[Attia, Maurice] La blanche Caraïbe
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[Attia, Maurice] La blanche Caraïbe
La blanche Caraïbe
Auteur : Maurice Attia
Éditions : Jigal (Mai 2017)
Collection : Polar
ISBN : 978-2-37722-004-5
272 pages
Quatrième de couverture
En 76, Paco a renoncé à sa carrière de flic, il est devenu chroniqueur judiciaire et critique cinéma au journal Le Provençal. Irène, elle, poursuit avec succès son activité de modiste. C'est un coup de fil de son ex-coéquipier qui va bousculer cette vie tranquille. Un véritable appel au secours que Paco ne peut ignorer. En effet, huit ans auparavant, après leur avoir sauvé la vie, Khoupi avait dû fuir précipitamment aux Antilles avec sa compagne Eva…
Mon avis
Le récit se déroule en 1976, principalement, aux Antilles, en Guadeloupe. Tigran, dit Khoupi ,réfugié là-bas avec sa compagne, vient d’appeler son camarade Paco au secours. Ce dernier, resté en France, a une « dette » envers lui donc il laisse femme et enfant, et il s’envole pour aider son pote. Une fois sur place, il a des difficultés à reconnaître son ex-coéquipier. Rongé par l’alcool, celui-ci ne semble pas du tout en forme… en effet, Il a de gros ennuis, un homme a été assassiné et il pourrait être accusé (à tort) du meurtre de ce dernier. Il a besoin d’aide et Paco est là pour ça. Ecrit de cette façon, cela paraît très simple mais il n’en est rien ! L’intrigue va être soutenue, complexe, abordant différents thèmes.
L’ écriture est singulière. Plusieurs protagonistes emploient le « je » et il faut savoir qui parle. Par contre, donner la parole à diverses personnes de cette façon permet de multiplier les points de vue sur un même fait. Les approches ne sont pas les mêmes et les sentiments face à ce qui se déroule, totalement distincts. C’est assez surprenant parfois et réellement intéressant pour mieux cerner la personnalité de chacun.
L’auteur nous entraîne dans une histoire sombre, dure, sur une île bouleversée, loin de la France. Il s’attache, entre autres, à nous montrer les différences entre ces deux lieux de vie : la police, les médecins légistes, les habitants ne réagissent pas de la même façon en métropole et sur place. On se rend compte que l’approche d’un même événement n’est pas la même sur le continent qu’aux Antilles….et cela déstabilise Paco de temps à autre. Le contexte politique de l’époque est bien présent et apporte une toile de fond intéressante. On sent également le poids du passé avec les ethnies qui se côtoient plus ou moins facilement.
Maurice Attia nous offre un véritable puzzle, multipliant les entrées et les fausses pistes, introduisant de nouveaux individus qui remettent en cause nos convictions. Mensonges, trahisons, blanchiment d’argent, tout y passe. C’est savamment orchestré et il ne faut pas perdre le fil. Parfois, une note d’humour, notamment avec Haroun Tazieff en bel homme un peu hâbleur….
Cette histoire m’a beaucoup intéressée. Elle démontre une fois encore, la fragilité de chacun, les difficultés des relations humaines en famille, entre amis, ou encore au travail. Les deux camarades ne sont pas des supermen, ils sont parfois maladroits, sur la tangente, ne sachant plus où mettre leurs priorités , agissant trop vite, à l’instinct et se retrouvant dans des situations difficiles à maîtriser.
J’ai trouvé le ton sobre et juste, pas de fioritures, les faits, le ressenti de certains et on avance.
Globalement, c’est assez triste. Lorsqu’on pense aux îles, souvent, on imagine les plages, le soleil, le repos, le farniente, l’ aspect paradisiaque… Dans ce roman, l’auteur présente l’envers du décor : la pauvreté, les tensions parmi la population, les magouilles locales ou extérieures, la lutte des classes, les trafics de drogue, les tricheries pour l’immobilier et la vie là-bas en 1976 … Ce n’est pas attirant, c’est même un tantinet désespérant…..et on se demande ce qu’il est en maintenant….
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Cassiopée- Admin
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Re: [Attia, Maurice] La blanche Caraïbe
Mon avis :
Je suis très heureuse d'avoir mis la main sur le quatrième et dernier tome des aventures de Paco, le policier rencontré dans Alger la Noire. Il est en effet pour moi intéressant de suivre la trajectoire de cet enquêteur, qui aurait pu rester simplement le policier qui a quitté l'Algérie et qui a continué sa vie à Marseille. Il n'en est rien. Nous le retrouvons huit ans après Paris Blues (oui, je sais, je ne l'ai pas chroniqué) et il a donné à sa vie une orientation très différente. Lessivé, une fois de plus, par sa dernière affaire à Paris, il était parti rejoindre Irène, la femme de sa vie, dans le Sud : ils sont mariés, leur fille Bérénice a six ans, et il est journaliste pour le Provençal. En bref, il est payé pour assouvir l'une de ses passions, voir des films. Ce qui m'a fait plaisir aussi est qu'il est toujours ami avec madame Choukroun, la veuve de son co-équipier, assassiné dans Alger noire. J'ai lu trop d'enquêtes dans lesquels des personnages passaient à la trappe.
Et justement... Huit ans après Pointe rouge c'est son autre co-équipier, Tigran, qui lui donne de ses nouvelles. Ce que lui, Paco et Irène ont vécu est encore vif, on ne se remet pas comme ça de ces événements, qui avaient forcé Tigran a prendre la fuite avec sa compagne Eva. Aujourd'hui, il appelle Paco au secours, Paco à qui il avait sauvé la vie à l'époque, et bien sûr, Paco ne serait pas Paco s'il ne venait immédiatement, Irène renonçant à le raisonner puisque c'est Tigran qui l'appelle.
Son arrivée en Guadeloupe est un choc pour lui - longue arrivée, dans laquelle le retard inhérent aux transports vers les Caraïbes est matérialisé par la remémoration des événements par Tigran, tous ceux qui l'ont conduit à demander de l'aide. Choc, oui, parce que si Paco a vieilli, Tigran lui s'est métamorphosé sous le coup des déceptions amoureuse, de l'alcool et des événements qui lui avaient fait quitter la France. Ce ne sont pas des Antilles de rêves que découvre Paco, c'est quasiment une zone de non droit. J'exagère à peine en employant ce terme. D'ailleurs, puisqu'il lui faut un prétexte pour se trouver ici, l'ancien policier affirme écrire un livre sur l'esclavage, ce qui nous permet de découvrir des extraits du Code noir et de mesurer ce que l'on nommait "droit" à une époque.
Paco et Tigran ne voient pas les tenants et les aboutissants de l'affaire qui les occupe de la même manière, l'un, parce qu'il a un regard neuf, qu'il voit les changements que Paco n'a pas vu, perçoit mieux le décalage de certaines attitudes, l'autre connaît les acteurs de cette comédie sanglante, parce qu'il les côtoie, vit avec eux, travaille pour eux depuis bientôt huit ans. Ce sont leurs deux voix qui alternent un temps pour nous narrer cette histoire, avant d'être rejoint par Eva, déterminée elle aussi à faire toute la lumière, avec ou sans l'aide de Paco. Un nouvel événement l'impliquera encore davantage dans cette recherche de la vérité. Ou, pour être plus juste, charge encore plus le sentiment d'urgence. Pour lui, les Caraïbes n'ont quasiment rien à envier à Marseille, et il ne parle pas du climat, mais des magouilles, des trafics, des compromissions. Ici, en Guadeloupe, les communautés ne se mélangent pas, ou si peu : il est des choses qui ne comptent pas. Il est des rancœurs tenaces, qu'il ne faut surtout pas faire mine de négliger. Peut-on encore douter que certains soient prêts à tout, vraiment à tout, pour parvenir à leurs fins ? Non.
La conclusion de cette saga est-elle amère ? Non, elle est réaliste, crédible et l'épilogue , si elle peut surprendre, conforte cette impression.
Je suis très heureuse d'avoir mis la main sur le quatrième et dernier tome des aventures de Paco, le policier rencontré dans Alger la Noire. Il est en effet pour moi intéressant de suivre la trajectoire de cet enquêteur, qui aurait pu rester simplement le policier qui a quitté l'Algérie et qui a continué sa vie à Marseille. Il n'en est rien. Nous le retrouvons huit ans après Paris Blues (oui, je sais, je ne l'ai pas chroniqué) et il a donné à sa vie une orientation très différente. Lessivé, une fois de plus, par sa dernière affaire à Paris, il était parti rejoindre Irène, la femme de sa vie, dans le Sud : ils sont mariés, leur fille Bérénice a six ans, et il est journaliste pour le Provençal. En bref, il est payé pour assouvir l'une de ses passions, voir des films. Ce qui m'a fait plaisir aussi est qu'il est toujours ami avec madame Choukroun, la veuve de son co-équipier, assassiné dans Alger noire. J'ai lu trop d'enquêtes dans lesquels des personnages passaient à la trappe.
Et justement... Huit ans après Pointe rouge c'est son autre co-équipier, Tigran, qui lui donne de ses nouvelles. Ce que lui, Paco et Irène ont vécu est encore vif, on ne se remet pas comme ça de ces événements, qui avaient forcé Tigran a prendre la fuite avec sa compagne Eva. Aujourd'hui, il appelle Paco au secours, Paco à qui il avait sauvé la vie à l'époque, et bien sûr, Paco ne serait pas Paco s'il ne venait immédiatement, Irène renonçant à le raisonner puisque c'est Tigran qui l'appelle.
Son arrivée en Guadeloupe est un choc pour lui - longue arrivée, dans laquelle le retard inhérent aux transports vers les Caraïbes est matérialisé par la remémoration des événements par Tigran, tous ceux qui l'ont conduit à demander de l'aide. Choc, oui, parce que si Paco a vieilli, Tigran lui s'est métamorphosé sous le coup des déceptions amoureuse, de l'alcool et des événements qui lui avaient fait quitter la France. Ce ne sont pas des Antilles de rêves que découvre Paco, c'est quasiment une zone de non droit. J'exagère à peine en employant ce terme. D'ailleurs, puisqu'il lui faut un prétexte pour se trouver ici, l'ancien policier affirme écrire un livre sur l'esclavage, ce qui nous permet de découvrir des extraits du Code noir et de mesurer ce que l'on nommait "droit" à une époque.
Paco et Tigran ne voient pas les tenants et les aboutissants de l'affaire qui les occupe de la même manière, l'un, parce qu'il a un regard neuf, qu'il voit les changements que Paco n'a pas vu, perçoit mieux le décalage de certaines attitudes, l'autre connaît les acteurs de cette comédie sanglante, parce qu'il les côtoie, vit avec eux, travaille pour eux depuis bientôt huit ans. Ce sont leurs deux voix qui alternent un temps pour nous narrer cette histoire, avant d'être rejoint par Eva, déterminée elle aussi à faire toute la lumière, avec ou sans l'aide de Paco. Un nouvel événement l'impliquera encore davantage dans cette recherche de la vérité. Ou, pour être plus juste, charge encore plus le sentiment d'urgence. Pour lui, les Caraïbes n'ont quasiment rien à envier à Marseille, et il ne parle pas du climat, mais des magouilles, des trafics, des compromissions. Ici, en Guadeloupe, les communautés ne se mélangent pas, ou si peu : il est des choses qui ne comptent pas. Il est des rancœurs tenaces, qu'il ne faut surtout pas faire mine de négliger. Peut-on encore douter que certains soient prêts à tout, vraiment à tout, pour parvenir à leurs fins ? Non.
La conclusion de cette saga est-elle amère ? Non, elle est réaliste, crédible et l'épilogue , si elle peut surprendre, conforte cette impression.
Sharon- Modérateur
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