[Proust, Marcel] Le Temps Retrouvé

Auteur : Marcel Proust
Édition : Folio Classique
Nombre de pages : 353

Quatrième de couverture :
Les parties blanches de barbes jusque-là entièrement noires rendaient mélancoliques le paysage humain de cette matinée, comme les premières feuilles jaunes des arbres alors qu'on croyait encore pouvoir compter sur un long été, et qu'avant d'avoir commencé d'en profiter on voit que c'est déjà l'automne. Alors moi qui depuis mon enfance, vivant au jour le jour et ayant reçu d'ailleurs de moi-même et des autres une impression définitive, je m'aperçus pour la première fois, d'après les métamorphoses qui s'étaient produites dans tous ces gens, du temps qui avait passé pour eux, ce qui me bouleversa par la révélation qu'il avait passé aussi pour moi. Et indifférente en elle-même, leur vieillesse me désolait en m'avertissant des approches de la mienne.

Mon avis :
Dernier tome de la célèbre série "A la Recherche du Temps Perdu", cette œuvre m'a donné du fil à retordre pour la lecture, mais aussi beaucoup de plaisir, contradictoire dans ce labeur.

Laborieuse, parce que comme le reste des écrits de Proust, les phrases sont longues, alambiquées, partent parfois dans tous les sens. Mais aussi parce que, dans ce dernier tome, j'ai trouvé que l'histoire -si l'on peut vraiment dire qu'histoire il y a : en 300 pages, il n'y a en fait que 3 ou 4 scènes en tout et pour tout !!!- était elle aussi difficile à suivre. En fait, il se trouve qu'elle passe au second plan : ce qui compte, c'est la pensée de l'auteur, sa conclusion après les aventures des précédents tomes, ce qu'il doit tirer de toute sa vie, en quelque sorte. Cette longue philosophie est assez difficile à digérer, surtout que Proust a tendance à s'éloigner du sujet principal en sautant de thème en thème... Et quand on revient au début on ne sait plus très bien pourquoi il nous a parlé de tout cela... Comparé par exemple à un Amour de Swann, au début de A la Recherche du Temps Perdu, Le Temps Retrouvé est beaucoup moins trépidant, plus chargé -hé oui, c'est possible- en descriptions et en anecdotes... Bref, je me suis plus ennuyée, c'est dommage...

Mais tout de même, qu'on se le dise : Proust reste un génie. Même dans cette œuvre, on a cette écriture fine, cette incroyable analyse de sa société et de ce qu'il entoure. Finalement, la difficulté de l'avoir lu en entier (j'ai quand même mis plus de quatre mois...) est à la fin récompensée par les 20 dernières pages, que j'ai trouvées magiques et qui m'ont fait penser : "Ah, tu vois que tu as bien fait de t'accrocher !!" J'avoue que je n'attendais pas cette fin que j'ai trouvé merveilleuse. Je ne vous la raconte pas, je vous laisse la découvrir.

Parce que lire un Proust, ça relève un peu de l'exploit sur le moment... mais à la fin, c'est un enrichissement inattendu et une fierté qui vous grandit.

Et il n'y a pas beaucoup de livres comme ça...

Il paraît que parmi les lecteurs ayant achevé "Du côté de chez Swann", seule la moitié s'aventure dans les "Jeunes filles en fleurs", et qu'une moitié encore de ces courageux attaque le troisième tome de la Recherche. Mais à ce stade-là, plus personne n'abandonne : on est happé par le récit, en haleine jusqu'au "Temps retrouvé", et alors quelle apothéose ! Quel plaisir de lecteur !