[Quirós, Daniel] Pluie des ombres
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[Quirós, Daniel] Pluie des ombres
Pluie des ombres
Auteur : Daniel Quirós
Traduit de l’espagnol (Costa Rica) par Roland Faye
Éditions de l’Aube (Novembre 2015)
Collection : Aube Noire
240 pages
ISBN : 978-2-8159-1244-0
Quatrième de couverture
Costa Rica. Le corps d’un jeune homme est retrouvé, mutilé, au bord d’une route à quelques mètres d’une école. La police en fait peu de cas car c’est un Nica, un immigré du Nicaragua, et il y a de la drogue dans le ventre du cadavre… Ce devait être encore un narcotrafiquant. Sauf que. Sauf que Don Chepe connaissait le garçon, et qu’il n’était certainement pas un dealer. Épaulé de son fidèle Gato, l’ex-guérillero devenu détective à ses heures se lance à la poursuite des coupables. D’orangeraies à d’immenses complexes touristiques, de la prostitution à la haute société, c’est un véritable panorama du Costa Rica que nous révèle ce livre.
Mon avis
On dirait qu’il va pleuvoir…..
Dans le premier roman de Daniel Quirós, il faisait chaud, une de ces chaleurs étouffantes qui accable, fait suffoquer et ralentit les mouvements. Cette fois-ci, la pluie est plus présente et lorsqu’elle n’est pas là, le temps est à l’orage. Dans tous les sens du terme, tant au propre qu’au figuré. L’atmosphère est limite explosive, comme si, d’un moment à l’autre, les éclairs pouvaient zébrer le ciel, illuminant d’une lueur trouble ce qui se développe sous les yeux.
On retrouve Don Chepe, un ancien guérillero, reconverti en détective à ses heures perdues. C’est un électron libre, très proche du Gato qui lui est officiellement dans la police. Il vit, loin de tout, dans une petite bourgade où il ne se passe pas grand-chose. Mais lorsqu’un événement inhabituel survient, Don Chepe peut fureter partout, se renseigner quitte à endosser des identités différentes pour rencontrer des personnages peu scrupuleux. On dirait que rien ne l’atteint vraiment et que le seul but recherché est dans cet opus, de comprendre pourquoi un jeune homme est mort, lâchement assassiné. Est-ce parc e qu’il connaît la mère de ce Nica ou tout simplement parce qu’il est épris de justice qu’il mène l’enquête ? Je crois que c’est un mélange des deux raisons et également parce qu’il aime aller au fond des choses. Il est comme ça …. peut-être qu’en tant qu’ex guerrier, il en a tellement vu, subi, que la vie n’a pas la même valeur pour lui et qu’il a l’impression d’avoir déjà beaucoup vécu.
Toujours est-il que nous allons le suivre dans ses recherches et découvrir un Costa Rica loin des cartes postales des touristes. Trafic, corruption, magouilles, blanchiment d’argent…rien ne sera épargné au lecteur. Les gens sont pauvres, désabusés pour certains, pourtant tous s’accrochent à la vie avec plus ou mois de ferveur et de réussite mais dans le but de continuer à avancer avec, sans doute, le secret espoir, d’un mieux, un jour…mais quand ?
En enquêtant pour comprendre le décès de Antonio Rivas, Don Chepe ne savait pas sur quels terrains mouvants il allait s’aventurer et quels dégâts collatéraux il risquait de provoquer. Mais peut-être était-ce aussi un moyen de faire cesser certaines dérives dans un état gangrené par les inégalités sociales et la présence de clandestins qui s’imaginent trouver un eldorado et des jours meilleurs…
Le climat de ce pays, écartelé entre diverses visions de l’avenir, est très bien exprimé sous la plume de l’auteur (et forcément, cela signifie un excellent travail du traducteur ). Certaines expressions traduites de l’original ont un petit air poétique qui n’est pas pour me déplaire.
« Dehors, la pluie avait cessé, mais il tombait encore des poils de chat sur les champs plongés dans l’obscurité. »
J’apprécie également, ce que j’appellerai la « philosophie de vie » de Don Chepe, que l’auteur retranscrit à travers des dialogues imagés mais bien parlants. Il a le « parler » d’un « vieux sage », l’humour désenchanté en plus.
"- Mais même l’eau de rivières coule vers quelque part.
- Oui, mais on ne contrôle pas le cours des rivières.
- C’est pour ça qu’on est né avec deux bras, parce que, parfois, on n’a pas d’autre choix que de se mettre à nager."
Ce livre m’a vraiment intéressée tant sur le fond que sur la forme. Daniel Quirós est un auteur à découvrir, à suivre, à apprécier. Il parle de son pays d’origine (il vit actuellement en Pennsylvanie) avec discernement, avec pudeur mais également avec une passion qu’il faut découvrir en filigrane de chaque ligne, de chaque paragraphe tant il le fait avec discrétion, présentant des individus qui croient encore en certaines valeurs, telles l’amitié, la justice et l’Homme…..
Cassiopée- Admin
-
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Genre littéraire préféré : un peu tout
Date d'inscription : 17/04/2009
Re: [Quirós, Daniel] Pluie des ombres
Mon avis :
Bienvenue au Costa Rica. L’action pourrait presque se passer en France, si, si, je vous assure, certaines tirades ne seraient pas déplacées dans la bouche d’un français. Prendez l’exemple suivant :
Peu importe d’où ils viennent : qu’ils soient Nicas, Dominicains ou même Suédois, pourquoi pas ? S’ils viennent pour travailler très bien. Mais le gouvernement ne contrôle pas assez, et de nombreux délinquants et criminels rentrent chez nous. Et qui est-ce qui va séparer les bons des mauvais, après ?
Oui, tout cela, c’est la faute du gouvernement. Il faut faire quelque chose, il faut empêcher ces Nicas (diminutifs de nicaraguayens) de prendre le travail des Ticos (diminutif de costaricains) et en plus, d’apporter la délinquance qui n’existe pas du tout, mais alors là pas du tout, dans le sein des costaricains. Non, sans étrangers, tout est vraiment calme et paisible. La réponse de Don Chepe est limpide :
– Et qui es-tu, toi, pour laisser mourir un homme juste en face de chez toi ?
Tout a commencé par un meurtre, atroce, horrible, mais presque tout le monde s’en moque : c’était un Nica, et on a trouvé des sachets de drogue près de lui. Simple et sans bavure, et tant pis pour les tortures : on ne se fatiguera pas à chercher le coupable. Le seul que cela préoccupe, en plus de la famille de la victime, c’est Don Chepe. Lui sait très bien qu’Antonio n’est pas un trafiquant de drogue. Il sait les efforts que sa mère a fait pour lui, pour sa soeur, il a vu le jeune homme au travail : non, Antonio ne trempait pas dans la drogue.
Un second coup est porté, l’un des cousins d’Antonio est à son tour agressé, laissé pour mort : il survit, défiguré. Qui peut en vouloir à ce jeune homme qui a eu le seul tort de venir à l’enterrement de son cousin, passant la frontière sans papiers ? Oui, il n’a rien à voir avec l’affaire, si ce n’est qu’il était présent à l’enterrement, qu’il a été vu, et que son agression est comme un message : ne pas aller plus loin dans les investigations.
Seulement, Don Chepe, ex-guérillero ne peut pas. Il ne peut pas laisser les choses en l’était, il ne peut pas dire à la mère de Tonio qu’il a laissé faire, qu’il n’a pas tout mis en oeuvre pour que l’assassin de son fils ne paie pour ce qu’il a fait. Alors oui, il enquête, il découvre que Tonio n’est pas le premier à payer de sa vie le fait d’avoir été du même côté que Don Chepe, c’est à dire du côté de ceux qui ne laissent pas faire, de ceux qui ne baissent pas les bras ou qui ne détournent pas le regard quand ils découvrent quelque chose de pas joli-joli.
Le Costa-Rica est un magnifique pays, un lieu calme, la Suisse de l’Amérique du Sud, un lieu touristique, où il fait bon se reposer sans rien risquer, un lieu où l’écologie peut se concilier facilement avec le tourisme. Il faut simplement ne se mêler de rien de ce qui est réellement important.
Bienvenue au Costa Rica. L’action pourrait presque se passer en France, si, si, je vous assure, certaines tirades ne seraient pas déplacées dans la bouche d’un français. Prendez l’exemple suivant :
Peu importe d’où ils viennent : qu’ils soient Nicas, Dominicains ou même Suédois, pourquoi pas ? S’ils viennent pour travailler très bien. Mais le gouvernement ne contrôle pas assez, et de nombreux délinquants et criminels rentrent chez nous. Et qui est-ce qui va séparer les bons des mauvais, après ?
Oui, tout cela, c’est la faute du gouvernement. Il faut faire quelque chose, il faut empêcher ces Nicas (diminutifs de nicaraguayens) de prendre le travail des Ticos (diminutif de costaricains) et en plus, d’apporter la délinquance qui n’existe pas du tout, mais alors là pas du tout, dans le sein des costaricains. Non, sans étrangers, tout est vraiment calme et paisible. La réponse de Don Chepe est limpide :
– Et qui es-tu, toi, pour laisser mourir un homme juste en face de chez toi ?
Tout a commencé par un meurtre, atroce, horrible, mais presque tout le monde s’en moque : c’était un Nica, et on a trouvé des sachets de drogue près de lui. Simple et sans bavure, et tant pis pour les tortures : on ne se fatiguera pas à chercher le coupable. Le seul que cela préoccupe, en plus de la famille de la victime, c’est Don Chepe. Lui sait très bien qu’Antonio n’est pas un trafiquant de drogue. Il sait les efforts que sa mère a fait pour lui, pour sa soeur, il a vu le jeune homme au travail : non, Antonio ne trempait pas dans la drogue.
Un second coup est porté, l’un des cousins d’Antonio est à son tour agressé, laissé pour mort : il survit, défiguré. Qui peut en vouloir à ce jeune homme qui a eu le seul tort de venir à l’enterrement de son cousin, passant la frontière sans papiers ? Oui, il n’a rien à voir avec l’affaire, si ce n’est qu’il était présent à l’enterrement, qu’il a été vu, et que son agression est comme un message : ne pas aller plus loin dans les investigations.
Seulement, Don Chepe, ex-guérillero ne peut pas. Il ne peut pas laisser les choses en l’était, il ne peut pas dire à la mère de Tonio qu’il a laissé faire, qu’il n’a pas tout mis en oeuvre pour que l’assassin de son fils ne paie pour ce qu’il a fait. Alors oui, il enquête, il découvre que Tonio n’est pas le premier à payer de sa vie le fait d’avoir été du même côté que Don Chepe, c’est à dire du côté de ceux qui ne laissent pas faire, de ceux qui ne baissent pas les bras ou qui ne détournent pas le regard quand ils découvrent quelque chose de pas joli-joli.
Le Costa-Rica est un magnifique pays, un lieu calme, la Suisse de l’Amérique du Sud, un lieu touristique, où il fait bon se reposer sans rien risquer, un lieu où l’écologie peut se concilier facilement avec le tourisme. Il faut simplement ne se mêler de rien de ce qui est réellement important.
Sharon- Modérateur
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Genre littéraire préféré : romans policiers et polars
Date d'inscription : 01/11/2008
Re: [Quirós, Daniel] Pluie des ombres
Merci les prof pour ces belles chroniques
lalyre- Grand sage du forum
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