[Khadra, Yasmina] Qu'attendent les singes

Auteur: Yasmina Khadra
Titre:    Qu'attendent les singes
Editeur: Julliard
Date de parution: 03/04/2014
ISBN-10: 2260021948
ISBN-13: 978-2260021940
Nombre de pages: 360

Note de l'éditeur (4ème de couverture)

Yasmina Khadra revient à ses premières amours, l'Algérie d'aujourd'hui, et dresse, avec "Qu'attendent les singes", un portrait sombre et déliquescent de son pays.
Une jeune fille est découverte assassinée dans la forêt de Baïnem, dans les environs d'Alger. Une femme intègre mène l'enquête. Elle ignore qu'elle va devoir affronter un homme qui fait partie de ceux qui contrôlent l'Algérie d'aujourd'hui. Intouchables, maîtrisant tous les secteurs de la vie du pays, on ne les cite jamais, mais tout le monde les connaît. La seule évocation de leur nom provoque la terreur. Le combat implacable de cette femme exceptionnelle va la conduire au coeur des dérives d'une nation livrée aux prédateurs, aux opportunistes et aux puissants. Avec autant d'amour que de justesse, le plus célèbre des écrivains algériens nous dévoile la part obscure de cette nation et de son peuple. Ce pays magnifique, conçu pour le rêve, est atrocement défiguré par la cupidité insatiable des décideurs et de leurs complices que rien n'arrête : ni les lois ni les crimes les plus abominables.


Mon avis:

Il faut tout d'abord savoir que Yasmina Khadra voulait se présenter aux élections présidentielles mais sa candidature mal vue n'a pas retenu suffisamment de parrainages...
Début avril il publie "Qu'attendent les singes" qui sous couvert d'une enquête policière dénonce les dysfonctionnements de la société algérienne d'aujourd'hui.

C'est un roman dur qu'il nous livre là: Une jeune étudiante est découverte morte et atrocement mutilée dans une forêt près d'Alger.
« Merveilleusement maquillée, les cheveux constellés de paillettes, les mains rougies au henné avec des motifs berbères jusqu aux poignets, on dirait que le drame l a cueillie au beau milieu d une noce. Dans ce décor de rêve, tandis que le monde s éveille à ses propres paradoxes, la Belle au bois dormant a rompu avec les contes.
Elle est là, et c' est tout. Fascinante et effroyable à la fois.
Telle une offrande sacrificielle... »

La commissaire Nora Bilal se voit confier l'enquête, femme et lesbienne deux graves défauts dans ce pays, elle va devoir se battre sur tous les fronts contre une presse complètement contrôlée, une corruption à tous les niveaux décrite sans complaisance, mais avec beaucoup de courage par l'auteur, les r'boba (tout puissants chefs qui font et défont les ministres et autres sommités, tuent et violent en toute impunité, C'est un système digne de Kafka "qui pousse les enfants à la folie en leur refusant le droit d'être heureux chez eux”,

Tout s'achète, tout se vend, et on entre dans ce roman avec souvent un haut le cœur, mais sans pouvoir en sortir.

L'intrigue policière n'est qu'un prétexte et chacun en Algérie doit pouvoir mettre un nom sur les personnages décrits.

Citation: Il y a ceux qui font d'une lueur une torche et d'un flambeau un soleil et qui louent une vie entière celui qui les honorent un soir; et ceux qui crient au feu dès qu'ils voient un soupçon de lumière au bout de leur tunnel, tirant vers le bas toute main qui se tend à eux.
En Algérie, on appelle cette dernière catégorie: les Béni Kelboun.
Génétiquement néfastes, les BÉNI KELBOUN disposent de leur propre trinité:
Ils mentent par nature,
Trichent par principe,
et
Nuisent par vocation.
Ceci est leur histoire

Les modérateurs jugeront si ce livre doit figurer dans la rubrique policier.

Même si j'ai eu un haut le cœur à lire ce livre dur, je donne un coup de cœur à l'homme courageux qui l'a écrit.

Pas mon genre de lecture mais justement, c'est bien de s'ouvrir à de nouveaux horizons... donc merci !

Noté, encore un peu cher d'occasion, mais je ne patienterai pas longtemps ....

Merci les filles d'être passé par là!  

Magnifique roman sur le thème de la corruption omniprésente en Algérie. Du grand Khadra avec toujours une touche d'espoir en l'être humain.

Vous me donnez envie de relire du Yasmina Khadra... ça fait longtemps. Et il se trouve qu'il est disponible à la médiathèque. Et que j'ai prévu d'y passer cet aprèm

Et bien, voilà qui est fait.

Je serai plus nuancée que toi, Step. J'ai été assez surprise par ce roman, je n'ai pas vraiment retrouvé Yasmina Khadra tel que je le connaissais.

Premièrement, j'ai été extrêmement choquée par quelques coquilles : dès l'intro, une magnifique faute d'orthographe "celui qui les honorent" argh, le sujet est singulier donc le verbe aussi, arrêtez-moi si je me trompe... et un magnifique "abyme"... je ne sais pas ce que c'est. Quelques phrases (oh, très peu, mais... !) sont plutôt maladroites. Non, non et non ! Yasmina Khadra est un grand poète, un écrivain magnifique. Que se passe-t-il ?

Ensuite, je suis un peu surprise de voir à quel point l'auteur "flingue" son pays. Le premier paragraphe du chapitre II est plus que dur. C'est une condamnation sans appel. Jugez un peu :
-"Alger... n'est plus qu'une ruine mentale... enlisée jusqu'au cou dans ses propres vomissures."
-" ... une jeunesse en cale sèche qui ne sait rien faire d'autre que se tourner les pouces au pied des murs en attendant ... pour saccager les boutiques et mettre le feu..."
-"... c'est l'abâtardissement métastasé."
-"Même le vice s'effiloche..."


Les trois premiers quarts du roman présentent l'Algérie sous ce jour. Un pays ruiné par ses dirigeants qui se sont approprié frauduleusement toutes ses richesses, une population appauvrie, sans but, sans espoir. Fichue, quoi. Je ne peux pas m'empêcher de douter un peu. L'auteur n'exagérerait-il pas un peu ? Tout ça me semble bien fort de café. D'autant que la fin est beaucoup plus positive. Je ne comprends pas bien pourquoi, tout à coup, le peuple algérien est magnifique. Je le crois volontiers, mais franchement, j'ai du mal à suivre l'auteur dans sa description de son pays.

Il est certain qu'il faut beaucoup de courage pour écrire cela. Mais je reste perplexe.

Côté polar... et bien c'est plutôt bon. Bien noir. Forcément.

Heureusement, Yasmina Khadra reste le poète que j'aime. Dans sa grande majorité, le texte est magnifique. Le premier chapitre, qui décrit la forêt, puis le cadavre qu'elle recèle est tout simplement splendide.

J'ajouterai que j'ai décelé des similitudes entre certains aspects présentés de l'Algérie avec... la situation de la France. Et oui. Je me demande s'il n'y a pas dans ce texte un avertissement. Attention, messieurs les français, vous prenez le même chemin que nous. Corruption, impunité, perte des valeurs, ghettos, manipulations de la presse... Est-ce que ça ne commencerait pas aussi chez nous ?

Aucun doute, l'Algérie n'est pas la seule à en prendre pour son grade. La presse est bien servie également :
"Le journalisme information est une obsolescence. C'est l'ère du journalisme opinion. C'est toi qui formates les esprits. Tu as le pouvoir de dévoiler le secret des dieux et de l'instruction".
"Tu" étant le journaliste.

Comme vous le voyez, j'ai trouvé un peu de tout dans ce roman. Je n'oublierai surtout pas de mentionner un ton digne de Michel Audiard.
"Tu es aussi putride qu'une gangrène et aussi lamentable qu'un incident de parcours"

J'ai aimé. Mais j'attends une réponse, une suite. J'ai besoin de comprendre mieux, d'en savoir plus.

Le premier chapitre, la description de la jeune fille, et j'ai pensé bien malgré moi au "Dormeur du val" de Rimbaud.
C'est le premier roman de Yasmina Khadra que je lis.
J'ai aimé son style, j'ai aimé suivre l'enquète de Nora Bilal, femme atypique dans un monde machiste. Sa force pour assumer son rôle au sein d'une police d'homme, sa faiblesse dans l'amour qu'elle éprouve pour une jeune délinquante.
Le lien qui unit la jeune victime à son bourreau n'est pas anodin. Il démontre que le pouvoir peut aussi se retourner contre ceux qui le possèdent sans même qu'ils s'en rendent compte.

Je ne parlerai pas ici du côté politique du roman.
Khadra a le courage d'exprimer ses opinions.
Il exagère peut-être, mais je le crois sincère.
Et surtout, par son talent il fera avancer les hommes et femmes de son pays.

Les lectures de Joëlle

Merci Joëlle et les autres pour votre critique 

C’est avec un rythme entrainant que l’auteur nous fait entrer dans l’intrigue avec Nora, la commissaire courageuse et n’ayant pas froid aux yeux, qui est le personnage principal du roman. Elle est lesbienne et vit en couple avec une jeune femme qui lui complique l’existence, c’est ce choix de vie qui provoque humiliation et moqueries dans ce milieu d’hommes de la police, cependant elle est forte et se moque des préjugés. J’ai ressenti chez l’auteur de la haine et du dégoût devant la situation de son pays, j’ai eu l’impression que ses écrits étaient un peu comme un règlement de compte pour dénoncer la corruption car l’enquête nous fait découvrir une Algérie sombre. Un beau style avec des passages de violence, des rebondissements, de l’humour noir en font un polar passionnant que j’ai pris plaisir à lire