[Flynn, Gillian] Les lieux sombres

Mon avis après lecture de la version poche dans le cadre du Jury des lecteurs Le livre de poche policier 2011.

Lecture

Libby Day a 35 ans. Elle survit, dans une petite ville de l'Amérique rurale. Maussade, dépressive parfois, elle tient ou plutôt a tenu par les dons versés par les bonnes âmes. Car Libby est célèbre. Toute sa famille a été massacrée au début des années 80. L'horreur a été totale, couteau, hache, fusil, strangulation, signes sataniques tracés du sang des victimes. Elle a été la seule survivante, elle la petite rouquine de 7 ans qui a ému toute l’Amérique. Sa mère, ses deux sœurs sont mortes, il ne reste qu’elle. En fait, quelqu'un d'autre a survécu : Ben son frère qui depuis ses quinze ans purge sa perpétuité pour ce massacre. Mais cette histoire est presque oubliée maintenant et Libby pour se remettre en fonds accepte de revenir sur les « Lieux sombres » pour un groupe de détectives amateurs.

Avis

Ce livre est raconté selon deux fils. Le premier fil est Libby Day « la petite voleuse » qui a été détruite par ce massacre et vit difficilement. Elle accepte de se replonger dans cette histoire pour le compte, financier entre autres, de ce killer-club, étrange association de férus d'enquête policière qui cherchent à résoudre les grandes énigmes ou à réécrire les grandes enquêtes. Elle va donc se replonger dans l'horreur vécue plus de 25 ans après, enfin accepter de se souvenir, de regarder, de retrouver les protagonistes de l'époque. Au fur et à mesure de ses recherches, de ses découvertes, de ses doutes et de ses remises en question, va se dérouler le second fil.
Celui-là se passe en 1985, lors du Day Day, le jour de deuil, le jour du massacre. Il commence par exposer la vie de cette famille, celle difficile d'une ferme au bord de la faillite, celle impossible d'une mère seule avec quatre enfants dont le mari joueur, buveur, dealer et violent est parti et ne revient que sporadiquement pour piller les maigres ressources de la famille. La vie est difficile aussi pour Ben, 15 ans, pauvre, abaissé par son père, coincé dans un monde féminin et dont les mauvaises fréquentations le poussent au bord du gouffre. Petit à petit se dévoile l'histoire telle qu’elle s'est réellement passé.

Accompagnée, poussée par Lyle, le président de ce killer-club, Libby enquête. Elle n'est pas vraiment sympathique : menteuse, voleuse, hypocrite. Elle ne vit pas, elle surnage. Et même si elle a de bonnes raisons d'être ainsi, elle ne se prive pas de trouver toujours des excuses pour ne pas affronter la vie. Petit à petit elle commence à remettre en question son propre témoignage, accablant pour son frère. Même s'il n'est pas innocent, Ben n'est peut-être pas coupable de ce pour quoi il a été condamné.

Ce livre part de façon assez lente. Le temps que Libby se mette en route et se remette en question. Puis il accélère en se concentrant plus sur la relation des faits de 1985. On assiste là à la tragédie d’une famille à bout de nerfs qui lutte en apnée pour trouver une existence honorable. On suit ensuite Ben qui se noie dans cette vie et qui cherche l'impression d'exister, une occasion de s'affirmer. Malheureusement cela tend de plus en plus vers le glauque, sordide, pour atteindre en apothéose le grand n'importe quoi hystérique : la scène des vaches. Le personnage de Diondra est vraiment malsain également. Cette partie du livre est désagréable et j'ai failli abandonner là. Mais la question de la solution était toujours là et m’a poussé à continuer. Passé la scène du massacre, dure, cela se calme.
Le style de l'auteur et fluide, agréable sans rien de remarquable ni en bien ni en mal. L'auteur (Gillian est un prénom féminin) pêche à mon avis dans la caractérisation des lieux et des personnages. Je me suis toujours dans ce livre senti un peu extérieur, sans jamais pouvoir mettre d'images sur les lieux où les personnages. Même Libby que l’on suit longtemps est restée quelqu'un de mal défini. Cela donne d’un côté un certain mystère puisque l’on sent que tout n'a pas encore été révélé mais crée aussi une distanciation qui empêche de réellement s'impliquer dans l'histoire.
La conclusion est pourtant assez surprenante mais bien conduite puisque tous les éléments étaient en possession du lecteur pour aboutir à la bonne conclusion.

Conclusion

Une histoire bien menée mais sordide, noire, sans espoir, des personnages qui restent des étrangers, rendent ce livre assez désagréable malgré l'écriture solide. Une bonne lecture cependant.

Ma note 13.5 sur 20