[Vian, Boris] L'arrache-coeur

Éditeur : Le livre de Poche
Publication : 1968
Nombre de pages : 243 pages

Résumé :

Clémentine met au monde des triplés. Mais la souffrance que lui a infligé cette grossesse et ces naissances la poussent à ne plus adresser la parole à son mari, Angel. Elle l'empêche ensuite de participer à l'éducation des enfants. Clémentine reporte alors sur ses enfants son besoin d'aimer, et est hantée par l'idée qu'il pourrait leur arriver quelque chose. Pour lutter, elle arrache les arbres du jardin, se créant une sorte de 'mur de protection'. .. Mais nous, qui restons sur la rive, nous voyons que Boris Vian décrit simplement notre monde. En prenant chacun de nos mots habituels au pied de la lettre, il nous révèle le monstrueux pays qui nous entoure, celui de nos désirs les plus implacables, où chaque amour cache une haine, où les hommes rêvent de navires, et les femmes de murailles.

Mon avis :

Certes, l'histoire est amusante car les personnages sont totalement déjantés et les situations qu'ils vivent n'ont (plus ou moins) ni queue ni tête. Ajoutons à ça le vocabulaire de Boris Vian franchement charretier qui me plaisait plutôt pas mal et on obtient un premier a priori plutôt positif.
Car j'avoue avoir particulièrement apprécié les passages où le curé apparaît et où Vian le fait parler et agir de manière totalement sacrilège, utilisant un champs lexical absolument indigne d'un homme de religion, ceci dans des situations plus que burlesques voire cocasses et le tout sans la moindre once de culpabilité aucune !
Mais malheureusement, ce sont bien les seuls passages qui m'ont fait beaucoup rire et apprécier ma lecture.

En effet, pour rentrer dans l'histoire, il faut être capable de totalement se déconnecter des repères habituels de lecture et d'écriture. L'univers créé par Vian m'a vraiment déroutée car il était à la fois imaginaire (comme c'est le cas en science-fiction, ça aurait pu me plaire si ça n'avait été que ça) mais surtout absolument loufoque et sans cohésion. Il n'y a pas spécialement de cohérence entre les événements qui se déroulent, il n'y a pas d'objectif particulier au livre, du moins moi je ne l'ai pas trouvé, et il n'y a pas particulièrement de logique dans la psychologie des personnages. Je me sentais comme embarquée sur un petit bateau sans voile au milieu de l'océan, sans savoir où j'allais ni pourquoi. Paumée, quoi. Et cette sensation m'a déplu.

De fait, si on aime ce style, Vian sachant quand même, avouons-le, parfaitement manier les mots, on peut aimer. Mais en ce qui me concerne, ce tout petit livre m'a pris vraiment du temps à lire et ne m'a pas du tout incitée à lire autre chose de lui.

Je n'ai encore jamais lu cet auteur, de peur à ce que je n'accroche pas à son écriture et qu'elle me soit trop complexe.

Belle critique explicite !

J'ai lu "L'écume des jours" et je n'ai pas du tout aimé. Le style de l'auteur n'est pas de mon goût...

Très étrange ce roman...
Les thèmes abordés sont intéressants: la folie protectrice de la mère qui finit par emprisonner ses enfants pour les protéger de tout danger, la cruauté de la société qui soulage sa conscience en faisant porter sa honte à un seul homme, la liberté de s'évader par l'esprit même lorsqu'on est en cage.
Mais je n'ai pas vraiment accroché, je ne saurais pas dire pourquoi.

Vian est mon auteur préféré.
J'adore plus que tout sa façon de manier la langue, et aussi sa fantaisie et son univers. Je me régale à chaque phrase et j'ai toujours envie de les lire tout haut aux personnes qui m'entourent.

L'arrache-coeur est le premier roman que j'ai lu de lui. J'y ai découvert ses provocations, son inventivité et sa façon de remanier les figures de style littéraires, de créer des mots, des phrases, des enchaînements inattendus, et ce goût de l'absurde (jusque dans les dates et la numérotation des chapitres).
J'ai vraiment aimé ce roman sur la forme, mais également sur le fond. Cette population ingrate, cruelle, bête et méchante qui se déleste de tout sentiment de honte sur une pauvre victime, ce curé des plus impies, ce Citroën fourbe et cette maman tordue, je les ai adorés. C'est une belle satire de la société. Les thèmes de la sur-protection des enfants, du bouc-émissaire, de la foi religieuse "intéressée" ou de la psychanalyse sont traités de façon intelligente et farfelue à la fois.
C'est vrai qu'il y a des passages presque dérangeants mais j'ai pris le parti d'en rire et du coup, j'ai beaucoup ri !

J'ai relu l'arrache-cœur le mois dernier, j'y ai pris autant de plaisir que la première fois. Ce n'est pas le chef-d'oeuvre de Vian, il ne procure pas l'émotion de l’Écume des jours par exemple, mais c'est un roman qui lui ressemble énormément et on y sent le plaisir de l'écriture à chaque ligne.

Je recommande à ceux qui le liront de ne pas chercher à tout prix la cohérence ou le fil d'Ariane, le livre "se perd" volontairement au fil des pages. Il faut se laisser emporter par le style, l'humour, la légèreté... la prise conscience et la réflexion plus "profondes" viendront toutes seules.

C'est le dernier livre que j'ai lu de Boris Vian, après J'irai cracher sur vos tombes et L'écume des jours.

J'avoue que c'est celui que j'ai mis, des trois, le plus de temps à lire et celui que j'ai le moins apprécié. Le style de Vian est bien là mais il m'a manqué ce petit truc qui me fait vraiment adorer d'habitude et qui était absent dans celui-ci. Pour autant, j'ai quand même apprécié, mais moins que les autres !