[Stegner, Wallace] La montagne en sucre
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[Stegner, Wallace] La montagne en sucre
La montagne en sucre
Auteur : Wallace Stegner
Traduit de l’américain par Éric Chédaille
Éditions : Gallmeister (Avril 2016)
Collection : Totem
Première édition en 1943
Nombre de pages : 848
ISBN : 978-2-35178-562-1
Quelques mots sur l’auteur
Wallace Stegner est né en 1909 dans l’Iowa et a grandi dans divers États de l’Ouest américain : Washington, Montana, Idaho, Utah. Enseignant à Stanford puis à Harvard, il a compté parmi ses étudiants des auteurs tels que Thomas McGuane, Raymond Carver ou Edward Abbey… Il est mort en 1993, laissant derrière lui une œuvre vaste composée d’une soixantaine de romans et d’essais sur la défense des espaces sauvages.
Quatrième de couverture
Dakota, 1905. La jeune Elsa a fui les plaines du Minnesota dans l’espoir de fonder un foyer. Lorsqu’elle rencontre Bo Mason, bourlingueur en quête d’aventures et de fortune, elle voit en lui la promesse d’un monde nouveau. Elle n’imagine pas la vie à laquelle les désirs de grandeur de Bo les destinent. Saloons clandestins, conquête de la terre, mine d’or, trafic d’alcool... Bo Mason, héros américain par excellence, se réinvente au fil des opportunités qui se présentent à lui, entraînant les siens dans sa poursuite effrénée d’un horizon qui semble se dérober au fur et à mesure qu’il s’en approche. Et pendant ce temps-là, l’Amérique continue à se construire et à charrier des mythes.
Mon avis
Monument de la littérature américaine, La Montagne en sucre est considéré comme le chef-d'oeuvre - en partie autobiographique - du grand Wallace Stegner, l'un des plus grands écrivains du XXe siècle.
Merci aux éditions Gallmeister et à Partage Lecture pour ce partenariat coup de coeur!
Et au loin l’horizon…. Si loin…..
Harry Mason, appelez le Bo, a tout pour lui : une carrure impressionnante, un sourire éclatant, un bon coup de fusil et une ambition démesurée. Il est prêt à conquérir le monde, à aller toujours plus loin, vers cet horizon qui semble plus ensoleillé, plus beau mais qui se dérobera chaque fois qu’il s’en rapprochera. C’est un homme qui voudrait réussir, mais qui a du mal à se stabiliser, il a besoin de nouveaux projets, d’aiguillons permanents pour avancer…. Est-ce qu’il n’est pas né à la bonne époque, est-ce qu’il en « veut trop » ? Toujours est-il que lorsqu’il croit « être arrivé », un grain de sable s’installe dans les rouages et tout est à recommencer…. Il n’aime ni les défaites, ni les échecs, Bo, cela le rend hargneux, injuste avec les autres car il n’aime pas se sentir en position de faiblesse. Il veut donner, sans cesse, l’image d’un Homme, avec un grand H, qui maîtrise tout (situations et personnes), qui fait face…. Mais trop souvent, il se précipite, soit dans des mauvais coups, flirtant avec l’illégalité, soit dans des prises de risques mal mesurées et il se retrouve avec un fiasco de plus sur les bras…. Avant d’essayer de rebondir avec un autre plan, un autre défi. Mais si seulement il réfléchissait et anticipait avant de prendre des décisions …..
Il est chanceux, Bo, il a épousé, Elsa, une femme, exceptionnelle, qui passera toujours au second plan pour lui offrir, à lui, le meilleur, malgré son caractère dur qu’elle n’apprécie pas lorsqu’il dépasse les limites…. Elle reste droite, suit sa ligne de conduite et si besoin lui tient tête, l’obligeant à prendre conscience de ses manques. « Elle fait le deuil de ses aspirations, mais jamais d’elle-même. »
C’est elle qui tient tout à bout de bras, agissant dans l’ombre, affichant sans cesse son sourire rassurant pour les enfants, un calme olympien face aux crises de son époux et réussissant à créer un foyer dans des conditions de vie précaires dont elle s’accommode avec sagesse.
Le problème, avec Bo, c’est qu’il oublie vite. Les leçons de la vie ne lui servent que peu car il les occulte et passe à autre chose…. Il retombe régulièrement dans ses travers et il gâche souvent des occasions de mener une vie heureuse, rangée…. Comme si la simplicité lui faisait peur, il faut qu’il bouge, qu’il reparte toujours plus loin…. Pourtant, on le sait tous, l’herbe n’est pas forcément plus verte ailleurs…. Et le temps passe inexorablement.…
Ce roman se décline en dix parties, permettant, si nécessaire, de faire un bond plus ou moins important dans le temps. On y voit les choix de Bo mais aussi la façon dont Elsa maintient l’idée d’une famille unie pour leurs deux fils…. Ecrit en style narratif à la troisième personne du singulier, il arrive que quelques pages s’adresse à l’un ou l’autre, employant le « Tu » d’une lettre ou d’un monologue. On ressent alors la présence du « vagabond de la mémoire », de celui qui porte « l’histoire familiale » comme un étendard. « Il était un chasseur d’enfance, un explorateur des événements oubliés et des épreuves d’autrefois, un vagabond de la mémoire. »
Le style est beau, lyrique et épuré, le vocabulaire soigné. Le tout empreint de poésie. C’est une façon d’écrire qui me ravit et j’adore (merci au traducteur) ! Je ne me suis pas ennuyée une seconde à suivre pendant des décennies, Bo, sa femme et leurs enfants.
Cette fresque familiale avec, en toile de fond, l’Amérique sur des dizaines d’années, est magnifique. On y voit la corruption, la vente illégale de l’alcool, les salons de jeux, l’exploitation des mines qui s’avère être tout sauf des revenus en or, des hommes toujours plus impatients de réussir, qui n’attendent pas que les choses se mettent en place, qui fuient pour aller découvrir d’autres filons, plus ou moins honnêtes…. Il y également les conditions climatiques, les maladies qui régentent le quotidien sans qu’on puisse intervenir… Les protagonistes sont « vivants », terriblement présents dans les pages, apportant leur regard acéré mais toujours réaliste sur les événements douloureux, joyeux, surprenants qui emplissent les pages.
C’est avec une profonde mélancolie que j’ai refermé ce livre, je n’avais pas envie de quitter les individus que j’avais si longuement côtoyés parce qu’ils étaient devenus, au fil des pages, de vrais intimes…..
« A la toute fin, il avait du embrasser du regard le bout de sa route et n’y rien voir, pas plus de bonne grosse montagne en sucre que de fontaine de limonade, d’arbres à cigarettes, de ruisselets de whisky ou de buissons chargés d’aumônes. »
Dernière édition par Cassiopée le Sam 21 Nov 2020 - 11:16, édité 1 fois
Cassiopée- Admin
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Re: [Stegner, Wallace] La montagne en sucre
Mon avis :
La montagne en sucre, c'est l'histoire d'une femme. Elsa, 18 ans. Avec l'intransigeance de la jeunesse, elle fuit son père, qui s'est remarié. Dans le Dakota, elle rencontre un homme, Bo. Aventureux, ambitieux. Elle l'aime, elle l'épouse, elle le soutiendra, vaille que vaille, malgré les nombreuses épreuves, les très mauvaises passes, les douleurs. Elle est celle qui unit, celle qui vit une vie qu'elle n'avait pas vraiment souhaité, mais qu'elle estime, parfois, meilleure que celle d'autres femmes, parfois pire. Lucide, toujours, sur elle, sur son père, sur l'homme qu'elle a sincèrement aimé, elle prend des décisions, douloureuses, elle agit, fait toujours non pas de son mieux, mais tout son possible. Pas d'auto-apitoiement, pas de misérabilisme chez elle, toujours, même dans les pires moments, un regard d'une rare acuité (voir son dialogue avec son fils p. 670).
La montagne en sucre, c'est l'histoire d'un homme qui veut vivre le rêve américain des années après la conquête de l'Ouest. Un homme issu d'une famille aussi désunie qu'une portée de chiot qu'on a confiés à droite à gauche, Un homme qui n'attend pas, que l'une ou l'autre des affaires qu'il a entreprises prospère suffisamment, toujours à courir vers de nouvelles perspectives d'enrichissement, que ce soit grâce à des terrains, des mines, ou du trafic d'alcool (l'une des parties les plus passionnantes du roman), un homme qui ne s'est jamais préoccupé de construire un foyer pour sa famille, un homme qui, s'il n'avait pas eu une femme comme Elsa à ses côtés, n'aurait jamais été capable de prendre soin des siens.
La montagne en sucre, c'est l'histoire de l'Amérique. Pas l'histoire avec ses dates, même si la première guerre mondiale fait irruption dans le récit sans crier gare. Une Amérique des champs, des bois, des vagabonds. Une Amérique où les routes ne sont pas encore praticables, où l'on n'a pas de voisin, où les communications fonctionnent mal, voire très mal. Une Amérique où l'on est attentif aux bruits, aux sons, aux odeurs. Une Amérique où le sport comptait déjà beaucoup. Cela va peut-être paraître étrange, mais j'ai pensé à La petite maison dans la prairie en lisant ce livre, pas la série, non, mais les livres dans lesquels Laura narre les épreuves endurées par sa famille - elle aussi vécut dans le Minnesota et le Dakota.
Oui, la montagne en sucre mesure plus de 800 pages, et, parfois, il faut s'accrocher pour lire la vie quotidienne de cette famille, non que ce soit difficile à lire, mais parce qu'il s'agit vraiment du quotidien d'une femme, d'un homme, pas toujours là, et de leurs deux fils, l'un téméraire, l'autre moins. Pourtant, il n'est pas facile de quitter ce livre, de laisser les personnages ainsi, sans doute parce que nous les avons accompagnés non le temps d'un récit, mais le temps de toute une vie.
Merci au forum Partage-Lecture et aux éditions Gallmeister pour ce partenariat.
La montagne en sucre, c'est l'histoire d'une femme. Elsa, 18 ans. Avec l'intransigeance de la jeunesse, elle fuit son père, qui s'est remarié. Dans le Dakota, elle rencontre un homme, Bo. Aventureux, ambitieux. Elle l'aime, elle l'épouse, elle le soutiendra, vaille que vaille, malgré les nombreuses épreuves, les très mauvaises passes, les douleurs. Elle est celle qui unit, celle qui vit une vie qu'elle n'avait pas vraiment souhaité, mais qu'elle estime, parfois, meilleure que celle d'autres femmes, parfois pire. Lucide, toujours, sur elle, sur son père, sur l'homme qu'elle a sincèrement aimé, elle prend des décisions, douloureuses, elle agit, fait toujours non pas de son mieux, mais tout son possible. Pas d'auto-apitoiement, pas de misérabilisme chez elle, toujours, même dans les pires moments, un regard d'une rare acuité (voir son dialogue avec son fils p. 670).
La montagne en sucre, c'est l'histoire d'un homme qui veut vivre le rêve américain des années après la conquête de l'Ouest. Un homme issu d'une famille aussi désunie qu'une portée de chiot qu'on a confiés à droite à gauche, Un homme qui n'attend pas, que l'une ou l'autre des affaires qu'il a entreprises prospère suffisamment, toujours à courir vers de nouvelles perspectives d'enrichissement, que ce soit grâce à des terrains, des mines, ou du trafic d'alcool (l'une des parties les plus passionnantes du roman), un homme qui ne s'est jamais préoccupé de construire un foyer pour sa famille, un homme qui, s'il n'avait pas eu une femme comme Elsa à ses côtés, n'aurait jamais été capable de prendre soin des siens.
La montagne en sucre, c'est l'histoire de l'Amérique. Pas l'histoire avec ses dates, même si la première guerre mondiale fait irruption dans le récit sans crier gare. Une Amérique des champs, des bois, des vagabonds. Une Amérique où les routes ne sont pas encore praticables, où l'on n'a pas de voisin, où les communications fonctionnent mal, voire très mal. Une Amérique où l'on est attentif aux bruits, aux sons, aux odeurs. Une Amérique où le sport comptait déjà beaucoup. Cela va peut-être paraître étrange, mais j'ai pensé à La petite maison dans la prairie en lisant ce livre, pas la série, non, mais les livres dans lesquels Laura narre les épreuves endurées par sa famille - elle aussi vécut dans le Minnesota et le Dakota.
Oui, la montagne en sucre mesure plus de 800 pages, et, parfois, il faut s'accrocher pour lire la vie quotidienne de cette famille, non que ce soit difficile à lire, mais parce qu'il s'agit vraiment du quotidien d'une femme, d'un homme, pas toujours là, et de leurs deux fils, l'un téméraire, l'autre moins. Pourtant, il n'est pas facile de quitter ce livre, de laisser les personnages ainsi, sans doute parce que nous les avons accompagnés non le temps d'un récit, mais le temps de toute une vie.
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Sharon- Modérateur
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Genre littéraire préféré : romans policiers et polars
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Re: [Stegner, Wallace] La montagne en sucre
Mon avis :
La Montagne en sucre nous offre une belle fresque de l’Amérique de la première moitié du XXe siècle et de ses étendues encore sauvages mais peu à peu dominées par l’Homme, les voies de chemin de fer gagnant du terrain et des villes importantes voyant le jour, c’est aussi l’Amérique de la débrouille, des trafics, des ambitieux et autres chercheurs « d’or », des grands champs de blé à cultiver, des premières voitures...
Mais c’est d’abord et avant tout un destin de femme et d’hommes. Celui d’Elsa, jeune femme ayant quitté son foyer d’Indian Falls suite au remariage de son père avec sa meilleure amie, Sarah, fraîchement débarquée à Hardanger, dans le Dakota du Nord où elle tombe amoureuse de Bo Mason. Combative, dynamique, aimante, elle est l’âme de la famille, son socle, un point de stabilité et d’amour dans la vie de ses deux fils, Chester et Bruce. C’est aussi le destin de Bo, le père, aux abords amicaux, charmants mais dangereux, sauvage. Eternellement à la recherche de mieux, de richesse et de gloire, d’un rêve impossible à atteindre, il entraîne sa famille avec lui dans ses projets aux quatre coins du pays, ne pouvant jamais rester en place. Versatile, il peut se montrer tantôt débonnaire, attentionné, rieur et taquin et tantôt irascible, violent et injuste.
Si les personnages (surtout Elsa et Bruce) m’ont plu (j’ai eu plus de mal avec Bo et son côté lunatique), j’ai eu beaucoup de mal avec cette lecture. J’ai trouvé de nombreuses longueurs et un style très descriptif qui m’a souvent ennuyée. J’ai aimé suivre les bons (et mauvais malheureusement) moments de cette famille et l’histoire en grande partie autobiographique de l’auteur mais mon intérêt a fini par s’émousser au fur et à mesure, avec ce sentiment de tourner en rond, de revivre trop souvent les mêmes scènes, les mêmes émotions. Je regrette d’être passée à côté de cette lecture, plutôt mitigée, j’aurais aimé l’apprécier davantage.
Un grand merci tout de même aux éditions Gallmeister et au forum Partage Lecture pour ce partenariat !
La Montagne en sucre nous offre une belle fresque de l’Amérique de la première moitié du XXe siècle et de ses étendues encore sauvages mais peu à peu dominées par l’Homme, les voies de chemin de fer gagnant du terrain et des villes importantes voyant le jour, c’est aussi l’Amérique de la débrouille, des trafics, des ambitieux et autres chercheurs « d’or », des grands champs de blé à cultiver, des premières voitures...
Mais c’est d’abord et avant tout un destin de femme et d’hommes. Celui d’Elsa, jeune femme ayant quitté son foyer d’Indian Falls suite au remariage de son père avec sa meilleure amie, Sarah, fraîchement débarquée à Hardanger, dans le Dakota du Nord où elle tombe amoureuse de Bo Mason. Combative, dynamique, aimante, elle est l’âme de la famille, son socle, un point de stabilité et d’amour dans la vie de ses deux fils, Chester et Bruce. C’est aussi le destin de Bo, le père, aux abords amicaux, charmants mais dangereux, sauvage. Eternellement à la recherche de mieux, de richesse et de gloire, d’un rêve impossible à atteindre, il entraîne sa famille avec lui dans ses projets aux quatre coins du pays, ne pouvant jamais rester en place. Versatile, il peut se montrer tantôt débonnaire, attentionné, rieur et taquin et tantôt irascible, violent et injuste.
Si les personnages (surtout Elsa et Bruce) m’ont plu (j’ai eu plus de mal avec Bo et son côté lunatique), j’ai eu beaucoup de mal avec cette lecture. J’ai trouvé de nombreuses longueurs et un style très descriptif qui m’a souvent ennuyée. J’ai aimé suivre les bons (et mauvais malheureusement) moments de cette famille et l’histoire en grande partie autobiographique de l’auteur mais mon intérêt a fini par s’émousser au fur et à mesure, avec ce sentiment de tourner en rond, de revivre trop souvent les mêmes scènes, les mêmes émotions. Je regrette d’être passée à côté de cette lecture, plutôt mitigée, j’aurais aimé l’apprécier davantage.
Un grand merci tout de même aux éditions Gallmeister et au forum Partage Lecture pour ce partenariat !
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