[Gaudy, Hélène] Archipels
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[Gaudy, Hélène] Archipels
Archipels
Auteur : Hélène Gaudy
Éditions : de l’Olivier (19 Août 2024)
ISBN : 9782823621150
290 pages
Quatrième de couverture
« Aux confins de la Louisiane, une île porte le prénom de mon père.
Chaque jour, elle s’enfonce un peu plus sous les eaux. »
Il a fallu que son esprit vogue jusqu’à l’Isle de Jean-Charles pour qu’elle se retrouve enfin face à son père. Qui est cet homme à la présence tranquille, à la parole rare, qui se dit sans mémoire ? Pour le découvrir elle se lance dans un projet singulier : lui rendre ses souvenirs, les faire resurgir des objets et des paysages.
Mon avis
« Il ne dit pas grand-chose mais il sait dire : Regarde. »
C’est avec une plume délicate et tendre, voire poétique qu’Hélène Gaudy évoque son père, sa mère et ceux qui ont vécu avant eux. En voulant mieux connaître son papa, elle a, par ricochet, porté son attention sur d’autres membres de la famille, dénouant quelques secrets, s’imprégnant d’éléments mal connus du passé.
Quand ceux que nous avons aimés nous quittent ou commencent à perdre pied, on ressent souvent le besoin de retrouver nos racines, de les « consolider » en comprenant tout ce qui a « construit » le noyau familial.
Alors, nous accompagnons cette femme dans sa quête. Des poèmes (limpides où chaque mot a sa juste place mais dont le cœur reste insaisissable), des carnets (lui faire lire les mots écrits et voir s’ils changent de couleur au contact de sa mémoire), des collections, des photographies, des souvenirs de vacances, de paysages, de moments particuliers ou pas, des conversations …. Tout ceci est entassé, exploré, dans le désordre, ce qui fait que sa pensée va et vient, se répète parfois. Elle cherche, fait des hypothèses ou des déductions, revient à un premier ressenti, en partage un autre. On est vraiment au cœur de son esprit, absorbant chaque émotion pour qu’elle résonne ou pas en nous.
Parfois, elle s’arrête, elle hésite….
« Je n’ai pas réussi à lire toutes leurs lettres. L’écriture, l’attention, avaient dénoué l’écheveau, rapproché ce qui pouvait l’être, mais là, c’est comme s’il retournait à sa place, réintégrait son rôle. »
Finalement, est-on obligé de tout savoir ? Ceux qui nous ont précédés n’ont-ils pas droit à une part de mystère, de silence ? Hélène Gaudy nous rappelle que le processus de mémoire n’est pas le même pour tous, que décide-t-on de garder gravé en nous ? En choisissant de lancer ces investigations, elle va à la rencontre des siens mais également d’elle-même.
On adhère ou pas à ce style de livre car le contenu relève de l’intime. En ce qui me concerne, j’ai été conquise par le phrasé.
L’écriture de l’auteur tisse les mots comme une dentelle, c’est léger, fin, agréable à lire.
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Cassiopée- Admin
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Re: [Gaudy, Hélène] Archipels
C’est le hasard qui est à l’origine du déclic. Lorsqu’elle apprend qu’une île dénommée Jean Charles comme son père vieillissant est menacée de disparition par la montée des eaux en Louisiane, l’auteur réalise qu’il ne sera bientôt plus temps, si elle ne se hâte, de percer les mystères de cette terre inconnue qu’est toujours resté ce père, un homme syllogomane sans passé ni souvenirs, dont le déroutant héritage semble tout entier tenir dans son atelier d’artiste et sa sidérante accumulation d’objets, autant de vestiges de la vie des autres dont il faisait son matériau artistique mais qui posent la question de quel vide ils ont comblé et de ce qui se cache sous cette face émergée de l’iceberg.
Alors, avec le sentiment qu’il ne sera « pas plus facile de décrire [s]on propre père que [l]es explorateurs suédois du XIXe siècle », disparus au pôle Nord, à qui elle a consacré son livre Un monde sans rivage, elle entreprend une enquête intime, toute de patience et de délicatesse, s’efforçant de « recueillir [ce] que, peut-être, il finira par dire » et espérant « le faire émerger à l’aide de ces petites brosses qu’utilisent les archéologues, pour ne pas l’abîmer. » Ce père qui n’a pour parler de lui que les objets qu’il a entassés, aussi illisibles aux yeux des siens que le contenu d’une « capsule temporelle » qu’il leur aurait léguée « avant même que le temps soit passé », sait-il seulement sonder lui-même les profondeurs secrètes de l’oubli qui lui tient lieu de refuge ? Ou ne restera-t-il irrémédiablement à sa fille que l’archipel de signes affleurant à la surface ?
Rares sont les livres à vous éblouir comme ici à chaque ligne, la finesse d’observation et d’analyse n’ayant d’égale que la magnificence de l’écriture. Que d’amour et d’intelligence dans ce texte bouleversant de retenue, et quelle splendeur que cette plume capable d’emmener l’admiration du lecteur de sommet en sommet de la première à la dernière page. Pendant que l’insondabilité de l’énigme paternelle et la conscience du peu de temps qui reste ne rendent que plus bouleversants les efforts éperdus et bientôt résignés de la fille et du père pour se rejoindre, Hélène Gaudy transcende les mots pour en faire sans le dire l’étoffe-même d’une affection filiale aussi irréductible que pudique, tout en multipliant les réflexions toutes plus justes et plus belles les unes que les autres sur la filiation, le passage de la vie et l’écriture.
Dans la première sélection du Goncourt, ce livre exceptionnel a toutes les chances de faire partie des favoris, si ce n’est de devenir LE favori. Au-delà du coup de coeur. (6/5)
Alors, avec le sentiment qu’il ne sera « pas plus facile de décrire [s]on propre père que [l]es explorateurs suédois du XIXe siècle », disparus au pôle Nord, à qui elle a consacré son livre Un monde sans rivage, elle entreprend une enquête intime, toute de patience et de délicatesse, s’efforçant de « recueillir [ce] que, peut-être, il finira par dire » et espérant « le faire émerger à l’aide de ces petites brosses qu’utilisent les archéologues, pour ne pas l’abîmer. » Ce père qui n’a pour parler de lui que les objets qu’il a entassés, aussi illisibles aux yeux des siens que le contenu d’une « capsule temporelle » qu’il leur aurait léguée « avant même que le temps soit passé », sait-il seulement sonder lui-même les profondeurs secrètes de l’oubli qui lui tient lieu de refuge ? Ou ne restera-t-il irrémédiablement à sa fille que l’archipel de signes affleurant à la surface ?
Rares sont les livres à vous éblouir comme ici à chaque ligne, la finesse d’observation et d’analyse n’ayant d’égale que la magnificence de l’écriture. Que d’amour et d’intelligence dans ce texte bouleversant de retenue, et quelle splendeur que cette plume capable d’emmener l’admiration du lecteur de sommet en sommet de la première à la dernière page. Pendant que l’insondabilité de l’énigme paternelle et la conscience du peu de temps qui reste ne rendent que plus bouleversants les efforts éperdus et bientôt résignés de la fille et du père pour se rejoindre, Hélène Gaudy transcende les mots pour en faire sans le dire l’étoffe-même d’une affection filiale aussi irréductible que pudique, tout en multipliant les réflexions toutes plus justes et plus belles les unes que les autres sur la filiation, le passage de la vie et l’écriture.
Dans la première sélection du Goncourt, ce livre exceptionnel a toutes les chances de faire partie des favoris, si ce n’est de devenir LE favori. Au-delà du coup de coeur. (6/5)
Re: [Gaudy, Hélène] Archipels
Cannetille a écrit: Dans la première sélection du Goncourt, ce livre exceptionnel a toutes les chances de faire partie des favoris, si ce n’est de devenir LE favori. Au-delà du coup de coeur. (6/5)
Ah oui, ça c'est un coup de cœur !
elea2020- Grand sage du forum
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Re: [Gaudy, Hélène] Archipels
De cette eau, je n'en ai qu'un ou deux par an maximum, sur un total de 170 livres. Là, c'est le premier de l'année
Re: [Gaudy, Hélène] Archipels
C'est noté. Merci les Filles! XX
Moulin-à-Vent- Grand sage du forum
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