[Denon, Vivant] Point de lendemain
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[Denon, Vivant] Point de lendemain
Point de lendemain
Vivant Denon
1777 et 1812
24 pages
ISBN : 978-2-8247-1343-4
Vivant Denon
1777 et 1812
24 pages
ISBN : 978-2-8247-1343-4
Présentation de l'éditeur :
Point de lendemain est un court roman emblématique de la littérature rococo. Ecrit par Dominique Vivant, baron Denon, dit Vivant Denon ou Dominique Vivant Denon, né à Chalon-sur-Saône le 4 janvier 1747 et mort à Paris le 27 avril 1825, qui est un graveur, écrivain, diplomate et administrateur français. Extrait : Il en est des baisers comme des confidences : ils s'attirent, ils s'accélèrent, ils s'échauffent les uns par les autres. En effet, le premier ne fut pas plus tôt donné qu'un second le suivit ; puis, un autre : ils se pressaient, ils entrecoupaient la conversation, ils la remplaçaient ; à peine enfin laissaient-ils aux soupirs la liberté de s'échapper. Le silence survint ; on l'entendit (car on entend quelquefois le silence) : il effraya. Nous nous levâmes sans mot dire, et recommençâmes à marcher. « Il faut rentrer, dit-elle, l'air du soir ne nous vaut rien.
Mon avis :
J'ai apprécié cette nouvelle (je n'irais pas jusqu'à qualifier de roman un texte de moins de 20 pages), écrite d'abord de manière anonyme par le diplomate Dominique Vivant Denon, puis remanié en 1812. C'est un texte répertorié également dans le genre libertin, non que les scènes soient des plus torrides, mais il est question d'une nuit d'amour prolongée en plusieurs étapes, et de jeux de rôle et manipulations à n'en plus finir.
Le jeune homme héros de cette nouvelle, et également narrateur, est l'amant de la Comtesse de ***, mais il va lui être emprunté pour une nuit par l'amie de la Comtesse, la Marquise de T., laquelle a besoin de lui pour jouer un rôle spécifique. En effet, elle se rend à la campagne, où elle doit se réconcilier avec son mari (qu'elle n'a pas vu depuis 8 ans, mais à qui elle est lié par des intérêts financiers). Ni une ni deux, le départ s'organise et elle l'enlève : le voyage en carrosse laisse augurer des distractions intéressantes, et l'espoir vient au jeune homme.
Une fois que celui-ci a joué son rôle de diversion auprès du Marquis, il est invité à découvrir le parc de la propriété sous le clair de lune, et se promène bras dessus bras dessous, avec sa belle hôtesse, badinant et parlant de la Comtesse, qui, quoique absente, n'a jamais été aussi présente que pour les réunir - on remarquera au passage la façon dont une amie parle "en bien" d'une femme à l'amant de celle-ci qu'elle convoite ! Les mystères de la nuit et la beauté de la nature font en sorte de les rapprocher dans plusieurs lieux, empreints de raffinement : d'abord un banc de gazon face à la rivière, puis un pavillon de jardin, opportunément ouvert alors qu'on le croyait fermé (oh, ça alors...!). La nuit passe vite mais le jeune homme n'en a pas assez, et obtient que la belle marquise lui offre encore ses faveurs, au retour dans la demeure conjugale, dans le cabinet conçu par son mari (à mots couverts pour pallier son impuissance par les effets de la décoration). Le lieu est assez sidérant : l'entrée en est secrète, il est recouvert de miroirs qui dupliquent à l'infini les moments érotiques, et aménagé comme un temple de l'Amour, avec même une grotte pavée de coussins., et un autel du dieu que l'on se doit d'honorer.
C'est ainsi qu'au matin, le jeune homme tombe nez à nez cette fois avec l'amant de Mme de T., venu comme par hasard, et il doit jouer auprès de celui-ci son rôle de jeune homme naïf qui n'a pu en rien profiter de la situation ; il est pour l'heure congédié et renvoyé à sa Comtesse. Elle n'est d'ailleurs toujours pas apparue, mais on peut deviner qu'elle profitera hors champ des nouvelles expériences de son amant.
Ce récit libertin est vraiment joliment écrit, dresse des scènes charmantes, de superbes descriptions, dans un style presque impressionniste, tout d'impressions, de sensations, vif et emporté. L'écriture traduit bien les émotions du jeune homme, qui n'en croit pas sa bonne fortune, et sa bonne santé physique. Le texte en dit toutefois beaucoup plus qu'il ne paraît, de par ses non-dits, et nous sommes un peu voyeurs, "initiés" au discret libertinage tout de jeux de pouvoir (dans lesquels les femmes ne tiennent pas la dernière place), de la bonne société aristocratique du XVIIIème siècle. J'ai découvert avec intérêt ce texte, qui m'a été conseillé il y a quelque temps par Mme Sculfort, du site "Passion Lettres". J'ai pu consulter les deux versions du texte : la seconde est moins explicite, plus passionnée - c'est celle que j'ai lue sans le savoir, car l'éditeur (Bibebook en ce qui me concerne) annonçait la version de 1777.
Citations :
Je parcours des salons décorés avec autant de goût que de magnificence, car le maître de la maison raffinait sur toutes les recherches de luxe. Il s’étudiait à ranimer les ressources d’un physique éteint par des images de volupté. (Page 3)
La nuit était superbe ; elle laissait entrevoir les objets, et semblait ne les voiler que pour donner plus d’essor à l’imagination. Le château ainsi que les jardins, appuyés contre une montagne, descendaient en terrasse jusque sur les rives de la Seine ; et ses sinuosités multipliées formaient de petites îles agrestes et pittoresques, qui variaient les tableaux et augmentaient le charme de ce beau lieu. (Page 4)
- Et vos serments, me répondit-elle en se levant.
- J’étais un mortel quand je les fis, vous m’avez fait un dieu : vous adorer, voilà mon seul serment.
- Venez, me dit-elle, l’ombre du mystère doit cacher ma faiblesse, venez... »
En même temps elle s’approcha de la grotte. (Page 13)
- Cela, mon cher, a donc été bien plaisant ? Conte-moi les détails... conte donc.
- Ah !... Un moment. Je ne savais pas que tout ceci était une comédie ; et, bien que je sois pour quelque chose dans la pièce...
- Tu n’avais pas le beau rôle.
- Va, va, rassure-toi, il n’y a point de mauvais rôle pour de bons acteurs. (Page 15)
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