[Serhane, Abdelhak] L'homme qui descend des montagnes
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Notre avis:
[Serhane, Abdelhak] L'homme qui descend des montagnes
Titre: L'homme qui descend des montagnes
Auteur: Abdelhak SERHANE
Editeur: Seuil
Mai 2009
259 pages
ISBN: 978.2.02.099975.5
Quatrième de couverture:
Dans ce récit d'inspiration autobiographique, Abdelhak Serhane nous livre le portrait émouvant d'une enfance marocaine dans les années 50 au sein d'une famille très pauvre installée dans un village isolé du Haut-Atlas. Enfance douloureuse marquée par une extrême misère matérielle et affective, et dominée par la figure d'un père violent et d'une mère soumise. C'est pourtant dans ce contexte que le jeune narrateur va faire son apprentissage de la vie, s'initier au français en lisant les bribes de journaux dont son père a tapissé le plafond de sa masure, et prendre peu à peu conscience de la condition peu enviable de ses compatriotes subissant l'arbitraire d'un pouvoir archaïque. Car à travers la profusion d'anecdotes touchantes qui ponctuent l'histoire de cette famille, c'est en filigrane un tableau au vitriol d'une société gangrenée par la corruption et les interdits religieux qui est ici brossé, à mille lieux de l'image parfois complaisante que l'on peut avoir en Occident de la monarchie alaouite.
Un livre engagé servi par une plume alerte et une verve expressive.
Mon avis:
Avant toute chose, je tiens à préciser que, bien que cela ne soit pas annoncé dans la présentation de l'éditeur, ce livre n'est pas noir, au contraire, il m'a beaucoup amusée et a même provoqué de grands moments de rire. Certes le contexte décrit n'est pas drôle, misère et violence sont présentes au quotidien mais l'auteur les amène à travers des anecdotes de son enfance qui sont trucculentes!
Le principal atout de ce livre est qu'il est remarquablement bien écrit et par là-même très complet.
A travers le récit autobiographique, Abdelhak Serhane nous donne à voir la vie d'une famille pauvre marocaine dans les années 50. Les difficultés matérielles sont renforcées par l'obscurantisme du chef de famille qui travaille peu, impose ses convictions religieuses rigides et ses frasques adultérines à son épouse et ses enfants.
Très tôt, le jeune Abdelhak comprendra donc que le salut viendra de l'instruction et de l'émancipation du joug religieux. En effet, la foi n'est jamais présentée comme source d'enrichissement personnel ni comme recherche de perfectionnement mais toujours comme source de contrainte éventuellement imposée avec violence.
L'image de la famille: Le grand frère d'Abdelhak reproduit les velléités dominatrices de son père. Il est le plus souvent présenté comme n'ayant que l'insulte et l'invective à la bouche.
La mère fait ce qu'elle peut mais a déjà beaucoup de soucis personnels à gérer pour pouvoir agir efficacement pour améliorer le quotidien de ses enfants. C'est un personnage attachant dont on découvre peu à peu l'extrême richesse et toute la valeur intrinsèque. Elle ne se limite pas, loin de là, à la femme soumise décrite par l'éditeur.
Les soeurs sont quasi inexistantes.
La famille éloignée, oncles et tantes, a réussi socialement et n'éprouve que du mépris pour cette branche pauvre et inculte. Elle incarne l'imperméabilité des strates de la société.
Et pourtant, ce texte est porteur de nombreux espoirs, la mère et Abdelhak sont des révolutionnaires grandissants qui par leurs actes, mêmes futiles, témoignent d'une farouche envie d'émancipation. La mère est prête à affronter les foudres de tout son entourage pour échapper à la fatalité de la condition féminine de son pays. Elle veut bien tout endurer mais décide que huit grossesses à 25 ans cela suffit. Elle n'en démordra pas. Quelle modernité pour le Maroc (et pour la France) de ces années-là!
Abdelhak résiste en se rendant maître de son destin. Il parvient à imposer son envie de faire des études, concède des échecs pour mieux anticiper ses victoires. Il nous présente un rapport à l'écrit et au savoir particulièrement intéressant. Aucune opportunité n'est négligée et le savoir est vite érigé comme moyen d'affirmation et de protestation.
Le roman commence et se termine en 1994. Cela permet à l'auteur de transposer ses revendications de nos jours. La critique face au gouvernement actuel est acide. Abdelhak Serhane dénonce la corruption et le népotisme qui règnent en maître dans son pays.
Je ne peux terminer ce petit commentaire sans souligner la place prépondérante de l'image du sexe dans ce roman. Instrument de plaisir, de reproduction, de domination, responsable du malheur des femmes et de la jouissance des hommes il est omniprésent. Il fait de ce roman un roman d'apprentissage et d'initiation puisque dans le quotidien des jeunes gens, le sexe, sa taille et ses performances seront d'une importance capitale. La virilité est un attribut majeur, incontournable de la société décrite.
L'auteur nous propose des passages d'antologie sur le sujet et sa symbolique. Le récit du voyage chez l'oncle et la tante est un morceau choisi, hilarant, que j'ai lu et relu avec délectation!
Un texte et un auteur à découvrir donc! Je vous le conseille.
Auteur: Abdelhak SERHANE
Editeur: Seuil
Mai 2009
259 pages
ISBN: 978.2.02.099975.5
Quatrième de couverture:
Dans ce récit d'inspiration autobiographique, Abdelhak Serhane nous livre le portrait émouvant d'une enfance marocaine dans les années 50 au sein d'une famille très pauvre installée dans un village isolé du Haut-Atlas. Enfance douloureuse marquée par une extrême misère matérielle et affective, et dominée par la figure d'un père violent et d'une mère soumise. C'est pourtant dans ce contexte que le jeune narrateur va faire son apprentissage de la vie, s'initier au français en lisant les bribes de journaux dont son père a tapissé le plafond de sa masure, et prendre peu à peu conscience de la condition peu enviable de ses compatriotes subissant l'arbitraire d'un pouvoir archaïque. Car à travers la profusion d'anecdotes touchantes qui ponctuent l'histoire de cette famille, c'est en filigrane un tableau au vitriol d'une société gangrenée par la corruption et les interdits religieux qui est ici brossé, à mille lieux de l'image parfois complaisante que l'on peut avoir en Occident de la monarchie alaouite.
Un livre engagé servi par une plume alerte et une verve expressive.
Mon avis:
Avant toute chose, je tiens à préciser que, bien que cela ne soit pas annoncé dans la présentation de l'éditeur, ce livre n'est pas noir, au contraire, il m'a beaucoup amusée et a même provoqué de grands moments de rire. Certes le contexte décrit n'est pas drôle, misère et violence sont présentes au quotidien mais l'auteur les amène à travers des anecdotes de son enfance qui sont trucculentes!
Le principal atout de ce livre est qu'il est remarquablement bien écrit et par là-même très complet.
A travers le récit autobiographique, Abdelhak Serhane nous donne à voir la vie d'une famille pauvre marocaine dans les années 50. Les difficultés matérielles sont renforcées par l'obscurantisme du chef de famille qui travaille peu, impose ses convictions religieuses rigides et ses frasques adultérines à son épouse et ses enfants.
Très tôt, le jeune Abdelhak comprendra donc que le salut viendra de l'instruction et de l'émancipation du joug religieux. En effet, la foi n'est jamais présentée comme source d'enrichissement personnel ni comme recherche de perfectionnement mais toujours comme source de contrainte éventuellement imposée avec violence.
L'image de la famille: Le grand frère d'Abdelhak reproduit les velléités dominatrices de son père. Il est le plus souvent présenté comme n'ayant que l'insulte et l'invective à la bouche.
La mère fait ce qu'elle peut mais a déjà beaucoup de soucis personnels à gérer pour pouvoir agir efficacement pour améliorer le quotidien de ses enfants. C'est un personnage attachant dont on découvre peu à peu l'extrême richesse et toute la valeur intrinsèque. Elle ne se limite pas, loin de là, à la femme soumise décrite par l'éditeur.
Les soeurs sont quasi inexistantes.
La famille éloignée, oncles et tantes, a réussi socialement et n'éprouve que du mépris pour cette branche pauvre et inculte. Elle incarne l'imperméabilité des strates de la société.
Et pourtant, ce texte est porteur de nombreux espoirs, la mère et Abdelhak sont des révolutionnaires grandissants qui par leurs actes, mêmes futiles, témoignent d'une farouche envie d'émancipation. La mère est prête à affronter les foudres de tout son entourage pour échapper à la fatalité de la condition féminine de son pays. Elle veut bien tout endurer mais décide que huit grossesses à 25 ans cela suffit. Elle n'en démordra pas. Quelle modernité pour le Maroc (et pour la France) de ces années-là!
Abdelhak résiste en se rendant maître de son destin. Il parvient à imposer son envie de faire des études, concède des échecs pour mieux anticiper ses victoires. Il nous présente un rapport à l'écrit et au savoir particulièrement intéressant. Aucune opportunité n'est négligée et le savoir est vite érigé comme moyen d'affirmation et de protestation.
Le roman commence et se termine en 1994. Cela permet à l'auteur de transposer ses revendications de nos jours. La critique face au gouvernement actuel est acide. Abdelhak Serhane dénonce la corruption et le népotisme qui règnent en maître dans son pays.
Je ne peux terminer ce petit commentaire sans souligner la place prépondérante de l'image du sexe dans ce roman. Instrument de plaisir, de reproduction, de domination, responsable du malheur des femmes et de la jouissance des hommes il est omniprésent. Il fait de ce roman un roman d'apprentissage et d'initiation puisque dans le quotidien des jeunes gens, le sexe, sa taille et ses performances seront d'une importance capitale. La virilité est un attribut majeur, incontournable de la société décrite.
L'auteur nous propose des passages d'antologie sur le sujet et sa symbolique. Le récit du voyage chez l'oncle et la tante est un morceau choisi, hilarant, que j'ai lu et relu avec délectation!
Un texte et un auteur à découvrir donc! Je vous le conseille.
Véronique M.- Grand sage du forum
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Emploi/loisirs : prof d'écoles/ lecture randonnée jeux de société, puzzles
Genre littéraire préféré : un peu de tout, romans en tous genres,biographies, essais mais pas trop la science fiction.
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