[Cossé, Laurence] Les amandes amères
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[Cossé, Laurence] Les amandes amères
Titre : Les amandes amères
Auteur : Laurence Cossé
Editions : Gallimard
Année : 2011
Nombre de pages : 217
Quatrième de couverture :
Découvrant que Fadila ne sait li lire ni écrire, Édith entrevoit à quel point la vie est compliquée pour un analphabète et combien c'est humiliant. Elle lui propose de lui apprendre à lire le français. Fadila n'est pas jeune. Édith n'est pas entraînée. L'apprentissage s'avère difficile. Ce qui semblait acquis un jour est oublié la semaine suivante.
Si Fadila a tant de mal à progresser, c'est que sa vie entière est difficile. Ce n'est pas une marginale. Elle a une famille, un toit, du travail. Mais la violence a marqué son rapport aux autres, depuis l'adolescence. Elle a de la rancœur contre son Maroc natal et, en France, elle ne se fait pas à la solitude. Elle vit dans une perpétuelle inquiétude.
Édith, de son côté, se sent de plus en plus démunie dans cette aventure dont elle a pris la responsabilité et qui va l'entraîner beaucoup plus loin qu'elle n'aurait cru.
Une amitié singulière, rugueuse et douce, amère, cocasse.
Mon avis :
J'ai été très touchée par ce livre ! C'est le premier roman de Laurence Cossé que je découvre, et je suis contente d'avoir Au bon roman dans la PAL, même s'il y a beaucoup de titres publiés par la romancière entre ces deux-là.
C'est le personnage de Fadila qui m'a touchée, cette femme de soixante-cinq ans qui accepte d'apprendre à lire et à écrire à cet âge, mais aussi son histoire personnelle, sa solitude, son rapport aux hommes et à ses enfants, sa nostalgie, sa difficulté à se débrouiller avec la vie, en général. Mais c'est aussi Edith, ce pari insensé qu'elle entreprend, cette patience infinie (moi qui suis prof, j'aurais envoyé Fadila au diable depuis longtemps, je l'avoue...), cette intelligence de la femme qu'est Fadila et de sa situation.
Mais ce qui m'a le plus remuée, c'est de percevoir - ô si peu - le handicap que constitue l'analphabétisme (aujourd'hui, on ne dit plus ce "gros mot", on parle pudiquement de "non-scolarisation"). En cela, une fois de plus, le roman m'aura fait comprendre un peu de l'inconnu total dans lequel on tâtonne, de l'exclusion dont on est victime quand on ne sait ni lire ni écrire. Sans parler de ne pas avoir accès non plus au plaisir des mots, des idées, de l'abstraction.
Comment ne pas être touchée par cela devant cette anti-héroïne du quotidien le plus banal ? La construction du livre est à l'unisson des difficultés d'apprentissage de Fadila : il ne se passe pas grand-chose, on a l'impression de tourner en rond en apprenant les lettres de ses prénom et nom, en mémorisant les chiffres d'un numéro de téléphone. Mais petit à petit se dévoilent les arcanes de ce quotidien lassant, fatigant, de cette réalité amère dont Fadila a tant de mal à s'accommoder. Jusqu'à la fin, qui ne sera pas un happy end.
Une écriture discrète, toute en simplicité, une réalité "banale" pour un roman qui ne l'est pas du tout.
"Leurs rapports ont beaucoup changé. Voilà six mois qu'elles se connaissent et deux mois qu'elles sont encordées dans cette escalade.Il est clair que pour Fadila, Edith n'est plus la même. La relation n'est pas la même.
Elle ne semble pas souffrir de la difficulté de l'apprentissage, c'est peu dire. Quand elle vient s'asseoir à côté d'Edith pour lui faire savoir qu'elle est prête à travailler avec elle, ce qui ne se produit pas chaque fois, loin s'en faut, elle est détendue. Tout son être l'est. Cette équipée lui plaît." (p. 54 -55)
Invité- Invité
Re: [Cossé, Laurence] Les amandes amères
Merci pour cette belle critique.
Le sujet m'intéresse, ainsi que la relation qui lie ces 2 femmes.
Je le note dans ma LAL.
Le sujet m'intéresse, ainsi que la relation qui lie ces 2 femmes.
Je le note dans ma LAL.
Invité- Invité
Re: [Cossé, Laurence] Les amandes amères
J'ai aimé l'écriture de Laurence Cossé dans "Au bon roman" et je note celui-ci dans ma LAL. Merci de ton compte-rendu
Re: [Cossé, Laurence] Les amandes amères
Merci pour cette belle critique.
Je verrai si je le trouve à la BM.
Je verrai si je le trouve à la BM.
Sharon- Modérateur
-
Nombre de messages : 13263
Age : 46
Localisation : Normandie
Emploi/loisirs : professeur
Genre littéraire préféré : romans policiers et polars
Date d'inscription : 01/11/2008
Re: [Cossé, Laurence] Les amandes amères
J'ai voté : très apprécié
Dans ce récit, Laurence Cossé nous dresse le portrait de Fadila, analphabète sexagénaire, et d'Edith, qui l'aide à apprendre à lire et à écrire.
Peu à peu se tisse une relation particulière entre les deux femmes.
Les phrases sont courtes, claires et décrivent des scènes très simples, qui m'ont fait penser à des plans de cinéma, séparés par des fondus au noir.
J'ai aimé cette simplicité, cette précision dans l'écriture.
J'ai apprécié ce portrait de femmes, ces questions qu’Édith se posent sur l'apprentissage de la lecture, son parcours pour savoir comment aider au mieux son « élève ».
Enseignante en CP, j'ai trouvé les pages relatives à l'apprentissage très justes, très bien écrites.
Édith fait au mieux, encourage, s'adapte à Fadila, ne la brusque jamais.
Elle cherche également des solutions auprès des associations d'alphabétisation, où les places sont rares.
Elle ne relâche jamais ses efforts, malgré le découragement qui menace de la gagner par moments.
J'ai aimé également la deuxième partie, qui nous brosse tout en nuances la vie de Fadila : sa jeunesse au Maroc, ses enfants et petits-enfants, leur relation souvent compliquée, le poids des traditions, le ramadan, les vacances au pays...
Fadila a une personnalité complexe et des idées bien arrêtées. Mais elle est motivée pour apprendre.
Je ne vais pas dévoiler toute l'histoire. Ce récit m'a tellement touchée que je pourrais écrire des pages.
C'est un livre à lire. Je l'ai dévoré en quelques heures.
Et je lirai avec plaisir d'autres livres de cet auteur.
Dans ce récit, Laurence Cossé nous dresse le portrait de Fadila, analphabète sexagénaire, et d'Edith, qui l'aide à apprendre à lire et à écrire.
Peu à peu se tisse une relation particulière entre les deux femmes.
Les phrases sont courtes, claires et décrivent des scènes très simples, qui m'ont fait penser à des plans de cinéma, séparés par des fondus au noir.
J'ai aimé cette simplicité, cette précision dans l'écriture.
Elle passe le vendredi. Elle n'a pas prévenu.
« J' crié », dit-elle aussitôt. Édith sait maintenant que « J' crié » veut dire « J'ai écrit ».
Fadila ôte son manteau, garde son foulard noir, va s'asseoir à la table de la salle à manger et sort de son grand sac une poignée de papiers d'où elle extrait la feuille sur laquelle il y avait à recopier des o et des a. Elle a fait quelques o, à peu près bien placés entre les deux lignes, mais sans lien avec les points censés marquer leur place. Elle n'a pas écrit un seul a.
« C'est bien, dit Édith. Ça commence à venir. On fait un peu de lecture ? »
J'ai apprécié ce portrait de femmes, ces questions qu’Édith se posent sur l'apprentissage de la lecture, son parcours pour savoir comment aider au mieux son « élève ».
Enseignante en CP, j'ai trouvé les pages relatives à l'apprentissage très justes, très bien écrites.
Édith fait au mieux, encourage, s'adapte à Fadila, ne la brusque jamais.
Elle cherche également des solutions auprès des associations d'alphabétisation, où les places sont rares.
Elle ne relâche jamais ses efforts, malgré le découragement qui menace de la gagner par moments.
J'ai aimé également la deuxième partie, qui nous brosse tout en nuances la vie de Fadila : sa jeunesse au Maroc, ses enfants et petits-enfants, leur relation souvent compliquée, le poids des traditions, le ramadan, les vacances au pays...
Fadila a une personnalité complexe et des idées bien arrêtées. Mais elle est motivée pour apprendre.
Il faut avancer. « On va voir le R. » Edith entoure la lettre, en troisième position dans le nom.
« J' connais, dit Fadila. RER A, RER B, RER C. »
Excellent. Edith écrit RER, montre qu'il y a deux fois la lettre R et, tant qu'à faire, entre les deux, elle signale la lettre E. À côté, elle ajoute A.
« J' connais, répète Fadila.
- Bien sûr, vous connaissez A.
- J'connais aussi B. »
Elle explique que B est la première lettre du code sur la rue de son immeuble.
Je ne vais pas dévoiler toute l'histoire. Ce récit m'a tellement touchée que je pourrais écrire des pages.
C'est un livre à lire. Je l'ai dévoré en quelques heures.
Et je lirai avec plaisir d'autres livres de cet auteur.
Dernière édition par virgule le Dim 24 Fév 2013 - 22:28, édité 1 fois
Invité- Invité
Re: [Cossé, Laurence] Les amandes amères
Je viens de terminer : "vous écrivez ?" toujours le même ravissement
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