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[Kuperman, Nathalie] On était des poissons

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Message par Cannetille Mer 25 Aoû 2021 - 8:46

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Titre : On était des poissons
Auteur : Nathalie KUPERMAN
Editeur : Flammarion
Année de parution : 2021
Pages : 272


Présentation de l'éditeur :  
« Demain, gare de Lyon, départ à 9h37. T’es contente ? Je ne savais pas si j’étais contente ou pas. Je trouvais que tout allait trop vite. Je ne pourrais dire au revoir à personne, ne pourrais me réjouir quelques jours auparavant à l’idée du départ. Pourtant, j’ai répondu Oui. Parce que je sentais, peut-être pour la première fois, que ma mère n’était pas prête à écouter mes états d’âme. Papa, il est au courant ? Laisse ton père où il est. Il verrait d’un mauvais œil que je te fasse rater les derniers jours de classe. Il me ferait la morale, et la morale, je n’aime pas ça. »

Cet été-là, Agathe le passe échouée sur une plage de la Côte d’Azur au côté d’une mère dont la folle excentricité l’inquiète. Cette dernière la presse de grandir vite et la petite fille devine qu’elle a quelque chose d’urgent à lui dire. Mais quoi ? Emportée dans le sillage de cette mère-poisson, ce n’est que des années plus tard, en déroulant le souvenir à vif de ces jours pleins de bruit et de fureur, qu’elle le découvrira enfin.


Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Nathalie Kuperman est l'auteur d'une dizaine de romans parmi lesquels Nous étions des êtres vivants, Les Raisons de mon crime, La Loi Sauvage (Gallimard, 2010,2012, 2014) et Je suis le genre de fille (Flammarion, 2018) a connu un vif succès critique et public.


Avis :
Malgré l’absence de son père, parti refaire sa vie à New York, Agathe, onze ans, menait jusqu’ici une existence sereine, solidement ancrée sur l’amour fusionnel de sa mère. Mais voilà que, soudain, tout déraille. C‘est d’abord un départ précipité en vacances, avant la fin de l’année scolaire, destination la Côte d’Azur, là où précisément a grandi cette mère devenue subitement si agitée et si imprévisible qu’Agathe ne la reconnaît plus. Pour la fillette, le séjour tourne au cauchemar. Car, en plus de ses nouveaux comportements inquiétants, excentriques et incompréhensibles, sa mère, soufflant le chaud et le froid sans répit, s’est mise à faire preuve à son égard d’une méchanceté à couper le souffle.

Il y avait bien eu des signaux faibles, décelables a posteriori, de la fragilité d’Alice, trop inquiète et appliquée dans son rôle maternel, elle qui n’avait pas eu de modèle entre un père inconnu, une mère morte en couches, et une grand-mère sans amour contrainte de l’élever. Sans doute que tout aurait pu continuer sans accroc, si un abandon supplémentaire, celui du divorce, n’était venu saper un peu plus le vulnérable équilibre de cette femme écorchée vive. En tout cas, tout se passe comme si le retour d’Alice en terre natale ressemblait à une régression dans l’enfance, un pèlerinage destiné à lui rappeler combien elle a toujours été indigne d’amour. Et d’ailleurs, elle qui n’a jamais su se faire aimer, comment pourrait-elle mériter l’affection de sa fille ? Celle-ci ne voit-elle donc pas comme sa mère est mauvaise et minable ? Faut-il lui ouvrir les yeux, méchanceté après méchanceté ?

Pour Agathe, bien sûr, les névroses maternelles restent totalement incompréhensibles, et, entre révolte et soif d’affection, l’enfant est prête à tout pour retrouver l’amour de sa mère. Plus celle-ci régresse vers ses blessures d’enfance, plus la fillette se retrouve propulsée dans des responsabilités d’adulte, dans une sorte d’inversion des rôles dont on pressent bien qu’il n’en sortira rien de bon. Autour de ce duo chaotique de « je t’aime, moi non plus », gravitent avant tout les fantômes des absents, père, mari, mère et grand-mère, et une poignée de témoins ahuris et impuissants, qui ne pourront que constater l’effrayante et déconcertante auto-destruction de cette mère, sous le regard de sa fille.

D'emblée saisi d’inquiétude, le lecteur, souvent heurté par la cruauté d’Alice, ne peut que compatir au très juste et touchant personnage d’Agathe, par les yeux de qui se déroule toute la narration. Croquée dans ses complexités et ses déséquilibres, la mère demeure déconcertante, provocant même un sentiment de malaise. Fusionnelle ou cruelle, elle inquiète plus qu’elle n’émeut, pour s’avérer infiniment toxique. L’on ressort de cette lecture troublé et dérangé, la tête pleine de questions et de craintes quant à l’avenir d’Agathe : sera-t-elle victime à son tour du terrible héritage des femmes de sa famille ? (4/5)
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