[Joy, David] Les deux visages du monde

Titre : Les deux visages du monde
auteur : David Joy
éditeur : Sonatine
Nombre de pages : 432 pages

Présentation de l’éditeur :

Après quelques années passées à Atlanta, Toya Gardner, une jeune artiste afro-américaine, revient dans la petite ville des montagnes de Caroline du Nord d’où sa famille est originaire. Déterminée à dénoncer l’histoire esclavagiste de la région, elle ne tarde pas à s’y livrer à quelques actions d’éclat, provoquant de violentes tensions dans la communauté. Au même moment, Ernie, un policier du comté, arrête un mystérieux voyageur qui se révèle être un suprémaciste blanc. Celui-ci a en sa possession un carnet dans lequel figurent les noms de notables de la région. Bien décidé à creuser l’affaire, Ernie se heurte à sa hiérarchie. Quelques semaines plus tard, deux crimes viennent endeuiller la région. Chacun va alors devoir faire face à des secrets enfouis depuis trop longtemps, à des mensonges entretenus parfois depuis plusieurs générations.

Mon avis :

C’est la première fois que je lis un roman de David Joy, la première, et pas la dernière. J’ai en effet lu un livre fort, qui marque, qui laisse des traces, et qui amène à s’interroger. Si tel était le but de l’auteur, je dois dire que c’est particulièrement réussi.
L’action se passe dans une petite communauté de Caroline du Nord. Tout va très bien dans cette communauté absolument tout. Alors pourquoi Toya Gardner, artiste originaire de cette ville, l’oeuvre qu’elle a créée interpelle autant les habitants ? Pour moi, elle a avant tout rappelé des faits qui auraient dû choquer tout le monde – ce qui, visiblement, n’était pas le cas. Bien sûr, c’est facile pour moi d’écrire ceci, moi qui vois les faits à distance, du fond du fauteuil d’où je découvre ce récit. Je comprends la colère de Toya, j’admire son courage d’aller au bout des choses, quoi qu’il puisse lui en coûter. N’allez pas croire cependant que ses actions sont violentes – personne ne peut être blessé physiquement par ce qu’elle a fait. Psychiquement, c’est autre chose, et certains s’insurgent contre ce qu’elle a fait. A juste titre ? A mes yeux, non.

Ernie, policier de son état, est de la même trempe. Arrêter un suprémaciste blanc, visiblement pas très futé, ne lui pose aucun problème, tout comme il n’a aucun problème à comprendre très vite que quelqu’un met des bâtons dans les roues à son enquête. Une sorte de « pas de vague » à l’américaine. Sauf que deux tragédies surviennent, et je les ai reçues comme deux coups de poings dans le ventre. Ces deux actes sont très durs à lire tant ils sont réalistes, tant ils sont crédibles, possibles. Les enquêtes s’annoncent rudes, même si (et j’ai envie de dire c’est la moindre des choses) les enquêteurs veulent aller au bout des choses. Reste à savoir quel prix devra être payé. Certains se remettront-ils en cause ? Je n’en suis pas sûre. Sans vouloir trop en dire, il n’est pas facile d’accepter de prendre conscience que tout ne va pas aussi bien que l’on veut bien le croire. Alors oui, tout peut aller bien pour soi, sans que cela soit le cas pour les autres – parce que tout allait tellement bien pour soi, qu’on n’imaginait pas qu’autrui puisse souffrir de quoi que ce soit. Bref, ces deux enquêtes sont le prolongement de ce que l’oeuvre de Toya voulait montrer.