[Delisle, Michael] Dée

Le Reo vert s'arrête devant la maison des Provost. Doc pose sa botte dans la frange et, la main sur la hanche, il considère la petite avec un demi-sourire amusé, regarde ses cuisses blanches au soleil, découvertes par sa robe relevée.
-Je me fais griller, Doc. Je vas venir noire noire!
-Viens me donner mon bec!
    Enjambant les flaques de pluie, Dée se lance sur le vieil homme et pose la bouche sur sa joue piquante. Doc a une odeur forte de tabac, de sueur et de salaison. Il tapote les fesses de Dée pendant qu'elle lui enserre le cou et se plaint, en gloussant, qu'il pique.
-Est à qui la petite Dée?
-Est à toé, Doc.

Michael Delisle est poète, nouvelliste et romancier.  Son œuvre est portée par une écriture dont la précision ne cesse de s’aiguiser, et s’inscrit dans la lignée des grandes voix de la nord-américanité.  Son troisième roman, Dée, établit un parallèle saisissant entre le destin de la jeune fille et le statut des terres qui, dans les années 1950, passeront abruptement de la friche aux lotissements de banlieue, et de la misère à l’opulence, au prix de leur histoire.

Dans les années 1950 la vie n'était pas facile et les limites sociales étaient nombreuses, surtout pour les femmes.
À quinze ans, Dée tombe enceinte d'un jeune dont les parents sont riches.  Vite, on la marie et on lui achète une maison neuve dans un nouveau quartier en construction.  Un rêve!
Mais Dée est seule et abandonnée dans sa belle maison.  Sans instruction et originaire d'une famille difficile où les règles de vie sont inexistantes, sa maison devient sa cage fermée à l'espoir.
Abusée dans sa jeunesse par sa famille et un vieil ami de la famille, tout ce que Dée connaît et cherche à employer c'est une sexualité sans affection, soit un chemin vers les antidépresseurs.
Une histoire sordide comme il en existait tant dans la réalité.  Les femmes ont créé le féminisme qui pourrait leur permettre d'échapper à ce titre ronflant de «reine du foyer».
Ma cote: 5,5/10.