[Coetzee, John Maxwell] L'homme ralenti
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Votre avis sur "L'homme ralenti"
[Coetzee, John Maxwell] L'homme ralenti
Challenge Nobel 2011 (Nobel explosif) - John Maxwell Coetzee (Afrique du Sud) a été élu Prix Nobel de littérature en 2003
Genre : Roman
Editions : Seuil
ISBN : 2-02-081699-7
272 pages
Quatrième de couverture :
Genre : Roman
Editions : Seuil
ISBN : 2-02-081699-7
272 pages
Quatrième de couverture :
Vol plané au ralenti après le choc initial et retombée brutale sur le bitume d'un carrefour d'Adélaïde : mis à bas de son vélo par un jeune chauffard puis amputé d'une jambe, le sexagénaire Paul Rayment reprend connaissance d'un moi diminué sur son lit d'hôpital. Il refuse l'équilibre factice d'une prothèse, s'empêtre dans ses béquilles. Il lui faut désormais une auxiliaire de vie pour veiller au ménage et soigner le moignon.
Marijana Jokic, l'immigrée croate, s'acquitte au mieux de sa tâche, mais ranime, à son corps défendant, le coeur en souffrance de Paul Rayment. Il va jusqu'à offrir de prendre tous les Jokic sous son aile. À la réalité inerte d'un membre artificiel, Paul substitue la chimère d'une famille fantôme qui prolongerait son monde rétréci.
C'est alors qu'Elizabeth Costello frappe à sa porte. Prompt à le rappeler à l'ordre, ce double féminin bavard, intempestif et omniprésent s'acharne sans relâche à élaborer une fiction d'un homme amoindri et indûment épris qui aborde la vieillesse.
La vie passée du jeune garçon transplanté d'Europe en Australie et le progrès difficile vers l'âge d'homme, entre deux langues et deux cultures, font place, dans la dignité précairement conservée et avec un humour résigné, à un questionnement sur le crépuscule qui nous attend.
Mon avis : Marijana Jokic, l'immigrée croate, s'acquitte au mieux de sa tâche, mais ranime, à son corps défendant, le coeur en souffrance de Paul Rayment. Il va jusqu'à offrir de prendre tous les Jokic sous son aile. À la réalité inerte d'un membre artificiel, Paul substitue la chimère d'une famille fantôme qui prolongerait son monde rétréci.
C'est alors qu'Elizabeth Costello frappe à sa porte. Prompt à le rappeler à l'ordre, ce double féminin bavard, intempestif et omniprésent s'acharne sans relâche à élaborer une fiction d'un homme amoindri et indûment épris qui aborde la vieillesse.
La vie passée du jeune garçon transplanté d'Europe en Australie et le progrès difficile vers l'âge d'homme, entre deux langues et deux cultures, font place, dans la dignité précairement conservée et avec un humour résigné, à un questionnement sur le crépuscule qui nous attend.
Ce livre m’a à la fois ennuyée et profondément intriguée. Curieuse combinaison, n’est-il pas ?
Il faut bien l’admettre, sorti des dix premières pages - l’accident, l’hôpital - il ne se passe pas grand chose. Paul Rayment se traîne du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil et puis du lit au lit (je nie tout plagiat d’un quelconque chanteur belge). Non que son accident l’ait diminué au point de le rendre impotent : c’est plutôt la perception qu’il a de sa nouvelle infirmité qui le paralyse. Pour couronner le tout, l’accident l’a persuadé de la vacuité de sa propre vie : plus de femme, pas d’enfant, peu d’amis, des centres d’intérêt vieillots...
Pas facile de rendre attachant un vieillard unijambiste et grognon, confit dans ses regrets et ses souvenirs nostalgiques. J. M. Coetzee y parvient pourtant avec beaucoup de talent, mettant l’accent sur la lucidité et le sympathique cynisme du personnage. Les descriptions effarées qu’il nous offre de sa première infirmière sont notamment hilarantes. Quant à ses monologues bougons, entre caprice de gosse et ronchonnement de vieillard, adressés aux autres ou à lui-même, leur style haché et bondissant est d’un réalisme saisissant.
C’est ainsi que, tour à tour pitoyable, agaçant, amusant, admirable, Paul Rayment acquiert une personnalité, une réalité. Il devient alors difficile, sinon impossible, de se désintéresser de son sort, aussi peu palpitant soit-il.
Et, disons-le tout net, se préoccuper de son sort revient à avoir une folle envie de lui coller des baffes. On se demande en effet comme un homme peut être à la fois aussi lucide sur ses erreurs et ses lâchetés passées, et aussi désireux de les répéter sous une autre forme. Son manque d’engagement et de courage l’ont conduit au célibat et privé d’héritiers, sa froideur qui ressemble trop à de l’arrogance l’a éloigné de ses amis.
Pourtant, s’engage-t-il franchement auprès de Marijana ou de Marianna ? Que non. Quant à Elizabeth Costello, il préfère la considérer uniquement comme une vieille empêcheuse de tourner en rond, sans jamais accepter la main qu’elle lui tend.
Un passage résume, à mon sens, cette ridicule obstination.
« Il fut un temps où tout ça était nouveau, dit-il [...]. Même moi. [...] Et puis le temps sur moi a fait son oeuvre. Comme il fera son oeuvre sur toi. Le temps te rongera, Drago. Un jour, dans ta jolie petite maison neuve, avec ta jolie petite femme toute neuve, ton fils se retournera vers vous deux et dira : Pourquoi est-ce que vous êtes si vieux jeu ? Quand ce jour viendra, j’espère que tu te souviendras de notre conversation. »
Drago avala une dernière bouchée de risotto, une dernière bouchée de salade.
« On est allés en Croatie à Noël dernier, dit-il, moi et ma mère et mes soeurs. A Zadar. c’est là que les parents de ma mère habitent. Il sont assez vieux maintenant. Eux-aussi, comme vous dites, sont dépassés par leur époque. Ma mère leur a acheté un ordinateur et on leur a montré comment s’en servir. Et maintenant ils peuvent faire leurs courses sur l’Internet, ils peuvent envoyer des e-mails, et on peut leur envoyer des photos. Ca leur plaît. Et ils sont plutôt vieux.
- Et alors ?
- Alors vous avez le choix, dit Drago. C’est tout ce que je dis
Ce roman est un voyage lent et contemplatif dans la vie de Paul Rayment, voyage dont les étapes sont les choix - conscients ou non - qui ont influencé son destin, bien plus lourdement que cet accident sur lequel il se lamente.
Une bonne occasion de s’interroger sur le sens de la vie, tout en se laissant bercer par un style soigné et une histoire plaisante.
Ma note : 6,5/10Il faut bien l’admettre, sorti des dix premières pages - l’accident, l’hôpital - il ne se passe pas grand chose. Paul Rayment se traîne du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil et puis du lit au lit (je nie tout plagiat d’un quelconque chanteur belge). Non que son accident l’ait diminué au point de le rendre impotent : c’est plutôt la perception qu’il a de sa nouvelle infirmité qui le paralyse. Pour couronner le tout, l’accident l’a persuadé de la vacuité de sa propre vie : plus de femme, pas d’enfant, peu d’amis, des centres d’intérêt vieillots...
Pas facile de rendre attachant un vieillard unijambiste et grognon, confit dans ses regrets et ses souvenirs nostalgiques. J. M. Coetzee y parvient pourtant avec beaucoup de talent, mettant l’accent sur la lucidité et le sympathique cynisme du personnage. Les descriptions effarées qu’il nous offre de sa première infirmière sont notamment hilarantes. Quant à ses monologues bougons, entre caprice de gosse et ronchonnement de vieillard, adressés aux autres ou à lui-même, leur style haché et bondissant est d’un réalisme saisissant.
C’est ainsi que, tour à tour pitoyable, agaçant, amusant, admirable, Paul Rayment acquiert une personnalité, une réalité. Il devient alors difficile, sinon impossible, de se désintéresser de son sort, aussi peu palpitant soit-il.
Et, disons-le tout net, se préoccuper de son sort revient à avoir une folle envie de lui coller des baffes. On se demande en effet comme un homme peut être à la fois aussi lucide sur ses erreurs et ses lâchetés passées, et aussi désireux de les répéter sous une autre forme. Son manque d’engagement et de courage l’ont conduit au célibat et privé d’héritiers, sa froideur qui ressemble trop à de l’arrogance l’a éloigné de ses amis.
Pourtant, s’engage-t-il franchement auprès de Marijana ou de Marianna ? Que non. Quant à Elizabeth Costello, il préfère la considérer uniquement comme une vieille empêcheuse de tourner en rond, sans jamais accepter la main qu’elle lui tend.
Un passage résume, à mon sens, cette ridicule obstination.
« Il fut un temps où tout ça était nouveau, dit-il [...]. Même moi. [...] Et puis le temps sur moi a fait son oeuvre. Comme il fera son oeuvre sur toi. Le temps te rongera, Drago. Un jour, dans ta jolie petite maison neuve, avec ta jolie petite femme toute neuve, ton fils se retournera vers vous deux et dira : Pourquoi est-ce que vous êtes si vieux jeu ? Quand ce jour viendra, j’espère que tu te souviendras de notre conversation. »
Drago avala une dernière bouchée de risotto, une dernière bouchée de salade.
« On est allés en Croatie à Noël dernier, dit-il, moi et ma mère et mes soeurs. A Zadar. c’est là que les parents de ma mère habitent. Il sont assez vieux maintenant. Eux-aussi, comme vous dites, sont dépassés par leur époque. Ma mère leur a acheté un ordinateur et on leur a montré comment s’en servir. Et maintenant ils peuvent faire leurs courses sur l’Internet, ils peuvent envoyer des e-mails, et on peut leur envoyer des photos. Ca leur plaît. Et ils sont plutôt vieux.
- Et alors ?
- Alors vous avez le choix, dit Drago. C’est tout ce que je dis
Ce roman est un voyage lent et contemplatif dans la vie de Paul Rayment, voyage dont les étapes sont les choix - conscients ou non - qui ont influencé son destin, bien plus lourdement que cet accident sur lequel il se lamente.
Une bonne occasion de s’interroger sur le sens de la vie, tout en se laissant bercer par un style soigné et une histoire plaisante.
Invité- Invité
Re: [Coetzee, John Maxwell] L'homme ralenti
J'aime beaucoup la façon dont est tourné ton avis. Et malgré tout, tu me donnes envie de m'intéresser à ce livre. Tout en sachant que ce ne sera sûrement pas un coup de coeur, cela m'a intrigué.
Invité- Invité
Re: [Coetzee, John Maxwell] L'homme ralenti
Merci, contente d'avoir éveillé ta curiosité .
Invité- Invité
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