[Gaudé, Laurent] Terrasses ou notre long baiser si longtemps retardé
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[Gaudé, Laurent] Terrasses ou notre long baiser si longtemps retardé
[Gaudé, Laurent] Terrasses ou notre long baiser si longtemps retardé
Titre : Terrasses ou notre long baiser si longtemps retardé.
Editeur : Actes Sud.
Collection : Domaine français
Date de parution : 2024.
Nombre de pages : 133.
Quatriéme de couverture :
Vendredi 13 novembre 2015. Douceur automnale : ce soir pourrait avoir un air de fête. On rêve de ce que sera cette nuit qui s'ouvre. Deux amoureuses savourent l'impatience de se retrouver ; des jumelles se sont demandé où célébrer leur anniversaire ; une infirmière se promet le repos mérité. Un mari s'agace de devoir garder seul "la petite" - sa femme part écouter de la musique. Partout dans Paris, on va bavarder, trinquer, rire, danser. Et du côté des forces de secours et de l'ordre, rien n'annonce l'horreur imminente.
Chant polyphonique, élégie narrative, "Terrasses" porte la parole de ceux qui ont vécu la joie puis la terreur, restitue les gestes, les regards échangés, la sidération partagée, offre à tous la possibilité d'un avant l'"après", dont le temps érode l'impossible oubli
Avis et commentaires :
Bouleversant chant polyphonique alternant les récits supposés de cette soirée, les circonstances qui ont fait que cette soirée tragique de novembre 2015 à Paris s'annonçait si douce et si chargée d'émotions à partager à l'origine.
Par touches sensibles, sans aucun pathos, Laurent Gaudé replonge le lecteur dans une sélection de vies fauchées ou traumatisées par cette succession d'actes terroristes sur les terrasses de Paris comme au Bataclan. Exploit renouvelé de cet auteur dans le fait d'imaginer ces personnages dont la vie a basculé, parfois de manière définitive dans le drame mais surtout donner des éléments de bonheur initiaux qui les guidaient ce fameux soir.
Bien sûr l'issue est connue mais quel talent encore une fois que cette écriture si illustrante, ces portraits ciselés au plus près possibles qui nous plongent dans une actualité totale, sans que le lecteur n'arrive à reprendre son souffle ni à ne pas être simple spectateur de l'horreur. Aucune recherche de sensationnalisme ou de voyeurisme ici, juste de la beauté, de la bonté et une humanité qui nous fait défaut depuis ces faits.
_________________
Lectures en cours :
Elise ou la vraie vie de Claire Etcherelli
Pourquoi le saut des baleines de Nicolas Cavaillés
Un loup quelque part d'Amélie Cordonnier.
La pensée du moment :
"Les Hommes sont malheureux parce qu'ils ne réalisent pas les rêves qu'ils ont" Jacques Brel.
Re: [Gaudé, Laurent] Terrasses ou notre long baiser si longtemps retardé
Je veux vraiment le lire celui-ci, je vais essayer de le trouver dès cette semaine.
elea2020- Grand sage du forum
-
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Localisation : 44
Emploi/loisirs : enseignante en reconversion
Genre littéraire préféré : dystopies et classiques, littérature russe
Date d'inscription : 02/01/2020
Re: [Gaudé, Laurent] Terrasses ou notre long baiser si longtemps retardé
Mon avis :
Il est sans doute louable de se pencher de nouveau sur le déroulé des attentats du 13 novembre, de cette folle course des terroristes semant la mort violente sur leur passage. Il est important que nous n'oubliions pas ceux, celles, innocentes et innocents qui sont tombés, ce beau soir sur les terrasses de Paris. Mais pour quoi ? Dans quel but ?
Ceux qui ont vécu l'événement sont nombreux à l'avoir raconté, nous avons vu les photos de tous ceux qui ont été pleurés par leurs familles, amis, amoureux, nous avons déposé des fleurs, allumé des bougies, sur place ou chez nous, il y a eu ce grand moment d'une communion forcée par le malheur, par l'horreur. Et maintenant ?
Laurent Gaudé nous retrace avec maîtrise ce parcours échevelé, les différentes vies qui se sont entrecroisées là, ceux qui ont eu la chance d'en sortir, ceux qui y sont restés, sur un arrêt du Hasard qui a choisi pour eux, car tous étaient jeunes, aucun n'aurait pensé mourir là, ce beau soir-là. Certains avaient des enfants, tous avaient un prénom - au contraire de ceux qui, interchangeables (?) sont intervenus, ont agi le plus efficacement possible, ont dû lutter face au gouffre pour garder leur sang-froid. J'ai pu voir la série sur Netflix, tous ces témoignages qui donnent le tournis quand on réalise l'ampleur de l'événement.
Alors que fait Laurent Gaudé, qu'apporte-t-il ? Il se dit le chantre des âmes, il veut nous mettre à la place de chacune, chacun, que ce soit le couple d'amoureuses à leur premier rendez-vous, la mère en colère qui s'est fâchée, a laissé son mari avec leur petite fille Lila, les deux jumelles qui se retrouvaient pour fêter une fois de plus leur anniversaire, leurs 30 ans, entre Paris et Barcelone, un Mathieu qui a tenu la main d'une Julie mourante, de jeunes pompiers, les deux policiers entrés les premiers, avec quel courage, les membres du commando d'intervention, les médecins, les infirmières, le nettoyeur. Et tous ces fantômes retenus au Bataclan, qui attendent des miettes de vie...
Et pourtant, l'âme y est-elle si présente, dans ce livre ? Les phrases brèves, certaines formules poétiques sont percutantes, le roman se lit très vite, mais on a l'impression de survoler la scène. De mon fait, j'ai eu du mal à m'y retrouver dans cette prosopopée, cette longue file de morts qui parlent, dont on ne sait plus s'ils sont encore vivants ou déjà morts, et même parfois s'ils sont l'un, l'autre, ou mélangés, les deux ensemble. C'est beau, réussi d'une certaine manière, mais j'ai eu l'impression d'un produit de consommation rapide - peut-être était-ce pour marquer le pas, parce que cela va si vite quand ça arrive. 3,5/5
Citations :
Jour normal que rien ne désigne si ce n'est ce nom, vendredi, qui le rend aimable. (page 14)
Nous sommes face à face. Il aurait fallu s'embrasser tout de suite. D'emblée. Voler notre baiser à tout ce qui va suivre. (page 23)
Ce qu'il faudrait, c'est les voir arriver chargés de ce qu'ils ont déjà fait. Ce qu'il faudrait, c'est voir leur vrai visage, celui de leurs choix successifs et donc de leur histoire. (page 27)
Des hommes viennent à notre aide. Les tueurs vont devoir partir, se replier. Tout bascule. Vous avez fait cela. Vos balles ont éloigné la mort comme quelqu'un qui tape sur le sol pour éloigner les serpents. (page 75)
Aller en terrasse pour défier l'ennemi, c'est encore y penser. Il faudra du temps pour qu'un jour, enfin, nous nous asseyions en toute innocence. (page 127)
Il est sans doute louable de se pencher de nouveau sur le déroulé des attentats du 13 novembre, de cette folle course des terroristes semant la mort violente sur leur passage. Il est important que nous n'oubliions pas ceux, celles, innocentes et innocents qui sont tombés, ce beau soir sur les terrasses de Paris. Mais pour quoi ? Dans quel but ?
Ceux qui ont vécu l'événement sont nombreux à l'avoir raconté, nous avons vu les photos de tous ceux qui ont été pleurés par leurs familles, amis, amoureux, nous avons déposé des fleurs, allumé des bougies, sur place ou chez nous, il y a eu ce grand moment d'une communion forcée par le malheur, par l'horreur. Et maintenant ?
Laurent Gaudé nous retrace avec maîtrise ce parcours échevelé, les différentes vies qui se sont entrecroisées là, ceux qui ont eu la chance d'en sortir, ceux qui y sont restés, sur un arrêt du Hasard qui a choisi pour eux, car tous étaient jeunes, aucun n'aurait pensé mourir là, ce beau soir-là. Certains avaient des enfants, tous avaient un prénom - au contraire de ceux qui, interchangeables (?) sont intervenus, ont agi le plus efficacement possible, ont dû lutter face au gouffre pour garder leur sang-froid. J'ai pu voir la série sur Netflix, tous ces témoignages qui donnent le tournis quand on réalise l'ampleur de l'événement.
Alors que fait Laurent Gaudé, qu'apporte-t-il ? Il se dit le chantre des âmes, il veut nous mettre à la place de chacune, chacun, que ce soit le couple d'amoureuses à leur premier rendez-vous, la mère en colère qui s'est fâchée, a laissé son mari avec leur petite fille Lila, les deux jumelles qui se retrouvaient pour fêter une fois de plus leur anniversaire, leurs 30 ans, entre Paris et Barcelone, un Mathieu qui a tenu la main d'une Julie mourante, de jeunes pompiers, les deux policiers entrés les premiers, avec quel courage, les membres du commando d'intervention, les médecins, les infirmières, le nettoyeur. Et tous ces fantômes retenus au Bataclan, qui attendent des miettes de vie...
Et pourtant, l'âme y est-elle si présente, dans ce livre ? Les phrases brèves, certaines formules poétiques sont percutantes, le roman se lit très vite, mais on a l'impression de survoler la scène. De mon fait, j'ai eu du mal à m'y retrouver dans cette prosopopée, cette longue file de morts qui parlent, dont on ne sait plus s'ils sont encore vivants ou déjà morts, et même parfois s'ils sont l'un, l'autre, ou mélangés, les deux ensemble. C'est beau, réussi d'une certaine manière, mais j'ai eu l'impression d'un produit de consommation rapide - peut-être était-ce pour marquer le pas, parce que cela va si vite quand ça arrive. 3,5/5
Citations :
Jour normal que rien ne désigne si ce n'est ce nom, vendredi, qui le rend aimable. (page 14)
Nous sommes face à face. Il aurait fallu s'embrasser tout de suite. D'emblée. Voler notre baiser à tout ce qui va suivre. (page 23)
Ce qu'il faudrait, c'est les voir arriver chargés de ce qu'ils ont déjà fait. Ce qu'il faudrait, c'est voir leur vrai visage, celui de leurs choix successifs et donc de leur histoire. (page 27)
Des hommes viennent à notre aide. Les tueurs vont devoir partir, se replier. Tout bascule. Vous avez fait cela. Vos balles ont éloigné la mort comme quelqu'un qui tape sur le sol pour éloigner les serpents. (page 75)
Aller en terrasse pour défier l'ennemi, c'est encore y penser. Il faudra du temps pour qu'un jour, enfin, nous nous asseyions en toute innocence. (page 127)
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