[Balzac, Honoré (de)] Code des gens honnêtes ou l'Art de ne pas être dupe des fripons
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[Balzac, Honoré (de)] Code des gens honnêtes ou l'Art de ne pas être dupe des fripons
Code des gens honnêtes ou l'Art de ne pas être dupe des fripons
Honoré de Balzac
Essai, aphorismes
181 pages
Bibebook (livres en ligne)
Honoré de Balzac
Essai, aphorismes
181 pages
Bibebook (livres en ligne)
Résumé (Babelio) :
Ce document, écrit par Balzac à un moment où il avait du mal à vendre ses romans, se présente comme un mode d'emploi contre le vol et la tromperie. Il est indéniable qu'il s'agit d'un livre de circonstance, dans un genre à la mode à ce moment là.
Mon avis :
J'ai apprécié ce court essai écrit par le jeune Honoré de Balzac, avant qu'il ne commence la Comédie humaine, en 1825. L'auteur nous présente les différentes carrières du vol, commençant par les vrais voleurs, par effraction, ou pickpockets de toutes sortes, pour aller crescendo dans ses chapitres, vers le vol de haute catégorie : on y trouvera aussi bien les métiers de la justice que les agents de change, et enfin le vol d'Etat, à savoir les maisons de jeu et la loterie. Les chapitres sont constitués de courts aphorismes, en paragraphes séparés, nous donnant des exemples de faits divers ou personnages importants de l'époque (ou du siècle précédent) - on y croisera Vidocq, par exemple, le bagnard passé de l'autre côté de la Loi... Il nous donne à voir également des exemples de vols perpétrés sous les meilleures apparences de l'honnêteté, dans le grand monde, parfois même sous le nez des rois. Ce sont toujours comme des portraits, ou des situations, qui me rappellent un peu les Caractères de La Bruyère.
Le ton est résolument ironique : Balzac y adopte le point de vue d'un jeune homme en butte au risque de se faire détrousser de ses biens (ou du peu de biens qu'il ait), y compris par des gens apparemment de toute confiance. Moralité : en matière d'argent, on n'est jamais trop prudent, et il joue le jeu de donner de vrais conseils, la plupart du temps tout de même celui de s'abstenir d'essayer les remèdes miracles tant vantés. L'idée maîtresse qui en ressort est que les plus voleurs sont ceux qui ont le système avec eux, plus que les artistes de la cambriole ou de la débrouille. On ne peut, souvent, s'empêcher de faire le parallèle avec notre époque, comme les paragraphes sur la loterie, qui font penser à la Française des Jeux.
Balzac se fait volontiers moraliste, y compris dans ses romans, il est clair qu'il n'aime pas ce qu'est devenu la société "tout-argent" de son époque. Certains propos peuvent paraître connus, rebattus, comme "les fortunes se font et se défont", "on ne gagne jamais au jeu", mais l'ensemble passe encore bien dans la modernité, et ces maximes pourraient, un peu transformées, s'appliquer à la société d'aujourd'hui. En revanche, d'autres exemples découlent soit de la culture classique (grecque et romaine) de Balzac, et j'ai dû prendre le dictionnaire, soit de références devenues totalement obscures (et non trouvables sur internet). Je ne dirais pas que cela m'a vraiment gênée, car plusieurs fois j'ai souri, ri, ou je me suis franchement esclaffée, d'autre fois j'ai médité ses réflexions. C'est une lecture agréable et plutôt facile, peut-être même surprenante.
Citations :
Or, chacun cherche en soi-même un moyen de faire une fortune brillante et rapide, parce que chacun sait qu'une fois acquise, personne ne s'en plaindra ; or, ce moyen, c'est le vol, et le vol est commun. (Page 12)
Et le vrai talent est de cacher le vol sous une apparence de légalité : on a horreur de prendre le bien des autres, il faut qu'il vienne de lui-même, voilà la grande finesse. (Page 12)
Par le système actuel du mouvement des fonds et la législation des hypothèques, on n’a plus guère d’argent chez soi, comme cela se pratiquait jadis, et les vols par effraction deviennent rares. (Page 72)
Dites simplement que ce jour-là vous allez à la campagne.
Il n’y a pas de propriété foncière qui puisse rapporter plus que cette campagne que vous n’avez pas. (Page 107)
En général gardez le plus longtemps possible vos pièces d’or et de cinq francs sans les changer. L’expérience a dicté ce précepte. En effet, remarquez qu’une pièce de cent sous est encore respectable ; on regarde à deux fois avant de l’entamer : c’est un morceau de résistance. La monnaie coule, elle s’échappe insensiblement d’entre les doigts. (Page 110)
En général, tout ce qui porte le nom d’économique est une invention coûteuse ou impraticable. (Page 110)
En ce qui concerne les enterrements, les réflexions sont bien plus abondantes, il faut une présence d’esprit continuelle.
Si vous êtes réellement affligé en votre qualité d’héritier, chargez du soin du convoi et du service, quelque collatéral déshérité : il verra les choses plus sainement. (Page 130)
À ceci il n’y a d’autre remède que celui-ci : l’homme assez malheureux pour avoir une grande fortune doit se soumettre à une étude très profonde des lois, des actes, etc. ; il doit connaître la procédure, faire son droit, être en état de rédiger un acte, de dresser un bordereau, de régler une succession, un partage : tels sont les charges et les ennuis de la fortune : aussi n’est-il pas étonnant que tant de gens préfèrent la pauvreté. (Page 143)
Le jour où tout le monde sera bien convaincu que l’argent mis à la loterie est perdu sans retour, que les sept millions que le gouvernement retire de la loterie sont un bénéfice honteux, le fruit du vol ; le jour enfin où personne ne mettra plus à la loterie, l’autorité qui respecte la morale publique quand son intérêt ne lui conseille pas de la violer, supprimera les loteries qui lui seront devenues onéreuses. (Page 177)
Autour d’une longue table on voit une foule d’êtres à la mine hâve, décharnée, semblables aux ombres du Dante, le cou tendu, la figure inquiète, les yeux fixés sur un tapis, des numéros, des cartes auxquels ils confient leur fortune. L’argent que l’on jette sur cette table fatale perd en y tombant le dixième de sa valeur ; les chances sont combinées de telle sorte que le fermier des jeux doit toujours gagner. [sur les maisons de jeux, casinos]
(Page 178)
Et que l’on se persuade bien que jamais personne n’a gagné dans ces infâmes maisons ; si la fortune sourit un instant au joueur, bientôt elle lui devient contraire, et toujours la plus funeste des passions entraîne la ruine complète de celui qui en est possédé. (Page 179)
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