[Trouillot, Lyonel] Ne m'appelle pas Capitaine
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[Trouillot, Lyonel] Ne m'appelle pas Capitaine
[Trouillot, Lyonel] Ne m'appelle pas Capitaine
[Trouillot, Lyonel]
Ne m’appelle pas Capitaine
Editions Actes Sud 22 août 2018
ISBN 978 2 330 10875 5
147 pages
Quatrième de couverture
Quand Aude, aspirante journaliste, décide de frapper à la porte de Capitaine pour enquêter sur le Morne Dédé - un quartier de Port-au-Prince en déshérence qui connut son heure de gloire à l'époque de la dictature, lorsqu'il abritait les opposants -, elle n'est rien d'autre aux yeux du vieil homme qu'une jeune bourgeoise qui n'a connu que « des souffrances de contes de fées », l'héritière d'une longue tradition de familles opulentes ayant bâti leur fortune sur le dos des pauvres gens. Mais à ce vieillard acariâtre figé dans son fauteuil, la jeune fille offre également l'occasion de déchirer le silence, provoquant d'abord sa colère, puis parvenant peu à peu à ressusciter le grand maître d'arts martiaux qu'il a autrefois été, du temps où il se battait pour faire vivre son club, un lieu d'apprentissage, du temps où une mystérieuse élève l'avait ensorcelé et enjoint à servir « la cause », une femme dont il était tombé fou amoureux avant de la haïr. Parce qu'elle apprend, malgré elle, à poser un regard critique sur le milieu protégé dont elle est issue, où l'on se marie entre cousins pour perpétuer la couleur de peau des dominants en se frottant le moins possible aux « autres », qu'elle sait, dès lors, voir plus loin que le bout de son portail sécurisé, et peut-être parce que, à travers son grand frère Maxime, atteint de troubles psychiques, elle porte en elle l'altérité depuis sa naissance, Aude commence à faire sa place dans cet ailleurs. En la personne du vieil homme et de quelques jeunes « échoués », elle identifie un autre monde, une nouvelle humanité et, avec elle, le chemin pour faire de la vie une cause commune.
Mon avis
Ne m’appelle pas Capitaine. N’en déplaise aux poètes, mes chagrins jamais n’ont eu le pied marin. Ne m’appelle pas Capitaine. Je suis une vieille mygale, un petit crabe de terre.
Ceci est une partie du poème en première page du roman. Ce sont principalement deux personnages qui occupent les pages de ce livre, celui de Aude qui se penche sur la mémoire du passé de Capitaine, un surnom bien mérité lorsqu’on connaît son vécu. C’est une conversation inattendue entre les protagonistes dont les réponses du vieil homme sont écrites en italique, il vit dans l’un des plus vieux quartiers de la ville tombant en désuétude et rien que cela est toute une histoire, tandis que Aude vit dans un monde dominé par les préjugés et les écarts sociaux. Elle rencontre des jeunes échoués et avec eux et notre vieil acariâtre , elle va trouver le chemin pour faire de sa vie une utilité. Un très bon livre , une belle littérature comme sait s’y bien nous offrir Lyonel Trouillot…. 4,5/5
Ne m’appelle pas Capitaine
Editions Actes Sud 22 août 2018
ISBN 978 2 330 10875 5
147 pages
Quatrième de couverture
Quand Aude, aspirante journaliste, décide de frapper à la porte de Capitaine pour enquêter sur le Morne Dédé - un quartier de Port-au-Prince en déshérence qui connut son heure de gloire à l'époque de la dictature, lorsqu'il abritait les opposants -, elle n'est rien d'autre aux yeux du vieil homme qu'une jeune bourgeoise qui n'a connu que « des souffrances de contes de fées », l'héritière d'une longue tradition de familles opulentes ayant bâti leur fortune sur le dos des pauvres gens. Mais à ce vieillard acariâtre figé dans son fauteuil, la jeune fille offre également l'occasion de déchirer le silence, provoquant d'abord sa colère, puis parvenant peu à peu à ressusciter le grand maître d'arts martiaux qu'il a autrefois été, du temps où il se battait pour faire vivre son club, un lieu d'apprentissage, du temps où une mystérieuse élève l'avait ensorcelé et enjoint à servir « la cause », une femme dont il était tombé fou amoureux avant de la haïr. Parce qu'elle apprend, malgré elle, à poser un regard critique sur le milieu protégé dont elle est issue, où l'on se marie entre cousins pour perpétuer la couleur de peau des dominants en se frottant le moins possible aux « autres », qu'elle sait, dès lors, voir plus loin que le bout de son portail sécurisé, et peut-être parce que, à travers son grand frère Maxime, atteint de troubles psychiques, elle porte en elle l'altérité depuis sa naissance, Aude commence à faire sa place dans cet ailleurs. En la personne du vieil homme et de quelques jeunes « échoués », elle identifie un autre monde, une nouvelle humanité et, avec elle, le chemin pour faire de la vie une cause commune.
Mon avis
Ne m’appelle pas Capitaine. N’en déplaise aux poètes, mes chagrins jamais n’ont eu le pied marin. Ne m’appelle pas Capitaine. Je suis une vieille mygale, un petit crabe de terre.
Ceci est une partie du poème en première page du roman. Ce sont principalement deux personnages qui occupent les pages de ce livre, celui de Aude qui se penche sur la mémoire du passé de Capitaine, un surnom bien mérité lorsqu’on connaît son vécu. C’est une conversation inattendue entre les protagonistes dont les réponses du vieil homme sont écrites en italique, il vit dans l’un des plus vieux quartiers de la ville tombant en désuétude et rien que cela est toute une histoire, tandis que Aude vit dans un monde dominé par les préjugés et les écarts sociaux. Elle rencontre des jeunes échoués et avec eux et notre vieil acariâtre , elle va trouver le chemin pour faire de sa vie une utilité. Un très bon livre , une belle littérature comme sait s’y bien nous offrir Lyonel Trouillot…. 4,5/5
lalyre- Grand sage du forum
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Emploi/loisirs : jardinage,lecture
Genre littéraire préféré : un peu de tout,sauf fantasy et fantastique
Date d'inscription : 07/04/2010
[Trouillot, Lyonel] Ne m'appelle pas Capitaine
Mon avis :
Pour une ou deux raisons, ce roman n'est pas tout à fait un coup de cœur, mais il n'en est pas passé loin. C'est le premier que je lis de cet auteur haïtien, je ne connaissais pas du tout son style ni ses thèmes, je l'ai acheté sur la base du titre (incroyable) et de la couverture de l'illustratrice anglaise Kemi Mai, qui est superbe (un exemple ici : https://www.kemimai.co.uk/gallery).
La confrontation de deux personnalités et de deux milieux sociaux aussi différents que ceux de Francis (alias le Capitaine, ancien champion et enseignant en arts martiaux) et de Aude, jeune fille riche qui s'est inscrite un peu par désœuvrement à un cours de journalisme par correspondance, et doit réaliser une enquête sur un quartier qu'elle ne connaît pas, du point de vue d'un témoin. Ce roman écrit d'une voix puissante et un peu folle allie l'amour des mots, du récit et des vies, de destins divers, à une étude sociologique d'un quartier de Port-au-Prince en Haïti, le Morne Dédé, presque un personnage à part entière. Le quartier est réel, et le Capitaine nous conte la déshérence sociale à mesure que les habitants quittaient les lieux, ou parfois mouraient dans les geôles de la dictature. Il est la mémoire, l'héritier généreux de toutes ces existences ignorées qu'il fait revivre dans ses monologues, héritage qui convainc Aude d'essayer autre chose, de sortir des rails pour découvrir la fraternité et une action, un travail social modeste qui prend du sens.
Le roman est plus complexe qu'il n'y paraît, car derrière l'écran de l'histoire de son quartier, Francis cache autant que possible sa propre histoire, voire son identité, car il est en soi un mystère, et l'on sent bien qu'il faut qu'il parle pour réparer. Cela se fera grâce à l'oncle d'Aude, Antoine, qui partage un passé politique commun avec Francis, et qui réconciliera la jeune fille avec elle-même, tout en l'éloignant du cercle par trop prévisible de la famille et des connaissances d'un "bon milieu". Aller au bout des mots permettra à tous de prendre un nouveau départ, et d'allumer l'espoir dans les yeux des jeunes protégés du Capitaine (sous ses airs bougons).
Un bémol pour moi, dans une construction certes virtuose mais parfois déstabilisante pour ne pas dire décousue. Lyonel Trouillot aime les mots, cela se voit, sa langue est riche et colorée, les belles formules abondent, mais comme cela arrive parfois, avec un sens de l'expression un peu systématique, un peu trop visible aussi. C'est tout de même un magnifique voyage riche en humanité, pour faire découvrir un pays meurtri, toujours résilient mais proche de l'agonie. (4,5/5)
Citations :
Ne m'appelle pas Capitaine. N'en déplaise aux poètes, mes chagrins jamais n'ont eu le pied marin. (page 13)
Le langage ne fait mal que quand il touche sa cible. (page 16)
Quand on a tout ou trop, il arrive qu'on ne sache pas qui être sinon ce que l'on a. (page 21)
Qu'est-ce qu'un être qui ne possède pas un coin à lui tout seul, un pied-à-terre interne, un quartier libre dans sa tête ? (page 26)
C'était la première fois que je parlais à des personnes d'un milieu différent du mien sans être en position de chef. (page 29)
Essayer, c'est un verbe très paresseux quand il s'agit d'actions qui relèvent de la décision. Les choses du gré ne s'essayent pas, elles se réalisent. (page 43)
De là où tu viens, les autres n'existent que lorsque vous avez quelque chose à leur prendre. (page 70)
Comment et pourquoi se rappeler lequel des deux avait appris à l'autre que l'adresse n'a pas de genre, que les jeux des enfants sont pour tous les enfants, que la lune et le soleil changent de sexe avec les langues. (page 75)
Et Capitaine, c'est notre seul lien avec autre chose que nous-mêmes. (page 109)
Pour une ou deux raisons, ce roman n'est pas tout à fait un coup de cœur, mais il n'en est pas passé loin. C'est le premier que je lis de cet auteur haïtien, je ne connaissais pas du tout son style ni ses thèmes, je l'ai acheté sur la base du titre (incroyable) et de la couverture de l'illustratrice anglaise Kemi Mai, qui est superbe (un exemple ici : https://www.kemimai.co.uk/gallery).
La confrontation de deux personnalités et de deux milieux sociaux aussi différents que ceux de Francis (alias le Capitaine, ancien champion et enseignant en arts martiaux) et de Aude, jeune fille riche qui s'est inscrite un peu par désœuvrement à un cours de journalisme par correspondance, et doit réaliser une enquête sur un quartier qu'elle ne connaît pas, du point de vue d'un témoin. Ce roman écrit d'une voix puissante et un peu folle allie l'amour des mots, du récit et des vies, de destins divers, à une étude sociologique d'un quartier de Port-au-Prince en Haïti, le Morne Dédé, presque un personnage à part entière. Le quartier est réel, et le Capitaine nous conte la déshérence sociale à mesure que les habitants quittaient les lieux, ou parfois mouraient dans les geôles de la dictature. Il est la mémoire, l'héritier généreux de toutes ces existences ignorées qu'il fait revivre dans ses monologues, héritage qui convainc Aude d'essayer autre chose, de sortir des rails pour découvrir la fraternité et une action, un travail social modeste qui prend du sens.
Le roman est plus complexe qu'il n'y paraît, car derrière l'écran de l'histoire de son quartier, Francis cache autant que possible sa propre histoire, voire son identité, car il est en soi un mystère, et l'on sent bien qu'il faut qu'il parle pour réparer. Cela se fera grâce à l'oncle d'Aude, Antoine, qui partage un passé politique commun avec Francis, et qui réconciliera la jeune fille avec elle-même, tout en l'éloignant du cercle par trop prévisible de la famille et des connaissances d'un "bon milieu". Aller au bout des mots permettra à tous de prendre un nouveau départ, et d'allumer l'espoir dans les yeux des jeunes protégés du Capitaine (sous ses airs bougons).
Un bémol pour moi, dans une construction certes virtuose mais parfois déstabilisante pour ne pas dire décousue. Lyonel Trouillot aime les mots, cela se voit, sa langue est riche et colorée, les belles formules abondent, mais comme cela arrive parfois, avec un sens de l'expression un peu systématique, un peu trop visible aussi. C'est tout de même un magnifique voyage riche en humanité, pour faire découvrir un pays meurtri, toujours résilient mais proche de l'agonie. (4,5/5)
Citations :
Ne m'appelle pas Capitaine. N'en déplaise aux poètes, mes chagrins jamais n'ont eu le pied marin. (page 13)
Le langage ne fait mal que quand il touche sa cible. (page 16)
Quand on a tout ou trop, il arrive qu'on ne sache pas qui être sinon ce que l'on a. (page 21)
Qu'est-ce qu'un être qui ne possède pas un coin à lui tout seul, un pied-à-terre interne, un quartier libre dans sa tête ? (page 26)
C'était la première fois que je parlais à des personnes d'un milieu différent du mien sans être en position de chef. (page 29)
Essayer, c'est un verbe très paresseux quand il s'agit d'actions qui relèvent de la décision. Les choses du gré ne s'essayent pas, elles se réalisent. (page 43)
De là où tu viens, les autres n'existent que lorsque vous avez quelque chose à leur prendre. (page 70)
Comment et pourquoi se rappeler lequel des deux avait appris à l'autre que l'adresse n'a pas de genre, que les jeux des enfants sont pour tous les enfants, que la lune et le soleil changent de sexe avec les langues. (page 75)
Et Capitaine, c'est notre seul lien avec autre chose que nous-mêmes. (page 109)
Dernière édition par elea2020 le Mar 5 Sep 2023 - 11:07, édité 1 fois
elea2020- Grand sage du forum
-
Nombre de messages : 5875
Age : 56
Localisation : 44
Emploi/loisirs : enseignante en reconversion
Genre littéraire préféré : dystopies et classiques, littérature russe
Date d'inscription : 02/01/2020
Re: [Trouillot, Lyonel] Ne m'appelle pas Capitaine
Sujet fusionné!
Merci de revoter Elea!
Merci de revoter Elea!
joëlle- Modérateur
-
Nombre de messages : 9709
Localisation : .
Date d'inscription : 30/09/2013
Re: [Trouillot, Lyonel] Ne m'appelle pas Capitaine
joëlle a écrit:Sujet fusionné!
Merci de revoter Elea!
Ah mince ! J'ai cherché le nom de l'auteur pourtant, il n'apparaissait pas...
elea2020- Grand sage du forum
-
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Emploi/loisirs : enseignante en reconversion
Genre littéraire préféré : dystopies et classiques, littérature russe
Date d'inscription : 02/01/2020
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