[Flaubert, Gustave] Madame Bovary
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Votre avis sur "Mme Bovary" de Flaubert Gustave
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Je dirais que nous avons affaire à l'un de ces livres qu'il est bon de relire après 15 ou 20 ans. Si je l'avais moyennement apprécié lorsque j'étais au lycée, j'ai pris énormément de plaisir à le relire une fois mariée et mère de famille !
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Je l'ai lu au collège, et ce livre ne m'a pas plus marquée que ça.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Lu pour moi aussi au collège et j'en ai gardé qu'un vague souvenir. Cela m'avait ennuyé. Peut etre étais-je trop jeune...
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Je trouve ce roman excellent. Toute cette intrigue que Flaubert développe parfaitement à partir d'un fait divers lu dans le journal m'a passionnée. J'avoue, tout de même, que les passages de longues descriptions ont été jusqu'à m'endormir carrément (et si) mais, en dehors de ça, le développement de l'histoire est original pour un roman de cette époque et très intéressante à lire.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Sur Bovary, il vaut mieux mettre peu de mots : chef d'oeuvre absolu.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Je l'ai lu récemment par obligation scolaire également, et j'ai beaucoup apprécié contrairement à l'éducation sentimentale, que j'avais lu avec beaucoup plus de difficultés.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Excellent ton commentaire sur l'ennui, Tsuk. C'est exactement ce que j'ai ressenti en lisant ce livre (j'avais ton âge)...
Pistou 117- Grand sage du forum
-
Nombre de messages : 4087
Age : 60
Localisation : LILLE
Genre littéraire préféré : De tout, partout...
Date d'inscription : 09/06/2010
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
C'est marrant, Flaubert est un auteur qui revient constamment dans les interviews des auteurs quand on leur demande quels auteurs ils préconisent.
Lire Flaubert apparaît indispensable.
Ce n'est pas l'avis de tous les lecteurs à ce que je vois
Lire Flaubert apparaît indispensable.
Ce n'est pas l'avis de tous les lecteurs à ce que je vois
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Franchement, j'aurais pu vivre sans ...
Mais il fait partie de notre culture. C'est important de la connaître, à mon avis.
Ceci dit, si je dois me battre pour que mes enfants lisent un livre, ça ne sera pas celui-là
Mais il fait partie de notre culture. C'est important de la connaître, à mon avis.
Ceci dit, si je dois me battre pour que mes enfants lisent un livre, ça ne sera pas celui-là
Pistou 117- Grand sage du forum
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Date d'inscription : 09/06/2010
Madame Bovary
Je ne l'avais pas apprécié ce roman de Flaubert au lycée, car je pense que j'avais pris "au pied de la lettre" l'histoire d'amour d'Emma. Et évidemment, sa vie n'était pas franchement mon modèle de femme! Je l'ai relu bien plus tard, j'ai toujours adoré l'écriture, sa précision, sa musique (on entend presque Flaubert crier son texte dans son "gueuloir", oui, c'est ainsi qu'il appelait une pièce de sa maison pour éprouver ses textes à l'oral...). Mais je vois plutôt maintenant une "pauvre fille", victime de ses lectures à l'eau de roses, équivalent de nos séries télé lamentables ou des romans photos: le personnage prend alors un relief intéressant, toujours actuel (hélas...), bref, le portrait d'une femme qui rêve une vie, au lieu de vivre la sienne.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Flaubert écrit merveilleusement bien (j'avais aussi aimé l'Éducation sentimentale) mais Emma Bovary est tout simplement le personnage féminin le plus "cruche" de l'histoire de la littérature... Elle me sort par les yeux! ;-)
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
C'est vrai qu'elle est particulièrement agaçante ! Ceci dit, le roman est un chef d'œuvre et l'écriture de Flaubert est tout simplement extraordinaire.
J'aime bien le parallèle que tu fais, Fontaine, avec les jeunes filles qui regarderaient des émissions de télé nunuches (ou liraient des romans de gare) et en tireraient des leçons catastrophiques pour la conduite de leur vie. Ça me semble toujours très vrai, je rencontre en tous cas des personnes pour lesquelles cette "mauvaise éducation" culturelle de départ a toujours des conséquences fâcheuses.
Les problèmes financiers dramatiques d'Emma me semblent aussi pouvoir être mis en parallèle avec la montée du sur-endettement dans nos sociétés, un peu pour la même raison : ne pas pouvoir vivre sans posséder le dernier objet à la mode, courir après des chimères...
J'aime bien le parallèle que tu fais, Fontaine, avec les jeunes filles qui regarderaient des émissions de télé nunuches (ou liraient des romans de gare) et en tireraient des leçons catastrophiques pour la conduite de leur vie. Ça me semble toujours très vrai, je rencontre en tous cas des personnes pour lesquelles cette "mauvaise éducation" culturelle de départ a toujours des conséquences fâcheuses.
Les problèmes financiers dramatiques d'Emma me semblent aussi pouvoir être mis en parallèle avec la montée du sur-endettement dans nos sociétés, un peu pour la même raison : ne pas pouvoir vivre sans posséder le dernier objet à la mode, courir après des chimères...
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Magnifique..tout simplement!
Il y a tellement de personnes actuellement qui sont malheureux parce qu'ils sont toujours insatisfaits de ce qu'ils ont, parce qu'ils n'arrivent pas à apprécier les petits bonheurs de la vie...qu'on aimerait leur dire: "Vis! ne suis pas l'exemple d'Emma Bovary!"
Il y a tellement de personnes actuellement qui sont malheureux parce qu'ils sont toujours insatisfaits de ce qu'ils ont, parce qu'ils n'arrivent pas à apprécier les petits bonheurs de la vie...qu'on aimerait leur dire: "Vis! ne suis pas l'exemple d'Emma Bovary!"
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Mais oui c'est exactement pour ca que j'ai apprécié Madame Bovary. même si ca reste du Flaubert et parfois un peu ennuyeux, ce récit est tellement d'actualité!!!
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Voici ma critique sur l’œuvre :
Critique de Madame Bovary de Flaubert
Résumé :
Quatrième de couverture : Une jeune femme romanesque qui s'était construit un monde romantiquement rêvé tente d'échapper - dans un vertige grandissant - à l'ennui de sa province, à la médiocrité de son mariage et à la platitude de sa vie. Mais quand Flaubert publie Madame Bovary, en 1857, toute la nouveauté du roman réside dans le contraste entre un art si hautement accompli et la peinture d'un univers si ordinaire.
"Ce n'était plus du roman comme l'avaient fait les plus grands", dira Maupassant : "C'était la vie elle-même apparue. On eût dit que les personnages se dressaient sous les yeux en tournant les pages, que les paysages se déroulaient avec leurs tristesses et leur gaité, leurs odeurs, leur charme, que les objets aussi surgissaient devant le lecteur à mesure que les évoquait une puissance invisible, cachée on ne sait où."
Emma grandit dans une ferme. Elle nourrit sa vie de jeune-fille de récits de chevalerie ou encore de romans pour l'éducation des demoiselles nobles et se crée un imaginaire plein de fantaisies, d'intérieurs coquets, de princes charmants sur leur destrier et de lettres d'amour parfumées. La réalité viendra vite contredire ses espérances. Charles Bovary, un médecin de campagne lui demande sa main, elle se marie et quitte l'univers familial. La vie aura tôt fait d'anéantir petit à petit toutes ses illusions.
Mon avis :
Ce fut un énorme plaisir de lire pour la première fois ce classique incontournable de la littérature française. J'ai essayé de me détacher des préjugés qui entourent ces livres qui ont paraît-il fait souffrir beaucoup de collégiens/lycéens. Et tant mieux car cet ouvrage que j'ai lu en quelques jours m'a vraiment passionnée! Je pense réellement qu'il est important aujourd'hui de faire l'effort de lire ce livre qui est resté malgré les siècles, terriblement actuel. Mais je ne nie pas pour autant qu'il faille une certaine maturité pour apprécier toute la subtilité de l’écriture de Flaubert.
Certains critiques parlent à postériori de "bovarysme" concernant le mal qui atteint le personnage d'Emma. Cette notion est définie par J. de Gaultier comme la capacité "qu'a l'homme de se concevoir autre qu'il n'est". Emma Bovary qui appartient au milieu de la petite bourgeoisie se rêve sous les traits d'une châtelaine qui contemple sur le chemin son chevalier qui vient la retrouver ou encore sous ceux d'une comtesse aux riches toilettes entourée de prétendants. Cette incessante projection d'elle-même l'empêche de mener une vie satisfaisante et la plonge sans cesse dans un état de neurasthénie. L'épisode du bal à la Vaubyessard qui la sort le temps d'une soirée de son cadre habituel de vie, illustre parfaitement cette tendance du personnage. Pour se détacher de son quotidien elle multiplie les amants et de déceptions en déceptions s'enferme dans une spirale infernale.
Il y a deux personnages clé dans le récit de Flaubert il s'agit de Homais le pharmacien et de monsieur Lheureux, usurier et commerçant. L'un comme l'autre participent à la fin tragique du couple Bovary et ressortent comme "grands vainqueurs" du récit. Homais est une figure typique du ridicule, il se considère comme un intellectuel et prend bien soin d'introduire dans ses phrases quelques mots de latin pour appuyer encore le pédant de son discours. On remarque ici la subtilité de l'écriture de Flaubert qui manie l'onomastique en donnant à "Homais" la même racine que "Homo" c'est à dire l'homme. Sur ce point très intéressant je vous renvoie à l'article de Michel Crouzet "Ecce Homais" (Revue d'histoire littéraire de France, nov-sept, 1989) dont voici un extrait parlant : "La bêtise pour Flaubert est infinie : ainsi il est bien difficile de "finir", de définir Monsieur Homais, sur lequel la critique a le tort de ne pas beaucoup s'interroger. Est-ce justement parce que sa définition est d'être indéfinissable? Il est intelligent, c'est indéniable, et la bêtise fait partie de l'intelligence et se loge en elle; dans Madame Bovary, il est voué à l'expansion, à la conquête, à l'ubiquité, à la métamorphose : indéterminé et éclaté. Sans doute ce qui l'éclairé le mieux, c'est son nom explicitement rattaché à "homo" par Flaubert. Homais, c'est l'homme : soit l'homme du général, l'Homme en soi, et Monsieur Homais accomplit avec méthode l'Idée d'Homme telle que les philosophes des Lumières l'ont établie. L'homme philosophique se prend pour la mesure de toutes choses : c'est son grotesque. Mais sous l'Homme en Soi, demeure l'homme, l'homme plus vrai, qui est l'objet d'une dérision qui est le comique absolu. Sous l'homme de la raison, il y a l'homme du comique, l'homme des vices, l'égoïste, le peureux, le paillard, l'imposteur, le truqueur éhonté, et en dernière analyse un être problématique qui peut-être n'existe pas; il y a donc l'Homo-Homais et l'Ego-Homais, qui n'est pas sûr de sa propre existence et en cherche vainement des preuves." Ainsi Homais sera celui qui "vient de recevoir la croix d'honneur" : ces derniers mots du roman sont remarquables notamment par l'utilisation d'un présent. Homais c'est l'éternel imbécile qui triomphe, à jamais. De même Monsieur Lheureux, hypocrite de tous les hypocrites se fait également fossoyeur d'Emma, il engrange l'implacable mécanique de la dette grâce à la perversion de l'argent. Sa manœuvre abouti carrément au déclassement de la famille Bovary puisque la tante de la petite Berthe la fille du couple "l'envoie, pour gagner sa vie, dans une filature de coton". Le présent intervient une seconde fois ici d'où l'idée que Berthe sera l'éternelle déclassée devenue prolétaire à l'inverse de Homais. Ainsi alors que Homais présente l'arsenic sous le nez d'Emma, Lheureux enfouie cette femme sous une pyramide de dettes et précipite la malheureuse à sa fin.
Madame Bovary a subi à sa publication, un succès de scandale grandement dû au procès intenté au livre pour outrage aux bonnes mœurs. Il est intéressant de considérer aujourd'hui les différents accueils dont a bénéficié l’œuvre. Si l'on passe sur la lecture qu'en fit Ernest Pinard sur laquelle ce procureur appuya son réquisitoire, on remarque tout de même que les critiques et même certains auteurs ne perçurent pas le livre selon l'idée que s'en faisait Flaubert. La Revue de Paris pensait pouvoir rendre Madame Bovary moral en supprimant quelques extraits mais c'était sans compter sur l'architecture précise que Flaubert donne à son roman. En effet l'auteur, face à de telles coupures (notamment la scène du fiacre qui était considérée comme "impossible") se fait un devoir de prévenir le lecteur en ces mots : "Des considérations que je n'ai pas à apprécier ont contraint La Revue de Paris à faire une suppression dans le numéro du 1er décembre. Ses scrupules s'étant renouvelés à l'occasion du présent numéro, elle a jugé convenable d'enlever encore plusieurs passages. En conséquence, je déclare dénier la responsabilité des lignes qui suivent ; le lecteur est donc prié de n'y voir que des fragments et non pas un ensemble. Gustave Flaubert". (Je rappelle que le roman a d'abord été publié en feuilleton dans cette même revue en plusieurs livraisons). "Des fragments et non pas un ensemble" cette phrase clé nous permet de considérer le récit comme un tout éminemment ciselé qui forme dans son entièreté seulement cette "forme-sens" qui caractérise tout texte. Seul Baudelaire (qui aura à subir la même année les assauts répétés du procureur Pinard à propos des Fleurs du Mal, notons qu'il utilisera l'argument de l'architecture complexe de l’œuvre qui seule donne au recueil toute sa portée, malheureusement contrairement à Flaubert il perdra son procès) a perçu dans sa lecture cet ensemble qui fait sens et permet la mise en place d'un certain fatum. Sainte-Beuve par exemple déplore l’inexistence dans le texte d'un personnage moral sur lequel le lecteur puisse s'appuyer. Baudelaire lui répond implicitement en ces termes : "Plusieurs critiques avaient dit : cette œuvre, vraiment belle par la minutie et la vivacité des descriptions, ne contient pas un seul personnage qui représente la morale, qui parle la conscience de l'auteur. Où est-il, le personnage proverbial et légendaire, chargé d'expliquer la fable et de diriger l'intelligence du lecteur? En d'autre termes, où est le réquisitoire? Absurdité! Éternelle et incorrigible confusion des fonctions et des genres! - Une véritable œuvre d'art n'a pas besoin de réquisitoire. La logique d'une œuvre suffit à toute les postulations de la morale, et c'est au lecteur à tirer les conclusions de la conclusion." On retient également aujourd'hui la lecture si pleinement juste de cette lectrice passionnée de romans qui adressa en 1856 une lettre à Flaubert que je reproduis ici:
"Abonnée et lectrice assidue de la Revue de Paris, j’y lis depuis sa première publication votre drame si saisissant de vérité, intitulé Madame Bovary. J’ai vu d’abord que vous aviez écrit un chef-d'oeuvre de naturel et de vérité. Oui, ce sont bien là les mœurs de cette province où je suis née, où j’ai passé ma vie.[...]
Non, cette histoire n’est point une fiction, c’est une vérité, cette femme a existé, vous avez dû assister à sa vie, à sa mort, à ses souffrances. Pour moi, monsieur, vous m’avez fait voir, je dirais presque souffrir tout cela. Il y a trente ans que je lis, toutes les productions écrites dans cet espace de temps par les meilleurs auteurs me sont connues. Eh ! bien, je ne crains pas d’affirmer qu’aucun livre ne m’a laissé une impression aussi profonde que celle que je viens d’éprouver à la lecture de Madame Bovary. J’ai moi-même écrit plusieurs romans, je vous en enverrai un exemplaire si vous voulez, je lis beaucoup; et j’ai trop souffert en ma vie pour ne pas pleurer difficilement, et seulement dans les cas extrêmes. Eh ! bien, depuis hier je n’ai cessé de pleurer sur cette pauvre dame Bovary, de la nuit je n’ai fermé l’oeil, je la voyais toujours, et je ne puis me consoler, ni me remettre de la commotion violente que m’a causée votre drame. Ceci est peut-être le plus bel éloge que je puisse vous faire, nul auteur ne m’a fait tant de mal, et je regrette d’avoir achevé cette lecture, je crois que j’en deviendrai folle. Ah ! monsieur, où donc avez-vous pris cette parfaite connaissance de la nature humaine, c’est le scalpel appliqué au cœur, à l’âme, c’est, hélas ! le monde dans toute sa hideur. Les caractères sont vrais, trop vrais, car aucun d’eux ne relève l’âme, rien ne console dans ce drame qui ne laisse qu’un immense désespoir mais aussi un sévère avertissement.[...]
J’avais besoin, monsieur, de vous exprimer ce que j’ai ressenti en vous lisant ; recevez donc le faible tribut de mon admiration, et croyez à la profonde sympathie avec laquelle je suis, monsieur, votre dévouée."
Marie-S. LEROYER DE CHANTEPIE
Pour terminer je laisse le mot de la fin à Flaubert : "Vous vous attaquez à des détails, c'est à l'ensemble qu'il faut s'en prendre. L'élément brutal est au fond et non à la surface. On ne blanchit pas les nègres et on ne change pas le sang d'un livre. On peut que l'appauvrir, voilà tout." (Flaubert dans une lettre à Léon Laurent-Pichat le 7 décembre 1856).
Du même auteur :
L'éducation sentimentale
Bouvard et Pécuchet
La Tentation de Saint Antoine
Salammbô
Trois contes
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Critique de Madame Bovary de Flaubert
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"Ce n'était plus du roman comme l'avaient fait les plus grands", dira Maupassant : "C'était la vie elle-même apparue. On eût dit que les personnages se dressaient sous les yeux en tournant les pages, que les paysages se déroulaient avec leurs tristesses et leur gaité, leurs odeurs, leur charme, que les objets aussi surgissaient devant le lecteur à mesure que les évoquait une puissance invisible, cachée on ne sait où."
Emma grandit dans une ferme. Elle nourrit sa vie de jeune-fille de récits de chevalerie ou encore de romans pour l'éducation des demoiselles nobles et se crée un imaginaire plein de fantaisies, d'intérieurs coquets, de princes charmants sur leur destrier et de lettres d'amour parfumées. La réalité viendra vite contredire ses espérances. Charles Bovary, un médecin de campagne lui demande sa main, elle se marie et quitte l'univers familial. La vie aura tôt fait d'anéantir petit à petit toutes ses illusions.
Mon avis :
Ce fut un énorme plaisir de lire pour la première fois ce classique incontournable de la littérature française. J'ai essayé de me détacher des préjugés qui entourent ces livres qui ont paraît-il fait souffrir beaucoup de collégiens/lycéens. Et tant mieux car cet ouvrage que j'ai lu en quelques jours m'a vraiment passionnée! Je pense réellement qu'il est important aujourd'hui de faire l'effort de lire ce livre qui est resté malgré les siècles, terriblement actuel. Mais je ne nie pas pour autant qu'il faille une certaine maturité pour apprécier toute la subtilité de l’écriture de Flaubert.
Certains critiques parlent à postériori de "bovarysme" concernant le mal qui atteint le personnage d'Emma. Cette notion est définie par J. de Gaultier comme la capacité "qu'a l'homme de se concevoir autre qu'il n'est". Emma Bovary qui appartient au milieu de la petite bourgeoisie se rêve sous les traits d'une châtelaine qui contemple sur le chemin son chevalier qui vient la retrouver ou encore sous ceux d'une comtesse aux riches toilettes entourée de prétendants. Cette incessante projection d'elle-même l'empêche de mener une vie satisfaisante et la plonge sans cesse dans un état de neurasthénie. L'épisode du bal à la Vaubyessard qui la sort le temps d'une soirée de son cadre habituel de vie, illustre parfaitement cette tendance du personnage. Pour se détacher de son quotidien elle multiplie les amants et de déceptions en déceptions s'enferme dans une spirale infernale.
Il y a deux personnages clé dans le récit de Flaubert il s'agit de Homais le pharmacien et de monsieur Lheureux, usurier et commerçant. L'un comme l'autre participent à la fin tragique du couple Bovary et ressortent comme "grands vainqueurs" du récit. Homais est une figure typique du ridicule, il se considère comme un intellectuel et prend bien soin d'introduire dans ses phrases quelques mots de latin pour appuyer encore le pédant de son discours. On remarque ici la subtilité de l'écriture de Flaubert qui manie l'onomastique en donnant à "Homais" la même racine que "Homo" c'est à dire l'homme. Sur ce point très intéressant je vous renvoie à l'article de Michel Crouzet "Ecce Homais" (Revue d'histoire littéraire de France, nov-sept, 1989) dont voici un extrait parlant : "La bêtise pour Flaubert est infinie : ainsi il est bien difficile de "finir", de définir Monsieur Homais, sur lequel la critique a le tort de ne pas beaucoup s'interroger. Est-ce justement parce que sa définition est d'être indéfinissable? Il est intelligent, c'est indéniable, et la bêtise fait partie de l'intelligence et se loge en elle; dans Madame Bovary, il est voué à l'expansion, à la conquête, à l'ubiquité, à la métamorphose : indéterminé et éclaté. Sans doute ce qui l'éclairé le mieux, c'est son nom explicitement rattaché à "homo" par Flaubert. Homais, c'est l'homme : soit l'homme du général, l'Homme en soi, et Monsieur Homais accomplit avec méthode l'Idée d'Homme telle que les philosophes des Lumières l'ont établie. L'homme philosophique se prend pour la mesure de toutes choses : c'est son grotesque. Mais sous l'Homme en Soi, demeure l'homme, l'homme plus vrai, qui est l'objet d'une dérision qui est le comique absolu. Sous l'homme de la raison, il y a l'homme du comique, l'homme des vices, l'égoïste, le peureux, le paillard, l'imposteur, le truqueur éhonté, et en dernière analyse un être problématique qui peut-être n'existe pas; il y a donc l'Homo-Homais et l'Ego-Homais, qui n'est pas sûr de sa propre existence et en cherche vainement des preuves." Ainsi Homais sera celui qui "vient de recevoir la croix d'honneur" : ces derniers mots du roman sont remarquables notamment par l'utilisation d'un présent. Homais c'est l'éternel imbécile qui triomphe, à jamais. De même Monsieur Lheureux, hypocrite de tous les hypocrites se fait également fossoyeur d'Emma, il engrange l'implacable mécanique de la dette grâce à la perversion de l'argent. Sa manœuvre abouti carrément au déclassement de la famille Bovary puisque la tante de la petite Berthe la fille du couple "l'envoie, pour gagner sa vie, dans une filature de coton". Le présent intervient une seconde fois ici d'où l'idée que Berthe sera l'éternelle déclassée devenue prolétaire à l'inverse de Homais. Ainsi alors que Homais présente l'arsenic sous le nez d'Emma, Lheureux enfouie cette femme sous une pyramide de dettes et précipite la malheureuse à sa fin.
Madame Bovary a subi à sa publication, un succès de scandale grandement dû au procès intenté au livre pour outrage aux bonnes mœurs. Il est intéressant de considérer aujourd'hui les différents accueils dont a bénéficié l’œuvre. Si l'on passe sur la lecture qu'en fit Ernest Pinard sur laquelle ce procureur appuya son réquisitoire, on remarque tout de même que les critiques et même certains auteurs ne perçurent pas le livre selon l'idée que s'en faisait Flaubert. La Revue de Paris pensait pouvoir rendre Madame Bovary moral en supprimant quelques extraits mais c'était sans compter sur l'architecture précise que Flaubert donne à son roman. En effet l'auteur, face à de telles coupures (notamment la scène du fiacre qui était considérée comme "impossible") se fait un devoir de prévenir le lecteur en ces mots : "Des considérations que je n'ai pas à apprécier ont contraint La Revue de Paris à faire une suppression dans le numéro du 1er décembre. Ses scrupules s'étant renouvelés à l'occasion du présent numéro, elle a jugé convenable d'enlever encore plusieurs passages. En conséquence, je déclare dénier la responsabilité des lignes qui suivent ; le lecteur est donc prié de n'y voir que des fragments et non pas un ensemble. Gustave Flaubert". (Je rappelle que le roman a d'abord été publié en feuilleton dans cette même revue en plusieurs livraisons). "Des fragments et non pas un ensemble" cette phrase clé nous permet de considérer le récit comme un tout éminemment ciselé qui forme dans son entièreté seulement cette "forme-sens" qui caractérise tout texte. Seul Baudelaire (qui aura à subir la même année les assauts répétés du procureur Pinard à propos des Fleurs du Mal, notons qu'il utilisera l'argument de l'architecture complexe de l’œuvre qui seule donne au recueil toute sa portée, malheureusement contrairement à Flaubert il perdra son procès) a perçu dans sa lecture cet ensemble qui fait sens et permet la mise en place d'un certain fatum. Sainte-Beuve par exemple déplore l’inexistence dans le texte d'un personnage moral sur lequel le lecteur puisse s'appuyer. Baudelaire lui répond implicitement en ces termes : "Plusieurs critiques avaient dit : cette œuvre, vraiment belle par la minutie et la vivacité des descriptions, ne contient pas un seul personnage qui représente la morale, qui parle la conscience de l'auteur. Où est-il, le personnage proverbial et légendaire, chargé d'expliquer la fable et de diriger l'intelligence du lecteur? En d'autre termes, où est le réquisitoire? Absurdité! Éternelle et incorrigible confusion des fonctions et des genres! - Une véritable œuvre d'art n'a pas besoin de réquisitoire. La logique d'une œuvre suffit à toute les postulations de la morale, et c'est au lecteur à tirer les conclusions de la conclusion." On retient également aujourd'hui la lecture si pleinement juste de cette lectrice passionnée de romans qui adressa en 1856 une lettre à Flaubert que je reproduis ici:
"Abonnée et lectrice assidue de la Revue de Paris, j’y lis depuis sa première publication votre drame si saisissant de vérité, intitulé Madame Bovary. J’ai vu d’abord que vous aviez écrit un chef-d'oeuvre de naturel et de vérité. Oui, ce sont bien là les mœurs de cette province où je suis née, où j’ai passé ma vie.[...]
Non, cette histoire n’est point une fiction, c’est une vérité, cette femme a existé, vous avez dû assister à sa vie, à sa mort, à ses souffrances. Pour moi, monsieur, vous m’avez fait voir, je dirais presque souffrir tout cela. Il y a trente ans que je lis, toutes les productions écrites dans cet espace de temps par les meilleurs auteurs me sont connues. Eh ! bien, je ne crains pas d’affirmer qu’aucun livre ne m’a laissé une impression aussi profonde que celle que je viens d’éprouver à la lecture de Madame Bovary. J’ai moi-même écrit plusieurs romans, je vous en enverrai un exemplaire si vous voulez, je lis beaucoup; et j’ai trop souffert en ma vie pour ne pas pleurer difficilement, et seulement dans les cas extrêmes. Eh ! bien, depuis hier je n’ai cessé de pleurer sur cette pauvre dame Bovary, de la nuit je n’ai fermé l’oeil, je la voyais toujours, et je ne puis me consoler, ni me remettre de la commotion violente que m’a causée votre drame. Ceci est peut-être le plus bel éloge que je puisse vous faire, nul auteur ne m’a fait tant de mal, et je regrette d’avoir achevé cette lecture, je crois que j’en deviendrai folle. Ah ! monsieur, où donc avez-vous pris cette parfaite connaissance de la nature humaine, c’est le scalpel appliqué au cœur, à l’âme, c’est, hélas ! le monde dans toute sa hideur. Les caractères sont vrais, trop vrais, car aucun d’eux ne relève l’âme, rien ne console dans ce drame qui ne laisse qu’un immense désespoir mais aussi un sévère avertissement.[...]
J’avais besoin, monsieur, de vous exprimer ce que j’ai ressenti en vous lisant ; recevez donc le faible tribut de mon admiration, et croyez à la profonde sympathie avec laquelle je suis, monsieur, votre dévouée."
Marie-S. LEROYER DE CHANTEPIE
Pour terminer je laisse le mot de la fin à Flaubert : "Vous vous attaquez à des détails, c'est à l'ensemble qu'il faut s'en prendre. L'élément brutal est au fond et non à la surface. On ne blanchit pas les nègres et on ne change pas le sang d'un livre. On peut que l'appauvrir, voilà tout." (Flaubert dans une lettre à Léon Laurent-Pichat le 7 décembre 1856).
Du même auteur :
L'éducation sentimentale
Bouvard et Pécuchet
La Tentation de Saint Antoine
Salammbô
Trois contes
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Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
J'ai beaucoup de mal avec la littérature classique, ça ne me tente pas du tout.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
C'est un peu vague "littérature classique". Ça m'étonnerait grandement que TOUT ce qui compose ce qu'on appelle la "littérature classique" ne te tente pas du tout. C'est dommage de partir sur des préjugés.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
De manière générale si tu préfère, j'en ais lu quelqu'uns, certains m'ont plus d'autres non. Disons que ça ne fait pas parti de mes genres littéraires préférés. Et ce n'est pas des préjugés, dans le sens où je continue à découvrir certains titres et auteurs. Je ne suis pas complètement fermée ...Joyce a écrit:C'est un peu vague "littérature classique". Ça m'étonnerait grandement que TOUT ce qui compose ce qu'on appelle la "littérature classique" ne te tente pas du tout. C'est dommage de partir sur des préjugés.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Aaah ouf! Tant mieux parce qu'énormément de personnes, après avoir été contraintes à lire des "classiques" en cours abandonnent totalement ce genre.Ce qui est dommage car il est très intéressant d'y revenir une fois qu'on a développé une certaine maturité.
Madame Bovary par exemple, heureusement que je ne l'ai pas lu au collège ou au lycée parce que je n'aurais pas été assez mature pour comprendre toute la complexité de ce livre ou du moins entrevoir son intérêt.
Madame Bovary par exemple, heureusement que je ne l'ai pas lu au collège ou au lycée parce que je n'aurais pas été assez mature pour comprendre toute la complexité de ce livre ou du moins entrevoir son intérêt.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Oui, ils ont tendance à nous accabler de romans classique, et beaucoup sont rebutés par la lecture, et c'est bien dommage.Joyce a écrit:Aaah ouf! Tant mieux parce qu'énormément de personnes, après avoir été contraintes à lire des "classiques" en cours abandonnent totalement ce genre.Ce qui est dommage car il est très intéressant d'y revenir une fois qu'on a développé une certaine maturité.
Madame Bovary par exemple, heureusement que je ne l'ai pas lu au collège ou au lycée parce que je n'aurais pas été assez mature pour comprendre toute la complexité de ce livre ou du moins entrevoir son intérêt.
Pour ma part, je n'ai pas le souvenir d'un livre en particulier que je n'ai pas aimé au cours de cette période.
Pour la littérature classique, ce n'est pas tant l'histoire, mais souvent la façon d'écrire qui ont fait que je n'ai pas accroché.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Je viens de le terminer. Je l'ai trouvé férocement vide et un brin ennuyeux; au regard de tout le raffut qu'on fait autour, il est particulièrement décevant.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Un livre à ne pas lire d'un trait. La première fois que je l'ai lu, je ne suis pas arrivée au bout tellement le personnage d'Emma m' insupportait. En le relisant je me suis rendu compte que j'étais passée à côté d'un vrai chef d'oeuvre.
Les personnages sont criants de vérité. Il me semble qu'ils ont tous l'air un peu ridicule justement à cause de la plume impitoyable de Flaubert qui couche sur le papier tout ce qui se passe dans leur tête y compris leurs pensées les plus stupides.
C'est un livre très noir, qui laisse une forte impression une fois qu'on l'a fini et qui fait beaucoup réfléchir. Le passage de l'agonie d'Emma est un de ceux qui ne s'oublient pas et dont la lecture découragerait n'importe quel candidat au suicide.
Selon moi, le problème d'Emma, c'est qu'elle idéalise tellement la vie des autres (les riches parisiens, les nobles de La Vaubyessard...) qu'elle ne voit pas que la sienne aussi peut être belle, qu'elle est tendrement aimée (à la fois par son père, par Charles et la petite Berthe). En ce sens ce livre est une invitation à aimer notre vie telle qu'elle est, à goûter au bonheur simple mais immense d'être entouré par ceux que l'on aime.
Les personnages sont criants de vérité. Il me semble qu'ils ont tous l'air un peu ridicule justement à cause de la plume impitoyable de Flaubert qui couche sur le papier tout ce qui se passe dans leur tête y compris leurs pensées les plus stupides.
C'est un livre très noir, qui laisse une forte impression une fois qu'on l'a fini et qui fait beaucoup réfléchir. Le passage de l'agonie d'Emma est un de ceux qui ne s'oublient pas et dont la lecture découragerait n'importe quel candidat au suicide.
Selon moi, le problème d'Emma, c'est qu'elle idéalise tellement la vie des autres (les riches parisiens, les nobles de La Vaubyessard...) qu'elle ne voit pas que la sienne aussi peut être belle, qu'elle est tendrement aimée (à la fois par son père, par Charles et la petite Berthe). En ce sens ce livre est une invitation à aimer notre vie telle qu'elle est, à goûter au bonheur simple mais immense d'être entouré par ceux que l'on aime.
Invité- Invité
Re: [Flaubert, Gustave] Madame Bovary
Je pense que même si elle avait la vie des autres qu'elle idéalise, elle ne serait pas heureuse. Pour moi, Mme Bovary est une éternelle insatisfaite : toujours à rêver sa vie au lieu de la vivre pleinement...
Je l'ai lu il y a longtemps (au lycée). Je me souviens avoir plutôt aimé mais j'avoue que je n'en ai pas gardé grand chose de plus. Il faudrait sans doute que je le relise. D'autant que j'imagine que j'y verrai sûrement beaucoup d'autres choses que lors de ma première lecture...
Je l'ai lu il y a longtemps (au lycée). Je me souviens avoir plutôt aimé mais j'avoue que je n'en ai pas gardé grand chose de plus. Il faudrait sans doute que je le relise. D'autant que j'imagine que j'y verrai sûrement beaucoup d'autres choses que lors de ma première lecture...
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