[Pessan, Eric] Muette
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[Pessan, Eric] Muette
Titre : Muette
Auteur : Eric Pessan
Éditions : Albin Michel
Collection : littérature générale
224 pages
ISBN : 9782226249708
Quatrième de couverture
« La nuit, déjà, et Muette écoute vibrer les insectes, glissée jusqu’au nez dans son sac de couchage. Elle a chaud mais ne peut se résoudre à se découvrir. Dehors, dans le grand monde, des gens courent à sa recherche, elle n’a plus de doute à ce sujet. Elle y est. Elle a grand ouvert les portes de sa vie. »
Par sa maîtrise de la langue au plus près des émotions, des impulsions et des souvenirs d’une jeune fugueuse, Eric Pessan, l’auteur d’Incident de personne, compose un roman envoûtant et d’une rare justesse pour évoquer la mue mystérieuse de l’adolescence.
Mon avis
« Qu’il suffise d’un cachet pour oublier sa propre vie… »
Nous voici partie dans l’univers de Muette avec une écriture à deux voix, le narrateur d’une part et en italiques, de temps à autre, les remarques des parents de cette jeune fille. Vous savez le genre de choses qu’on dit devant un enfant en pensant qu’il ne comprend pas, de toute façon, la portée des mots employés….
Ces réflexions destructrices, réductrices qui empêchent de grandir en toute sérénité….
«…. tu vas finir par nous faire mourir de chagrin… »
Alors Muette fuit…dans sa tête puis dehors et encore dans sa tête….
Muette fuit parce qu’elle est transparente devant les adultes et pourtant….
« Muette, c’est juste une question de silence, d’extrême retenue et de regard qu’il n’est jamais possible d’accrocher. »
si on se penchait sur elle, peut-être que ses yeux se noieraient dans le regard de l’autre….
Le style haché, morcelé donne l’impression qu’il faut « parler » vite, très vite pour expliquer le malaise, le mal-être …
Un peu comme s’il suffisait de mettre des mots sur la douleur pour qu’elle soit moins vibrante…
On voudrait communiquer avec Muette, s’approcher, lui tendre la main et l’apprivoiser comme le renard du Petit Prince….
Cassiopée- Admin
-
Nombre de messages : 16860
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Emploi/loisirs : enseignante
Genre littéraire préféré : un peu tout
Date d'inscription : 17/04/2009
Re: [Pessan, Eric] Muette
Des extraits de ce roman seront lus samedi dans le cadre "lecture d'hiver" à la bibliothèque de mon quartier.
Invité- Invité
Re: [Pessan, Eric] Muette
Une lecture poignante, la comédienne a donné l'envie de découvrir cet auteur à tous les participants.
Invité- Invité
Re: [Pessan, Eric] Muette
Mon avis :
Il n’est pas facile de rédiger cet avis, non parce que je n’ai pas aimé ce livre, bien au contraire, mais parce que je risque de déborder, et de parler de choses qui n’ont rien à voir avec la littérature.
D’Eric Pessan, j’ai déjà lu Incident de personne, que j’ai moyennement aimé. Rien de tel ici : l’auteur donne la parole à Muette, une jeune fille que personne n’écoute et qui décide de fuguer. Oh, elle ne va pas très loin, non, avec ses quelques affaires et ses maigres économies, elle se rend dans une grange, non loin de sa maison, finalement, là où elle est sûre que personne ne pensera à la chercher. Si tant est que quelqu’un la cherche.
Le sujet de ce livre est la maltraitance invisible, celle qui ne laisse pas de traces mais qui meurtrit autant que les coups. Entre adultes, on appelle cela du "harcèlement moral". Existe-t-il un terme pour désigner ce rabaissement perpétuel que les parents font subir à Muette ?
Muette n’a pas de prénom, ou plutôt si, elle en a un : celui de sa grand-mère, que sa mère n’a pu enterrer parce que Muette est née, avec trois semaines d’avance. Le lui a-t-on assez répété, cette histoire. Lui a-t-on assez dit du mal de sa mère, une Marie-Couche-Toi-là, une fille qui a fait mourir sa propre mère de chagrin. Ce tableau est criant de vérité, même en 2014. Il suffit juste de tendre l’oreiller, de regarder ce qui se passe dans cette France profonde, ou dans les collèges et lycées.
[J'ouvre d'ailleurs une belle parenthèse : Muette s'étonne que sa mère ait pu tomber enceinte à notre époque, alors que les moyens de contraception existent, que des séances de prévention sont organisés dans les collèges et les lycées. Pour ma part, je répondrai par des propos d'adolescentes, qui disent que trouver l'adresse d'un planning familial et s'y rendre, c'est compliqué quand on vit à la campagne, que la contraception est peut-être gratuite, mais apparaît sur les décomptes de sécurité sociale de leurs parents. J'ajoute que, le plus souvent, ce sont les grandes soeurs qui accompagnent les petites soeurs en consultation, pas leur mère. J'ajoute aussi que de trop nombreuses émissions glorifient les mamans ados, qui a seize ans ont voulu devenir mères parce qu'elles étaient prêtes. Elles n'ont pas de travail, pas de logement, parfois plus de copains, mais sont très fières parce qu'elles ont un diplôme qui ne se dévaluera pas, un métier où il n'y a pas de chômage : maman. ]
D’un côté, nous avons les pensées, les souvenirs de Muette, qui se succèdent très rapidement comme si elle savait que le temps lui était compté. Les souvenirs heureux, aussi, de sa toute petite enfance. Puis, tous les autres, alors que les reproches pleuvent sur elle, alors que ses parents ne font plus que se plaindre, faire les comptes, tenter de survivre – en reprochant toujours à leur fille d’être là et de leur coûter trop cher . [discours toujours audible en 2014 de la part de certains parents]. En italique, les fameuses petites phrases assassines de ses parents, sa parole, toujours remise en cause.
Savourons ces moments où Muette est libre, enfin, où elle est heureuse dans la nature qui l’entoure. Il n’y a que dans les séries télévisées grand public que ces histoires de famille trouvent une fin heureuse.
Il n’est pas facile de rédiger cet avis, non parce que je n’ai pas aimé ce livre, bien au contraire, mais parce que je risque de déborder, et de parler de choses qui n’ont rien à voir avec la littérature.
D’Eric Pessan, j’ai déjà lu Incident de personne, que j’ai moyennement aimé. Rien de tel ici : l’auteur donne la parole à Muette, une jeune fille que personne n’écoute et qui décide de fuguer. Oh, elle ne va pas très loin, non, avec ses quelques affaires et ses maigres économies, elle se rend dans une grange, non loin de sa maison, finalement, là où elle est sûre que personne ne pensera à la chercher. Si tant est que quelqu’un la cherche.
Le sujet de ce livre est la maltraitance invisible, celle qui ne laisse pas de traces mais qui meurtrit autant que les coups. Entre adultes, on appelle cela du "harcèlement moral". Existe-t-il un terme pour désigner ce rabaissement perpétuel que les parents font subir à Muette ?
Muette n’a pas de prénom, ou plutôt si, elle en a un : celui de sa grand-mère, que sa mère n’a pu enterrer parce que Muette est née, avec trois semaines d’avance. Le lui a-t-on assez répété, cette histoire. Lui a-t-on assez dit du mal de sa mère, une Marie-Couche-Toi-là, une fille qui a fait mourir sa propre mère de chagrin. Ce tableau est criant de vérité, même en 2014. Il suffit juste de tendre l’oreiller, de regarder ce qui se passe dans cette France profonde, ou dans les collèges et lycées.
[J'ouvre d'ailleurs une belle parenthèse : Muette s'étonne que sa mère ait pu tomber enceinte à notre époque, alors que les moyens de contraception existent, que des séances de prévention sont organisés dans les collèges et les lycées. Pour ma part, je répondrai par des propos d'adolescentes, qui disent que trouver l'adresse d'un planning familial et s'y rendre, c'est compliqué quand on vit à la campagne, que la contraception est peut-être gratuite, mais apparaît sur les décomptes de sécurité sociale de leurs parents. J'ajoute que, le plus souvent, ce sont les grandes soeurs qui accompagnent les petites soeurs en consultation, pas leur mère. J'ajoute aussi que de trop nombreuses émissions glorifient les mamans ados, qui a seize ans ont voulu devenir mères parce qu'elles étaient prêtes. Elles n'ont pas de travail, pas de logement, parfois plus de copains, mais sont très fières parce qu'elles ont un diplôme qui ne se dévaluera pas, un métier où il n'y a pas de chômage : maman. ]
D’un côté, nous avons les pensées, les souvenirs de Muette, qui se succèdent très rapidement comme si elle savait que le temps lui était compté. Les souvenirs heureux, aussi, de sa toute petite enfance. Puis, tous les autres, alors que les reproches pleuvent sur elle, alors que ses parents ne font plus que se plaindre, faire les comptes, tenter de survivre – en reprochant toujours à leur fille d’être là et de leur coûter trop cher . [discours toujours audible en 2014 de la part de certains parents]. En italique, les fameuses petites phrases assassines de ses parents, sa parole, toujours remise en cause.
Savourons ces moments où Muette est libre, enfin, où elle est heureuse dans la nature qui l’entoure. Il n’y a que dans les séries télévisées grand public que ces histoires de famille trouvent une fin heureuse.
Sharon- Modérateur
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Localisation : Normandie
Emploi/loisirs : professeur
Genre littéraire préféré : romans policiers et polars
Date d'inscription : 01/11/2008
Re: [Pessan, Eric] Muette
Merci Cassiopée et Sharon pour vos critiques
louloute- Grand sage du forum
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Emploi/loisirs : mère au foyer
Genre littéraire préféré : thriller, historique, policier
Date d'inscription : 11/12/2009
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