[Kwon, Yeo-sun] Un éclair bleu azur

Titre : Un éclair bleu azur
Auteur : Kwon, Yeo-sun
éditeur : La croisée
Nombre de pages : 208 pages

Présentation de l’éditeur :

Roman d’apprentissage teinté de sensations étranges, Un éclair bleu azur met en scène Son Mi-ok, jeune fille au sein d’une famille coréenne entachée par la perte du travail du père. En grandissant, les relations de Son Mi-ok avec les siens, ses amis et son petit ami vont construire sa personnalité, tour à trouble trouble, inquiétante, et émouvante. Jeune femme à la voix frappante, Son Mi-ok raconte son rapport à son corps, sa sexualité, la nourriture et la littérature. Kwon Yeo-sun a fait de son personnage, à contre-pied des voix traditionnelles, le symbole explosif de la génération coréenne des années 1980 égarée dans les bouleversements du pays.
Lu dans le cadre de la lecture commune septembre/octobre 2024

Mon avis :

Ce livre est le premier roman écrit par la romancière Kwon Yeo-sun. Il serait en partie autobiographique, et je dois dire qu’il est assez étonnant, vu par mes yeux d’occidentale. Son Mi-ok est l’enfant chérie de sa famille, pour ne pas dire l’enfant porte-bonheur. Et pourtant… au moment où le roman commence, adulte, elle est sur le point de déménager, et repense au passé.

C’est un roman d’apprentissage, si je puis le qualifier ainsi. Nous voyons Mi-ok étudiante, participant aux mouvements de révolte et, comme ses camarades, le payant dans sa chair. La violence est omniprésente ici. Les punitions données aux enfants feraient hurler les services sociaux français. Je ne parle même pas de la violence psychologique subie au sein de la famille, à prendre au sens large du terme. Dans un roman graphique, j’avais appris que les frères et soeurs comptaient plus que les enfants. C’est un peu le cas ici : la mère de Mi-ok recueille ses deux soeurs dans le besoin, l’une parce que son mari est couvert de dettes et a pris la fuite, l’autre parce qu’elle est célibataire et dépendante d’autrui. Tout est scruté à la loupe, discuté, mesuré, épié. Pire qu’en occident, celui qui détient l’argent a le pouvoir, celui qui n’a plus d’argent n’est plus rien, et tant pis pour tout ce qu’il a fait dans le passé. Quand le père de Mi-ok perd son travail, il subit la déchéance immédiate dans son propre foyer. Il sombrera dans la déchéance, comme d’autres avant lui, et j’ai l’impression que tous l’ont surtout observé avec dégoût, sans rien faire pour l’aider, y compris lorsqu’au bout de huit ans, il a retrouvé un travail.

Deux autres points sont importants dans ce récit : la sexualité et la nourriture, l’une et l’autre semblant indissolublement lié. C’est son compagnon qui fait découvrir à Mi-ok de nouveaux plats, dont la saveur la subjugue. Comme si nous étions à une autre époque, manger de la viande peut être interprété de deux manières. Pour les uns, c’est accepter de se nourrir de la chair de quelqu’un d’autres, et c’est forcément source de maladie. Pour les autres, c’est signe de prospérité financière, c’est respecter, en servant de la viande bien que l’on n’aime pas ce plat, le goût des autres, et tant pis si l’absorbtion de toute cette graisse rend obèse – nourrir son enfant, quand on a dû le rationner pendant des années, est un plaisir.

En ce qui concerne la sexualité, l’héroïne se cherche, entre attirance pour les femmes, pour les hommes et asexualité. Soyons clair : l’homosexualité n’existe pas, juste un désir diffus à réprimer, et quand une jeune femme se suicide, il y a forcément un homme derrière tout cela.

Comme Lemon, un éclair bleu azur est une oeuvre dérangeante.

Merci pour cette critique, Sharon.
Cependant, tout comme pour "Lemon", je ne suis pas tentée.
Déchéance, sexualité, nourriture/obésité, ne sont pas ma tasse de thé

Je t'en prie Dulcie.
Ce fut un roman court mais très dur à lire et je ne m'attendais pas vraiment à ce que j'ai lu.
Contrairement à Lemon (les romans ont presque 25 ans d'écart concernant leur écriture), nous n'avons qu'un seul point de vue.