[Malfatto, Emilienne] Que sur toi se lamente le Tigre
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[Malfatto, Emilienne] Que sur toi se lamente le Tigre
Titre : Que sur toi se lamente le Tigre
Auteur : Emilienne MALFATTO
Parution : 2020 (Elyzad)
Pages : 80
Présentation de l'éditeur :
Dans l'Irak rural d'aujourd'hui, sur les rives du Tigre, une jeune fille franchit l'interdit absolu : hors mariage, une relation amoureuse, comme un élan de vie. Le garçon meurt sous les bombes, la jeune fille est enceinte : son destin est scellé. Alors que la mécanique implacable s'ébranle, les membres de la famille se déploient en une ronde d'ombres muettes sous le regard tutélaire de Gilgamesh, héros mésopotamien porteur de la mémoire du pays et des hommes.
Inspirée par les réalités complexes de l'Irak qu'elle connaît bien, Emilienne Malfatto nous fait pénétrer avec subtilité dans une société fermée, régentée par l'autorité masculine et le code de l'honneur. Un premier roman fulgurant, à l'intensité d'une tragédie antique.
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Emilienne Malfatto est née en 1989. Elle a étudié en France et en Colombie et est diplômée de l'école de journalisme de Sciences Po Paris. Elle a ensuite intégré l'AFP, en France puis à Chypre. Depuis 2015, elle travaille comme journaliste et photographe indépendante, principalement en Irak. Le Prix France Info-Revue XXI lui a été décerné en 2015 pour son reportage Dernière escale avant la mec En 2019, son projet Al-Banaat, dans le sud de l'Irak, a été distingué par le Grand Prix de la photographie documentaire de l'IAFOR. Que sur toi se lamente le Tigre est son premier roman.
Avis :
Une jeune Irakienne se découvre enceinte en même temps qu’elle apprend la mort de son fiancé, tué dans un bombardement à Bagdad. Pour cette grossesse hors mariage, elle sait qu’il n’y aura pas de pardon et que la sentence familiale sera impitoyable et capitale…
Mère, frères, sœur, belle-sœur : les personnages de cette tragédie contemporaine aussi vieille que le monde s’expriment tour à tour, comme autant de jurés d’un tribunal dont l’implacable sentence est connue d’avance. Au nom de l’honneur pour les uns, en acceptation des règles et de la tradition pour les autres, qu’il approuve ou réprouve secrètement la sanction, chacun exprime un point de vue résigné, où transparaît la pesanteur d’un drame vécu comme une fatalité, dans des existences de toute façon comme écrasées par leur histoire : les femmes par leur asservissement séculaire à l’autorité masculine, tous par le corset des convenances morales et religieuses qu’ils ont intégrées comme inéluctables, et, en plus, par l’horreur d’une guerre qui fauche aveuglément ses victimes au gré de ses attentats quotidiens dans une Bagdad en ruines, contraignant les familles à fuir dans les campagnes reculées.
Comme les répons d’un office lugubre, ou comme les lamentations des choeurs d’une tragédie grecque, au couplet de chaque personnage répliquent les voix du fleuve Tigre et du héros antique Gilgamesh, théâtralisant ce drame inventé et éternellement rejoué par les humains, aveuglés par leurs passions et leur folie, incapables de se libérer des liens qu’ils ont forgés et s’imposent les uns aux autres. Impuissant et horrifié, le lecteur ressent la désespérante inéluctabilité du sort qui attend cette jeune fille, un crime auquel elle n’a aucune chance d’échapper, puisque tous, femmes et hommes, modérés ou convaincus, acceptent le poids de règles auxquelles ils préfèrent ne plus réfléchir, persuadés de n’y pouvoir rien changer.
L’habileté de la construction narrative, la sidération ressentie face aux portraits psychologiques croqués en quelques phrases fulgurantes, la vividité des évocations, le tout dans un style simple, rythmé et concis qui fait tenir le récit en moins de cent pages, font de ce petit livre une lecture choc, qui révolte autant qu’elle fait prendre la mesure de l'effrayante chape de plomb de l’obscurantisme. Il n’est pas surprenant que cet ouvrage ait été couronné du Goncourt du Premier Roman. Coup de coeur. (5/5)
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