès l'aurore les bienfaits de Moragne, le prophète de l'Eglise des Deux Sphères. Estelle a retrouvé la paix de l'âme dans la communauté. Mais a-t-elle oublié sa fille, Pauline, qui ne s'exprime plus que par la colère depuis le départ de sa mère ? A-t-elle oublié son mari, Jérôme, ancien rugbyman impulsif prêt à faire le coup de poing pour la récupérer ? Et que va-t-il advenir d'elle si Moragne la choisit comme servante particulière ? Derrière la joie et l'harmonie qu'affichent les sectes, fanatisme, sexe et cupidité règnent en maîtres.
Dans ce nouveau roman, Gilbert Bordes en dénonce les mécanismes pervers. Mais il leur oppose aussi le courage et la détermination de ceux qui luttent pour une liberté primordiale : celle de la conscience.


Mon appréciation :

Voilà le deuxième roman de Gilbert Bordes que je lis après Le Porteur de Destin proposé dans le cadre d’une lecture commune.
Cette fois encore lire cet auteur est un plaisir. Son écriture est simple, directe, fluide et efficace. On entre tout de suite dans le sujet et il ne faut guère de temps pour s’attacher aux personnages. L’auteur développe son histoire par petites touches sensibles et délicates, il transparaît au fil de ces lignes une profonde humanité et une grande générosité. Gilbert Bordes ne juge ni ne condamne, il montre et décrit les faiblesses et les blessures de l’âme humaine avec compassion.
L’histoire de ce roman en particulier, vous l’aurez compris, dépeint l’univers des sectes et leurs paradoxes. Il est malgré tout à déplorer que les évènements sont on ne peut plus attendus. En lisant ce livre vous ne découvrirez, me semble-t-il, rien de plus que ce que vous connaissez ou croyez connaître sur les sectes. La secte en question dans ce roman est en quelque sorte l’archétype supposé de l’idée que l’on se fait d’une secte avec son lot d’hypocrisie, de manipulations mentales et de tortures psychologiques insidieuses tout autant que physiques. Le but à peine dissimulé est bien attendu l’appât du gain.
Néanmoins toute la force ou tout l’intérêt de ce petit livre réside dans le fait que le discours critique et philosophique - oh, rassurez-vous ce positionnement n’est que suggéré, il n’y a à aucun moment du roman de longs discours rhétoriques - est porté par la voix de deux enfants de 4 et 10 ans environ. C’est leur mère, qui en pleine crise identitaire et spirituelle, s’en est remise corps et âme entre les mains du gourou de la secte. Alors du coup ces enfants abandonnés sont en souffrance et revivent tout en essayant de comprendre à leur niveau le processus d’aliénation subi par leur mère. En gros ils essayent par des jeux innocents… mais sadiques aussi d’extérioriser leurs souffrances et par là-même ils viennent questionner par l’emploi d’une symbolique simple et naïve les notions de vie et de mort et l’existence de Dieu. Cette mise en relief est d’une grande poésie : d’un côté vous avez la lutte d’un père désespéré tentant de sauver sa femme avec toute sa culpabilité qui l’accompagne et de l’autre vous avez ces enfants qui revivent en parallèle les souffrances d’une mère absente.
Cette idée est d’une grande richesse car elle permet de faire passer des notions complexes et délicates avec naturel et simplicité.
Je crois que c’est là toute la force de cet auteur : rendre palpable, rendre abordable, faire ressentir en quelques mots, en quelques images ce qu’un philosophe ou un érudit aurait expliqué en plusieurs centaines de pages.
Ici c’est simple, c'est direct, c'est beau !
Rien que pour ça, je crois que ce roman mérite d’être lu.

PS : En outre, je trouve la photo de 1ère de couverture très réussie. Tout y est suggéré... comme dans le roman.

Je viens de lire il y a peu un dossier consacré à la scientologie dans un hebdomadaire, ton avis illustre ma lecture, ça tombe à pique ! , ça me donne envie de le lire tiens

Bonjour Ansault, merci de cette critique.
J'ai beaucoup aimé "Le porteur de destins" et ton avis sur ce livre ci me donne envie de le rajouter dans ma LAL.

Déjà le titre me donne envie de lire le livre, ton avis aussi

ce livre doit etre tout a fait interessant je le note avec grand interet merci ansault

J'espère qu'il vous plaira...

Euh, bah... ... Merci à toi Francine.

Sinon c'est "Gilbert" Bordes le prénom de l'auteur et non "Gilles"...

Bonjour

Eh bien ! l'avis de Francine me donne encore plus envie de le lire et même de l'acheter ( je n'achète que très peu souvent de livres) mais le sujet dont il est question dans ce livre m'intéresse +++
Donc merci à vous deux !
Comme dit Francine, ce forum est une perle
Finalement les lectures communes permettent d'aller à la rencontre d'un auteur, c'est très "instructif" et très agréable.

Gilbert Bordes est un auteur que j'ai découvert il y a qulques temps déja et que j'adore.
J'ai déja lu plusieurs livres de lui mais je ne connais pas celui-ci, je l'ajoute dans ma LAL

Le sujet a tout pour me plaire a priori. Il évoque de façon romancée un débat qui prend de l' ampleur de nos jours, à savoir comment respecter deux principes contradictoires. C' est à la fois la nécessité absolue de respecter la liberté de conscience, la faculté pour chacun de choisir ses options de vie, selon ses valeurs et croyances; c' est également l' obligation de la société, plus globalement de l' Etat, d' assurer l' ordre public, de garantir la sécurité et la liberté de ses citoyens face à des organisations mafieuses, qui n' hésitent pas à dépouiller ses victimes de toute capacité de réfléxion. Où s' arrête donc la liberté de chacun? Qu' est-ce qui justifie l' ingérence de l' Etat dans ces milieux quand bien souvent les adhérents rentrent par la grande porte, de leur plein gré ? Ce sont là quelques questions intéressantes dans notre monde actuel! Car il est à noter qu' en période de crises comme actuellement, beaucoup de personnes s' accrochent à un dernier espoir, et ce sont souvent ces vendeurs d' illusions qui sont là pour les assister, les réconforter pour mieux les enrôler...

J' ai apprécié l' écriture de Gilbert Bordes que je découvre pour la première fois, je n' y est pas rencontré de surprises, biensûr c' est l' image que l' on se fait plus ou moins des sectes.
Mais alors, je me suis demandé comment tombe-t-on là dedans? Celà me paraît impossible, peut- être suis-je trop froide ou insensible, mais je ne conçois pas que parce qu' on se pose des questions sur notre place, notre rôle sur Terre, on va s' enfermer avec des inconnus pour chercher un réconfort spirituel. En certains points cette quête s' apparente à la religion finalement. D' ailleurs un passage fait cette comparaison p. 80 :

" - Quelles est la différence entre une secte et une religion?
[...]
- Voyons ! Une secte, c ' est une entreprise crapulaire, destinée à gouverner des esprits faibles pour les dépouiller. Elle enferme, prive ses membres de liberté, les assujettit, en fait des esclaves, alors qu' une religion libère l' homme...
-Si c' était aussi simple..."

Il faut certainement être dans un état d' esprit particulier pour se laisser aveugler de la sorte... et c' est certain que je n' ai pas à juger des êtres qui sont dans un mal-être aussi profond. Mais c' est très inquiétant tout de même.

J' aurai peut- être apprécié que la psychologie des personnages soit plus développée, mais je peux dire que j' ai apprécié cette lecture pour son sujet et l' écriture qui est agréable.

Je poursuivrai ma découverte de G.Bordes par Le voleur de bonbons.