[Somoza, José Carlos] L'appât
5 participants
Partage lecture :: Nos critiques :: Littératures de l'Imaginaire :: Autres auteurs - Littératures de l'imaginaire
Page 1 sur 1
[Somoza, José Carlos] L'appât
[Somoza, José Carlos] L'appât
Titre : L'appât
Auteur : José Carlos Somoza
Éditeur : Actes Sud
Nombre de pages : 409
Date de parution : octobre 2011
Résumé :
Fini les détectives, les policiers, les médecins légistes. Place aux ordinateurs, aux profileurs, aux appâts et… à Shakespeare. L’élite du “dispositif ” est à la manœuvre pour traquer l’insaisissable “Spectateur” qui terrorise Madrid. Où Somoza atteint l’apogée de sa folie et de son art. Génie absolu qui a traversé les siècles ou acteur inculte, presque illettré, usurier, ivrogne ? L’aura de mystère qui entoure Shakespeare repose sur les doctrines occultes qui étayent son théâtre et pose la satisfaction du désir à l’épicentre de notre construction psychologique. Les services de police et de renseignements de Madrid l’ont bien compris, qui dans ce futur proche où la technologie de pointe n’est plus d’aucun recours dans la traque des assassins, consacrent de colossaux moyens financiers et humains à décrypter ces codes élisabéthains. Un centre de formation a été spécialement créé pour initier les agents aux techniques des “Masques” : déterminer à quelle source de plaisir réagit le suspect et le neutraliser par la mise en scène idoine qui lui procure une véritable overdose du seul plaisir auquel il ne peut résister. Ces agents s’appellent “les appâts” et parmi eux, Diana Blanco est le meilleur élément. Lorsqu’elle découvre que sa sœur, qui a choisi d’embrasser la même profession, vient d’être enlevée par le Spectateur, un dangereux psychopathe qui terrorise la ville, elle mène une lutte contre la montre qui la conduira directement jusqu’à l’antre du monstre. C’est du moins ce qu’elle croit. Subversif, inquiétant, inventif, subtil, J. C. Somoza est ici à l’apogée de son art.
Mon avis :
Il y a quelque temps, je disais que l'uchronie n'était pas mon style de lecture.Et pourtant, je viens d'en lire et surtout de l'apprécier au travers de ce roman de José Carlos Somoza. Il faut dire que cet écrivain est un maître en matière de fantastique romanesque.
Tout commence par la passion de l'auteur pour le théâtre de Shakespeare. Le roman est d'ailleurs divisé en actes et s'inspire de nombreuses pièces de l'auteur anglais. Chaque pièce inspire un comportement humain, un masque, un psynome.
Le début du roman est un peu ésotérique tant que l'on n'a pas intégré les différentes notions.
" D'après cette théorie (psynome), ce que nous sommes, pensons et faisons dépend exclusivement de notre désir, et nous exprimons ce désir à chaque fraction de seconde par les gestes, les mouvements des yeux, la voix..."
"Le psynome serait donc une sorte de code de notre désir."
" les sujets de la même philia réagissent de la même façon devant des stimulations semblables.On entraîne les appâts à identifier les philias."
" le monde ne serait qu'un théâtre."
" Il disait que Shakespeare avait décrit tous les psynomes dans ses œuvres."
Ainsi, à la suite des attentats du 9 Novembre en Europe, les chefs de la Psychologie criminelle ont eu l'idée de recruter des appâts et de les entraîner à la recherche de dangereux criminels.
Diana Blanco, l'une des meilleures appâts va se lancer sur la piste du Spectateur, un tueur en série de femmes et de l'Empoisonneur. Elle s'investit pleinement lorsqu'elle craint pour la vie de sa jeune sœur, appât débutant.
La construction est celle d'un roman policier avec du suspens, des rebondissements (peut-être un peu trop en fin de livre), une angoisse quelque fois insoutenable, des scènes macabres. Mais, bien au-delà de l'enquête, il y a l'analyse de comportements humains. Diana a connu un drame familial traumatisant qui définit sa conduite.
L'auteur est aussi psychiatre et il nous illustre ici, le pouvoir de l'esprit, le monde de la manipulation. Il nous fait réfléchir sur les pouvoirs de la science, l'exploitation d'êtres humains au service de la police ou de la Politique.
C'est un roman époustouflant qui pousse notre esprit vers les régions fantastiques du pouvoir humain.
Les références permanentes aux œuvres de Shakespeare m'ont donné une cruelle envie de lire les différentes pièces citées et de découvrir ces caractères humains. J'ai un peu honte d'avouer que je n'ai jamais lu Shakespeare.
J'avais déjà apprécié La clé de l'abîme et je continuerais à lire José Carlos Somoza pour son imagination fertile, sa maîtrise des intrigues et pour ses personnages ambigus et énigmatiques.
Invité- Invité
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
Encore un genre littéraire que je ne connais pas, mais je ne suis pas certaine d'avoir envie d'en lire.
Belle critique
Belle critique
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
Je dois dire que je suis très tentée par cette lecture, même si ce ne serait pas raisonnable au vu de ma PàL...
Merci pour cette critique
Merci pour cette critique
Invité- Invité
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
J'avais râté ce sujet, c'est le genre que j'apprécie, merci pour cette présentation, je me note le nom de l'auteur .
Sara2a- Grand sage du forum
-
Nombre de messages : 3030
Age : 54
Localisation : Porto-Vecchio
Genre littéraire préféré : Thrillers, fantastiques et un peu de tout ce qui peut me tomber sous les yeux .
Date d'inscription : 24/01/2010
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
cet auteur écrit toujours des histoires fortes à tiroirs, et il utilise les différentes méandres de notre esprit et âme pour mieux nous perdre....
Pinky- Grand sage du forum
-
Nombre de messages : 8672
Age : 61
Localisation : Les Sables d'Olonne (85)
Emploi/loisirs : Educatrice spécialisée, peinture, dessin, bricolage, ballade, baignade, tricot, couture
Genre littéraire préféré : Je lis de tout en littérature mais j'ai beaucoup de mal avec les policiers... j'en lis 1 ou 2 dans l
Date d'inscription : 04/06/2008
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
c'est un psy...
Pistou 117- Grand sage du forum
-
Nombre de messages : 4087
Age : 60
Localisation : LILLE
Genre littéraire préféré : De tout, partout...
Date d'inscription : 09/06/2010
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
tout à fait Pistou, psychiatre de son métier ...
Pinky- Grand sage du forum
-
Nombre de messages : 8672
Age : 61
Localisation : Les Sables d'Olonne (85)
Emploi/loisirs : Educatrice spécialisée, peinture, dessin, bricolage, ballade, baignade, tricot, couture
Genre littéraire préféré : Je lis de tout en littérature mais j'ai beaucoup de mal avec les policiers... j'en lis 1 ou 2 dans l
Date d'inscription : 04/06/2008
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
Seul un psy peut écrire des trucs pareils. Mais ça me touche, terrible. Celui-ci sera peut-être mon second Somoza.
Pistou 117- Grand sage du forum
-
Nombre de messages : 4087
Age : 60
Localisation : LILLE
Genre littéraire préféré : De tout, partout...
Date d'inscription : 09/06/2010
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
Mon avis :
Un excellent, excellent, excellent livre d’uchronie (ou d’anticipation, je n’ai pas encore tout à fait réussi à trancher).
On appréciera d’abord le trait de génie d’avoir fait évoluer non pas les sciences dites dures - à coups de voiture volante, de voyage dans le temps ou de téléportation - mais bien les sciences comportementales. C’est à la fois brillant, surprenant, et traité de manière réaliste. Bien sûr, et c’est probablement ce qui a empêché ce livre d’être un vrai coup de cœur immédiat et absolu, c’est également très déroutant d’imaginer un monde où les ordinateurs quantiques ont permis de décrypter les clefs les plus secrètes de notre comportement, nous réduisant à des enchaînements de stimuli-réactions manipulables à volonté via ces masques inspirés des oeuvres de Shakespeare - rien de que ça...
Les personnages, douloureusement humains, évoluent dans cette intrigue improbable, d’acte en acte, de scène en scène, tour à tour spectateurs et acteurs, victimes et bourreaux, selon un rythme brisé qui sait jouer avec les nerfs du lecteur.
Sur ce thème, déjà brillant, se greffent des réflexions suggérées sur les notions de responsabilité et de culpabilité : les tueurs en série ou autres délinquants relevant de la psychiatrie sont-ils acteurs ou victimes de leur philia, de leur folie ? Quelles valeurs peut-on (doit-on) accepter de perdre au nom de la sécurité des populations ? Le sacrifice d’un appât - certes consentant mais aussi victime de sa philia que ses proies - est-il acceptable s’il permet de sauver une victime ? Dix ? Mille ?
De quoi, donc, alimenter de bonnes heures de lecture, plus quelques heures de réflexion après un final époustouflant - qu’il est évidemment impossible de révéler ici .
Ma note : 9/10On appréciera d’abord le trait de génie d’avoir fait évoluer non pas les sciences dites dures - à coups de voiture volante, de voyage dans le temps ou de téléportation - mais bien les sciences comportementales. C’est à la fois brillant, surprenant, et traité de manière réaliste. Bien sûr, et c’est probablement ce qui a empêché ce livre d’être un vrai coup de cœur immédiat et absolu, c’est également très déroutant d’imaginer un monde où les ordinateurs quantiques ont permis de décrypter les clefs les plus secrètes de notre comportement, nous réduisant à des enchaînements de stimuli-réactions manipulables à volonté via ces masques inspirés des oeuvres de Shakespeare - rien de que ça...
Les personnages, douloureusement humains, évoluent dans cette intrigue improbable, d’acte en acte, de scène en scène, tour à tour spectateurs et acteurs, victimes et bourreaux, selon un rythme brisé qui sait jouer avec les nerfs du lecteur.
Sur ce thème, déjà brillant, se greffent des réflexions suggérées sur les notions de responsabilité et de culpabilité : les tueurs en série ou autres délinquants relevant de la psychiatrie sont-ils acteurs ou victimes de leur philia, de leur folie ? Quelles valeurs peut-on (doit-on) accepter de perdre au nom de la sécurité des populations ? Le sacrifice d’un appât - certes consentant mais aussi victime de sa philia que ses proies - est-il acceptable s’il permet de sauver une victime ? Dix ? Mille ?
De quoi, donc, alimenter de bonnes heures de lecture, plus quelques heures de réflexion après un final époustouflant - qu’il est évidemment impossible de révéler ici .
Invité- Invité
Re: [Somoza, José Carlos] L'appât
Mon avis:
Lu en septembre 2012: coup de coeur !
Le postulat de départ est assez simple: l'oeuvre de Shakespeare a permis d'élaborer une grille de lecture de l'humain dans son fonctionnement psychique. Cela a permis ensuite mettre au point des "psynomes" (attitudes, gestes, sons combinés de manière précise) qui permettent de décoder et surtout de contrôler les types de personnalités ("Phylia") "normales" et surtout déviantes.
La chasse donnée à un tueur en série donne la trame policière qui est un prétexte à la confrontation de l'humain à sa psyché, sa construction psychique et ses comportements.
Même si l'auteur précise qu'il s'agit d'une théorie entièrement imaginaire, sa formation de psychiatre donne une dimension vertigineuse à ce roman. Les niveaux de lecture sont nombreux et la maîtrise, tant littéraire (connaissance de Shakespeare et son oeuvre) que stylistique (construction), est impressionnante.
J'ai travaillé pendant plus de 10 ans comme infirmier et cadre-infirmier en psychiatrie et j'y ai retrouvé les grands axes de nombreuses théories. Celles et ceux d'entre vous qui ont abordé les positions de vie, les théories de Berne se diront que cela pourrait en être le développement ultime.
Magistral, fort, troublant.
Ma note: 10/10
Lu en septembre 2012: coup de coeur !
Le postulat de départ est assez simple: l'oeuvre de Shakespeare a permis d'élaborer une grille de lecture de l'humain dans son fonctionnement psychique. Cela a permis ensuite mettre au point des "psynomes" (attitudes, gestes, sons combinés de manière précise) qui permettent de décoder et surtout de contrôler les types de personnalités ("Phylia") "normales" et surtout déviantes.
La chasse donnée à un tueur en série donne la trame policière qui est un prétexte à la confrontation de l'humain à sa psyché, sa construction psychique et ses comportements.
Même si l'auteur précise qu'il s'agit d'une théorie entièrement imaginaire, sa formation de psychiatre donne une dimension vertigineuse à ce roman. Les niveaux de lecture sont nombreux et la maîtrise, tant littéraire (connaissance de Shakespeare et son oeuvre) que stylistique (construction), est impressionnante.
J'ai travaillé pendant plus de 10 ans comme infirmier et cadre-infirmier en psychiatrie et j'y ai retrouvé les grands axes de nombreuses théories. Celles et ceux d'entre vous qui ont abordé les positions de vie, les théories de Berne se diront que cela pourrait en être le développement ultime.
Magistral, fort, troublant.
Ma note: 10/10
Crockyx- Grand expert du forum
-
Nombre de messages : 670
Age : 62
Localisation : LYON
Emploi/loisirs : Consultant / Photo
Genre littéraire préféré : Tous les genres selon mon humeur !
Date d'inscription : 15/01/2013
Sujets similaires
» SOMOZA, José Carlos
» [Somoza, José Carlos] La dame n°13
» [Somoza, José Carlos] La clé de l'abîme
» [Somoza, José carlos] Tétrameron
» [Somoza, José Carlos] Clara et la pénombre.
» [Somoza, José Carlos] La dame n°13
» [Somoza, José Carlos] La clé de l'abîme
» [Somoza, José carlos] Tétrameron
» [Somoza, José Carlos] Clara et la pénombre.
Partage lecture :: Nos critiques :: Littératures de l'Imaginaire :: Autres auteurs - Littératures de l'imaginaire
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum