[Jaraba, Alicia] Celle qui parle
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[Jaraba, Alicia] Celle qui parle
Celle qui parle
Alicia Jaraba (Abellán)
214 pages
Grand Angle - Bamboo Éditions
ISBN : 978-2-8189-8406-2
Alicia Jaraba (Abellán)
214 pages
Grand Angle - Bamboo Éditions
ISBN : 978-2-8189-8406-2
Résumé de l'éditeur :
“Fille d’un chef déchu, offerte comme esclave, elle est devenue l’une des plus grandes figures féminines de l’Histoire.” XVIe siècle. Malinalli est la fille d’un chef d’un clan d’Amérique centrale. Peu de temps après la mort de son père, elle est vendue à un autre clan pour travailler aux champs et satisfaire la libido de son nouveau maître.
Un jour, d’immenses navires apparaissent à l’horizon, commandés par Hernan Cortez, obsédé par la recherche d’or. Le conquistador repère Malinalli et son don pour les langues. Elle sera son interprète et un des éléments clés dans ses espoirs de conquête. Elle sera également celle qui aura le courage de dire un mot interdit aux femmes de son époque : non !
Au-delà de la légende, voici l’histoire de la Malinche, vivante, jeune, inexpérimentée, souvent dépassée par les événements, mais avant tout, humaine.
Mon avis :
Lu dans le cadre du Prix des lecteurs 2023-2024 de mon lycée.
C'est une belle découverte que cette BD, un livre imposant en format et nombre de pages, mais qui se lit comme rien. J'avais lu déjà des articles sur ce personnage féminin, qu'on dit extrêmement célèbre au Mexique : Malinilli, la Malinche ou Malintzin comme on l'appelait, ou encore doña Marina pour les Espagnols. En effet, elle servit de traductrice à Hernan Cortes et on peut considérer qu'elle aida l'armée espagnole à défaire l'Empire aztèque. Avait-elle le choix ?
Alicia Jaraba nous dépeint une jeune femme débrouillarde, qui aurait dû accéder à un rôle de notable dans son village, étant la fille d'un cacique. Elle ne manque pas de blessures déjà à un jeune âge, sa sœur ayant été enlevée par les Aztèques pour l'offrir en sacrifice humain, et son père torturé puis tué également. Sa mère vit avec un homme mesquin et machiste, Malinilli n'a que sa grand-mère pour la soutenir, grand-mère qui lui apprend les propriétés guérisseuses des plantes, après que son père lui a appris la langue nahuátl ou aztèque, elle qui parlait le dialecte de son village d'Oluta. Tout est fait comme si Malinilli devait devenir une femme forte et jouer un grand rôle dans son peuple. Sa grand-mère lui a également enseigné à respecter et honorer ses dieux, à leur demander conseil, notamment au dieu de l'eau, Tláloc, qui représentera pour toujours sa chère grand-mère, trop tôt partie. Il n'est pas anodin du reste que l'autrice ait dédié son ouvrage à sa propre grand-mère, qui lui "a raconté des choses de filles" et s'est préoccupée de "ce qu'il lui restait à souffrir", ayant le désir de le lui épargner...
Le livre est conçu d'une manière très astucieuse : chaque chapitre correspond à une région, avec la même carte en en-tête, la région ou ville concernée étant entourée pour la repérer. Rapidement on s'habitue aux différents peuples et aux langues utilisées, quoiqu'il soit clair que la situation géopolitique était compliquée. Des alliances se noueront entre certains peuples et les Espagnols, dans l'espoir de défaire les Mexicas, les Aztèques, jugés trop exigeants en tribut humain et en extorsion de vivres. Ainsi, l'habitude des femmes dans les villages est de se percher dans les arbres pour se cacher lorsque des émissaires mexicas se présentent à Olupa. La vie de Malinilli connaîtra un tournant lorsqu'elle est enlevée et vendue comme esclave. Mais elle fera des rencontres, nouera des amitiés solides, et bien sûr sera engagée par la troupe de Cortes.
En tant que traductrice, Malinilli fait de son mieux pour arrondir les angles, colmater les brèches et faire passer les Espagnols pour plus courtois qu'ils ne sont. Aux yeux des Indiennes d'ailleurs, qui sont attribuées comme compagnes à ces soudards, ils sont des bêtes puantes et peu reluisantes. Toutefois, Malinilli devient indispensable et commence à acquérir une influence sur Cortes, mais elle n'empêchera bien sûr pas certaines tueries ou pillages. Prenant de l'assurance, elle devient la "femme qui parle", donc importante, même aux yeux des caciques, ces chefs de tribus.
Le dessin et la conception des planches sont très agréables visuellement, les visages expressifs. Cette BD reliée en un gros volume est un bel objet, mais je l'ai trouvée un peu creuse, ou du moins pas aussi aboutie qu'elle aurait pu l'être dans le scénario : par exemple, l'autrice elle-même mentionne que Malintzin n'était pas toujours bien considérée par son peuple, cela n'est pas très développé dans l'histoire. J'ai aimé cependant que les langues soient montrées comme des gribouillages compliqués dans les bulles avant qu'elle puisse les comprendre ou qu'on les lui traduise. Il apparaît que se comprendre est un désir universel, et que de bonnes volontés y parviennent, même lorsque d'âpres intérêts sont en jeu. Il n'est pas surprenant non plus que la vie des femmes soit, à de rares exceptions près, considérée comme un simple objet de troc - et on imagine sexuellement... ! Pour finir, peut-être que le fait d'accuser cette traductrice indienne de traîtrise à son peuple est une question d'aujourd'hui plaquée sur le passé sans que cela fasse vraiment sens. 4,5/5
Citations :
- Il faut que tu demandes aussi pour la vie et pour la fleuraison. T'es presque une femme Malinalli !
- Mais... Mamie !!!
- Quoi ?! L'eau est la vie ! Hi hi...
J'avais oublié, elle adore parler de ça aussi. (page 20)
- Grand cacique, en plus, le capitaine vous demande d'accepter leur dieu.
- Un dieu de plus ne fera pas de mal... (page 131)
- Je ne sais pas qui c'est, doña Marina. Je ne suis pas l'une des vôtres. Et les miens me méprisent, car j'ai fait du mal aux dieux... (page 158)
- Et dites... Elle appartient à qui, cette voix qui parle et traduit ?
Vous prenez la parole, vous êtes donc sûrement une femme très respectable.
- Je... Je m'appelle Malinalli, grand cacique.
- On pourra enfin faire face aux Mexicas, alors... Merci... "Malintzin".
- Il a dit quoi ? Malinche ?
- Malintzin. Il m'a dit "doña", en langue náhuatl. (page 166)
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